Du méthane s’échappait en grande quantité du site d’enfouissement Complexe Enviro Connexions à Terrebonne, mercredi après-midi, ont détecté les satellites de l’entreprise GHGSat.

Avec un taux d’émission estimé à 1,2 tonne par heure, il s’agit d’un rejet « assez sérieux », a déclaré à La Presse Jean-François Gauthier, vice-président responsable des mesures et initiatives stratégiques de GHGSat, leader mondial de la détection de méthane par satellite.

« C’est comparable à ce qu’on verrait d’une activité d’entretien sur un gazoduc, où on doit relâcher une partie du gaz [contenu dans la conduite] », illustre-t-il.

« Pour un site d’enfouissement canadien, c’est quand même assez important, car la plupart des sites au Canada sont des sites gérés, avec des toiles de protection étanches et des systèmes de collection des gaz », explique M. Gauthier. « Ce qu’on observe ici est généralement de moindre ampleur. »

IMAGE FOURNIE PAR GHGSAT

Image satellite détectant une émission de méthane au-dessus du site d’enfouissement Complexe Enviro Connexions, à Terrebonne, mercredi

La durée de la fuite, qui permettrait d’estimer la quantité totale de gaz relâché, est toutefois impossible à mesurer, puisque les satellites n’observent qu’un site à la fois, pendant 20 secondes chacun, fait savoir M. Gauthier.

GHGSat estime par ailleurs que son calcul du taux d’émission détecté mercredi au site d’enfouissement de Terrebonne est assujetti à un taux d’incertitude de 48,7 % – les capteurs des satellites mesurant la concentration de méthane dans l’atmosphère, l’estimation du taux d’émission repose sur des calculs qui tiennent compte de plusieurs facteurs, dont la vitesse du vent.

Ainsi, la fuite elle-même ne fait aucun doute, mais le calcul de son ampleur est par nature imprécis.

Le méthane (CH4) est un puissant gaz à effet de serre (GES), dont l’effet sur le réchauffement climatique est 86 fois plus important que celui du dioxyde de carbone (CO2) sur une période de 20 ans.

Le secteur des énergies fossiles en était le principal émetteur en 2022, selon les observations de la firme québécoise GHGsat, mais les sites d’enfouissement en génèrent aussi considérablement, tout comme l’agriculture.

Étonnement au Complexe Enviro Connexions

Le Complexe Enviro Connexions, qui appartient à l’entreprise Waste Connections, s’est montré étonné d’apprendre qu’une émission de méthane avait été détectée sur son site mercredi.

« Vous me l’apprenez », a répondu André Chulak, porte-parole de l’entreprise, joint par La Presse jeudi.

« Le tirage, cette semaine, ça se passe très bien », a-t-il indiqué, indiquant qu’aucune fuite n’avait été détectée par l’entreprise récemment.

« Notre taux de captage dépasse les 97 % », a-t-il ajouté, ce qui exclut donc selon lui la possibilité d’un problème d’étanchéité du site.

L’émission pourrait-elle provenir des installations de Trans Québec & Maritimes, qui injecte dans son gazoduc le gaz capté au Complexe Enviro Connexions ?

La Presse n’a pu joindre l’entreprise, jeudi soir.

Pas une première

Ce n’est pas la première fois que les satellites de GHGSat détectent une émission de méthane au Complexe Enviro Connexions, qui est le plus grand lieu technique d’enfouissement (LET) du Québec.

« On en a observé cinq ou six fois dans la dernière année, avec un niveau d’émission semblable chaque fois », relate Jean-François Gauthier.

« C’est un site qu’on regarde à l’occasion, quand c’est possible », ce qui dépend notamment des conditions météorologiques, explique-t-il.

Le Complexe Enviro Connexions n’est d’ailleurs pas un client de GHGSat, qui priorise logiquement la surveillance des sites des entreprises qui recourent à ses services.

GHGSat dévoile chaque jour, durant la 27Conférence des Nations unies sur le climat (COP27), une émission de méthane repérée récemment par ses satellites.

L’entreprise a aussi dévoilé en marge de l’évènement différentes statistiques tirées de ses observations de la dernière année, notamment le fait que l’Amérique du Nord a généré 10 % de toutes les émissions de méthane dans le monde en 2022.

Lisez l’article « Le méthane, ennemi du climat traqué par une firme québécoise »
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  • 14 %
    Proportion des fuites de méthane détectées par GHGSat en 2021 dans le monde qui provenaient du secteur des déchets
    Source : GHGSat