Après avoir subi un revers brutal lors du scrutin mardi soir, Stéphane Dion était le seul chef d'un parti fédéral à ne pas rencontrer la presse mercredi, se donnant du temps avant de répondre aux questions des journalistes, lesquelles tourneront inévitablement autour de son leadership.

La défaite a été douloureuse pour les libéraux, qui sont les seuls à avoir dû encaisser des pertes aux Communes. Ils ont concédé près d'une quinzaine de sièges et ont enregistré une baisse dans leur pourcentage de vote absolu.

Devant pareille débâcle, il y a fort à parier que, s'il ne rend pas lui-même les armes, M. Dion risque de se faire montrer la porte de sortie par des membres de ses propres rangs.

Mais du côté des libéraux du Québec, on semblait prêt à laisser d'abord la poussière retomber.

Le président du Parti libéral du Canada (PLC) section Québec, Robert Fragasso, convient que la défaite fait très mal.

«Nous avons eu un score bien en deçà de ce que nous pensions obtenir. Il faut se rappeler que c'est une défaite qui est plus importante que celle que nous avions eu à l'époque de (John) Turner» en 1984, a-t-il concédé.

Selon lui, un travail d'introspection devra être exercé par tous les libéraux, y compris par leur chef.

«J'ai confiance en son jugement et je suis sûr qu'il va se prêter à ce travail d'introspection, sur comment il peut améliorer son travail de chef. Et je suis certain qu'il va prendre les bonnes décision en fonction du Parti libéral du Canada», a indiqué M. Fragasso.

Pour le député réélu de Bourassa, Denis Coderre, il est inutile de brûler les étapes. Si ce qu'il appelle un «post-mortem» doit être fait, les libéraux n'envisagent «certainement pas laver leur linge sale en public».

Quant au député lui aussi reconduit dans Honoré-Mercier, Pablo Rodriguez, il croit qu'il n'est pas juste de montrer du doigt un seul coupable pour le mauvais score libéral.

«On ne peut pas imputer la défaite uniquement à M. Dion (...). Les victoires et les défaites se font en équipe», a-t-il soutenu.

Devant les quelques partisans réunis dans sa circonscription de Saint-Laurent-Cartierville, mardi soir, M. Dion n'a pas donné d'indices comme quoi il entendait démissionner.

«Les Canadiens me demandent d'être le chef de l'opposition et j'accepte cette responsabilité avec honneur», a-t-il lancé lors de son discours concédant la victoire à Stephen Harper.

Deux jours plus tôt, il avait traité M. Harper de «lâcheur» pour avoir envisagé lui-même quitter son poste de chef de parti advenant une défaite conservatrice.

S'il décide dans les prochains jours de demeurer à la tête du PLC, M. Dion devra cependant déployer des efforts surhumains pour rester en place, alors que les candidats souhaitant lui succéder risquent de se bousculer.

Car peu importe ce qui arrive, M. Dion devra se soumettre à un vote de confiance au congrès du parti au printemps 2009, à Vancouver.

Une course au leadership serait néanmoins coûteuse pour un parti qui ne roule certainement pas sur l'or et risquerait de le diviser encore davantage.

Le nouvel élu libéral dans Papineau, Justin Trudeau, croit qu'il est trop tôt pour envisager tout scénario de course à la direction du parti à l'issue de ce congrès.

«On parle du mois de mai prochain. Moi ce que j'espère c'est que d'ici là, on va avoir fait un bon travail de fond pour vraiment comprendre nos faiblesses (...) et à ce moment là, on sera plus en mesure de répondre à cette question (du leadership)», a indiqué M. Trudeau.

La victoire du fils de l'ancien premier ministre Pierre Eliott Trudeau sur la bloquiste Vivian Barbot figure parmi les seuls gains libéraux au pays.

Outre Terre-Neuve-et-Labrador, où la croisade du premier ministre provincial contre M. Harper a bénéficié au parti de M. Dion, le Québec est la seule province où les libéraux ont remporté de nouvelles circonscriptions.