Prenant bonne note de la grogne des arrondissements, l'administration Tremblay promet de revoir tout leur financement en 2012. L'annonce en a été faite à La Presse par le président du comité exécutif, Michael Applebaum, qui a promis de «régler le dossier» l'an prochain. «On commence avec une feuille blanche, a-t-il déclaré. Ça va être un gros travail. On va tout analyser.»

L'exercice, dont on verra les résultats dans le budget 2013, devrait permettre de rajuster les budgets des arrondissements en tenant mieux compte de leurs réalités. «Le développement, le secteur industriel, la population, la pauvreté, le coût du déneigement au kilomètre, les services de base, les bibliothèques: tout va être étudié. On pourra faire certains ajustements par rapport à des situations historiques, des décisions prises par le comité de transition, certains transferts qui n'étaient pas faits dans le passé.»

Après ce chantier, promet le président du comité exécutif, «on va arrêter de parler du financement incorrect». «On va analyser tout ça pour arriver avec une solution qu'on va présenter aux élus, pour qu'on puisse arrêter de parler de ça», a-t-il affirmé. Les arrondissements auront-ils l'agréable surprise de voir leur budget augmenter? «On verra, mais oui, il y aura des changements consistants.»

Alors qu'il a toujours nié que les arrondissements de Montréal étaient sous-financés, M. Applebaum a fait cette annonce en réaction à la plus récente sortie à ce sujet, celle du maire de l'arrondissement de Lachine, Claude Dauphin. Élu de la première heure du parti du maire Tremblay, M. Dauphin s'est dit «extrêmement déçu» du budget 2012 dévoilé la semaine dernière. En entrevue à La Presse, il a carrément estimé que «le système montréalais actuel est un échec».

Dans son budget 2012, l'administration Tremblay a légèrement diminué l'enveloppe globale versée aux arrondissements, le «montant d'équilibre», qui est passé de 852 à 850 millions. À Lachine, on a eu droit à une hausse de 0,2%, pour un total de 26,6 millions. Ce gel effectif, ce sont 2,4 millions à trouver pour l'an prochain, estime Claude Dauphin. «On n'a pas les moyens de donner les services, a-t-il déclaré en entrevue. On a éliminé

15 postes, aboli les camps de jour, instauré une nouvelle taxe spéciale... et on a toujours un manque à gagner de 400 000 $. Il va falloir abolir d'autres services. On va décider ça en cours d'année.»

«Obligés de quêter»

Le problème, juge-t-il, c'est que les arrondissements ne cueillent jamais les fruits du développement économique qu'ils génèrent. Au contraire. «Quand on développe de nouveaux quartiers, toutes les taxes foncières et la taxe de bienvenue vont à Montréal. Nous, on n'a pas un sou de ça. Il me reste les factures à la fin. Il faut donner les services pour les 50 prochaines années, mais on n'a pas les revenus adéquats.»

Sans mécanisme de péréquation, «on s'en va vers un échec total», prévient le maire d'arrondissement. «La nouvelle Ville de Montréal, après 10 ans, on peut en faire un bilan: je dis que le système actuel, notamment en matière de développement économique et de redevances aux arrondissements, est un échec.»

Attirer de nouveaux résidants ou des entreprises sans leur assurer les services promis, «ça ne fonctionne pas», dénonce-t-il. «Ce n'est pas normal qu'avec un beau parc industriel comme le nôtre, on soit obligés de quêter et de comprimer chaque année. Quand on attire de nouvelles populations chez nous, il faut leur donner des services. Ils veulent avoir des heures de bibliothèque, aller à l'aréna, qu'on ramasse le recyclage et les ordures.»

La sortie du maire de l'arrondissement de Lachine n'étonne pas Michael Applebaum, qui a déjà entendu ces récriminations par le passé. «Quand Claude demande de l'argent, il ne demande pas mon argent, mais celui des contribuables. J'ai pris l'engagement auprès du maire de ne pas augmenter les taxes foncières plus que l'inflation. Ce sont des temps difficiles pour nos contribuables.»

M. Applebaum rappelle cependant à M. Dauphin son devoir de loyauté puisqu'il est toujours membre d'Union Montréal. «Il fait partie de notre équipe. Je m'attends à ce qu'il vote en faveur du budget. C'est un budget responsable, un bon budget, difficile à critiquer même pour l'opposition.»

Le principal intéressé n'a toujours pas pris de décision. «Je vais attendre le jour du vote. On nous fait toujours miroiter des changements dans nos dotations.» Il estime «normal de faire des critiques positives et objectives, pour améliorer les choses».

Un des piliers d'Union Montréal depuis 2001 et nommé président du comité exécutif en 2008, M. Dauphin a cédé son poste de président du conseil municipal dans la controverse, en avril dernier. Soupçonné d'avoir favorisé un entrepreneur, il avait vu ses courriels interceptés par le service du contrôleur général de l'époque, Pierre Reid.