La Fabrique de la paroisse Notre-Dame s’adresse aux gouvernements pour financer des travaux de réfection urgents estimés à 30 millions de dollars.

Composant avec des pertes de revenus estimées à 12 millions en raison de la pandémie de COVID-19, la Fabrique de la paroisse Notre-Dame réclame une intervention d’urgence des gouvernements pour permettre la poursuite des travaux de réfection essentiels à la sauvegarde de ce joyau patrimonial.

« C’est plus grand que nous, là, on a besoin d’aide », lance sans détour la directrice de la basilique Notre-Dame, Claudia Morissette, en entrevue.

La basilique Notre-Dame de Montréal a un grand besoin d’amour. Des travaux de conservation et de restauration – estimés au total à 30 millions – doivent être entrepris « à court et moyen terme » afin de préserver l’intégrité de ces installations historiques qui se « détériorent » rapidement, indique-t-on.

« L’ampleur et l’urgence des travaux à réaliser sont telles que la participation du gouvernement devient cruciale », écrivent le directeur général de la Fabrique de la paroisse, Jean-Charles Boily, et Mme Morissette dans une lettre envoyée le 19 juin aux trois ordres de gouvernement que La Presse a pu consulter.

« La participation municipale, provinciale et fédérale est déterminante pour garantir la sauvegarde et la pérennité » des installations, écrit-on dans la missive envoyée notamment au ministère de la Culture et des Communications et à Patrimoine Canada.

C’est que les besoins financiers de la basilique sont « exacerbés » par la crise sanitaire qui bouleverse particulièrement l’industrie touristique.

L’effondrement de la saison touristique privera la basilique Notre-Dame de la majeure partie de ses revenus pour l’année 2020 et peut-être même au-delà.

Extrait de la lettre de la Fabrique de la paroisse Notre-Dame

Claudia Morissette confirme une perte de 90 % des revenus pour l’année en cours. « On parle de 12 millions sur un budget de 14 millions », soutient-elle.

L’annulation de l’édition 2020 du Festival des grandes orgues de Montréal et celle des représentations du spectacle Aura, présenté à l’intérieur même de l’édifice, font mal à la basilique qui accueille plus d’un million de visiteurs chaque année. Cela en fait l’un des lieux les plus fréquentés par les touristes dans la métropole.

Par ailleurs, la fréquentation observée depuis le début de la saison ne permet pas la reprise des visites guidées.

Le volume requis de touristes n’est pas là dans le Vieux-Montréal, ce qui fait que ce n’est pas rentable de rouvrir. Il n’y a pas assez de volume pour réembaucher notre personnel.

Claudia Morissette, directrice de la basilique Notre-Dame

Une trentaine d’employés ont été mis à pied avec la fermeture du site, le 13 mars dernier. Le lieu de culte a rouvert partiellement le 20 juillet pour tenir certaines célébrations lorsque les autorités de santé publique ont donné le feu vert.

Les « besoins financiers » de la basilique « doivent s’inscrire dans les plans de relance » de l’économie québécoise, et une « aide financière d’urgence est indispensable pour assurer sa survie à court terme », plaide l’organisation.

« Dégradation préoccupante, voire même dangereuse »

La basilique explique avoir besoin du soutien financier pour poursuivre ses travaux de restauration, divisés en huit phases et échelonnés sur 10 ans. Le chantier de la première phase, estimée à 2,6 millions, devait être lancé en mars, mais n’a pu démarrer que le 23 juin dernier, toujours en raison de la pandémie.

Pour cette étape, la basilique a reçu 1 million en 2019 du Conseil du patrimoine religieux du Québec. Plus urgentes, les phases 1, 2 et 3 coûteraient environ 9,2 millions. On parle de la réfection et de la restauration des tours et des clochers.

Ces secteurs « montrent des signes de dégradation préoccupante, voire même dangereuse, et dans certaines sections, des mesures de protection et de stabilisation ont dû être mises en place en attendant que des réparations plus définitives puissent être réalisées », indique-t-on dans un document explicatif des travaux.

« Situation exceptionnelle »

La basilique a obtenu récemment une « réponse négative » à sa demande pour bénéficier de l’enveloppe de 15 millions annoncée par le ministère de la Culture et des Communications, en juillet dernier, visant à « assurer la protection, la transmission et la mise en valeur du patrimoine culturel à caractère religieux ».

Un mandat a été confié aux firmes Ryan Affaires publiques et Massy Forget Langlois, selon le Registre des lobbyistes, pour faire des démarches dans l’objectif d’obtenir une « aide d’urgence (subventions, prêt ou autre montant inconnu et programme inconnu) pour payer les entreprises qui effectueront les travaux ».

« On a toujours été autonomes. Dans les 40 dernières années, jusqu’en 2019, nous avons financé des travaux pour 18 millions, nuance Mme Morissette. Mais là, on est dans une situation exceptionnelle, et la crise accélère l’urgence d’agir. »

Claudia Morissette explique qu’il est hasardeux pour l’heure de chiffrer la hauteur de l’aide réclamée en raison du contexte. « C’est difficile parce que je ne peux plus m’appuyer sur mes prévisions financières de revenus parce que je n’ai aucune idée à quoi vont ressembler mes revenus de l’an prochain », illustre-t-elle.

En ce moment, on est dans le brouillard, et la situation change de mois en mois.

Claudia Morissette, directrice de la basilique Notre-Dame

On craint par ailleurs que l’estimation de 30 millions pour l’ensemble des travaux doive être revue à la hausse devant « la vitesse de dégradation des éléments du bâtiment qui s’aggrave de jour en jour ». La pandémie exerce aussi « une pression à la hausse sur les coûts de construction », souligne-t-on.

Travaux à réaliser et estimation des coûts

Phases 1 à 3 (urgent à dangereux)

Réfection, restauration façade nord : 2,6 millions

Réfection, restauration tour et clocher ouest : 3,4 millions

Réfection, restauration tour et clocher est : 3,2 millions

Phases 4 à 6 (à réaliser d’ici 1 à 4 ans)

Réfection et restauration façade : 2,2 millions

Escaliers : 0,6 million

Restauration décors peints, volet I : 2,3 millions

Phases 7 et 8 (à réaliser d’ici 5 à 10 ans)

Maçonnerie, autres façades : 8,8 millions

Restauration décors peints, volet II : 6,5 millions