Une manifestation a été organisée jeudi par l’Association générale des étudiantes en psychoéducation de l’Université de Montréal (AGÉPEUM) pour dénoncer le fait que leurs stages ne sont toujours pas rémunérés. Le fait que le problème touche essentiellement des programmes très prisés par des femmes a été dénoncé.

Pour avoir le titre de psychoéducateur et pouvoir œuvrer dans leur domaine, les étudiants doivent réaliser bénévolement deux stages de sept mois totalisant 920 heures, et ce, en même temps que de suivre leurs cours universitaires.

Selon l’Association, cela met les étudiants dans une situation précaire autant au plan financier que de leur santé mentale.

« Qu’est-ce que les psychoéducatrices, les infirmières, les travailleuses sociales, les orthophonistes et les professeures ont en commun ? Ce sont des professions où les femmes sont majoritaires et où les stages ne sont pas rémunérés », dénonce Marguerite Sabourin qui en est à sa première année du baccalauréat en psychoéducation.

Les femmes qui travaillent en relation d’aide sont surmenées et sous-payées. Cela fait des années qu’elles demandent de meilleures conditions, mais le gouvernement fait la sourde oreille. Pourquoi est-ce qu’on ignore les femmes quand elles ont des demandes tout à fait légitimes ?

Marguerite Sabourin, étudiante en psychoéducation

Naïmé Daoust-Zidane, qui en est à sa deuxième année de maîtrise, a évoqué la création récemment par le ministère de l’Enseignement supérieur de l’Observatoire sur le bien-être et la santé mentale étudiante en enseignement supérieur. Or, dit-elle, « le même ministère nous a refusé la bourse Perspective à la maîtrise en psychoéducation. On nous laisse faire 560 heures de bénévolat obligatoires à la maîtrise à nos propres frais et on nous dit qu’on s’inquiète pour notre santé mentale ? »

« À une époque où aucun service n’est gratuit et de plus en plus dispendieux, il est impensable que les stagiaires fournissent un service sans un salaire pour subvenir à leurs besoins de base », renchérit Virginie Goyer qui en est à sa deuxième année de baccalauréat en psychoéducation.

Annabelle Berthiaume, professeure au département de psychoéducation de l’Université du Québec à Trois-Rivières et auteure de Grève des stages, grève des femmes : une anthologie d’une lutte féministe pour un salaire étudiant, a beaucoup documenté la question des stages non rémunérés qui, effectivement, constate-t-elle, pénalise essentiellement les femmes.

En psychoéducation, en soins infirmiers, en travail social, etc., les étudiants font souvent leur stage dans le secteur public, tandis qu’en génie ou en droit — des domaines qui attirent davantage d’hommes — les stages se font souvent dans le secteur privé.

Or, dit-elle en entrevue téléphonique, le gouvernement du Québec « offre du financement et des crédits d’impôt pour encourager les entreprises privées à accueillir des stagiaires rémunérés. Il reproduit donc les inégalités de genre en mettant en application ce double standard dans la reconnaissance du travail en stage. »

Les étudiantes faisant leur stage dans le secteur public auront donc au mieux une bourse qui ne couvrira qu’une petite partie des heures réelles travaillées, souligne Mme Berthiaume, sans avoir de leviers pour faire respecter bon nombre de leurs droits (à l’égard d’heures supplémentaires, par exemple).

La loi sur les normes du travail ne s’applique pas aux stagiaires non rémunérés, bien que depuis août 2022, de nouveaux droits et de nouvelles protections ont été établis.