La seule école publique francophone située au centre-ville de Montréal s’apprête à subir une cure de rajeunissement, et pas n’importe laquelle. On investira au minimum 243 millions pour rénover le bâtiment patrimonial de style Beaux-Arts qui abrite l’école FACE. La Presse a visité les lieux avant la grande restauration prévue dans quelques années.

« The High School of Montreal » : sur une plaque dorée installée dans le majestueux hall d’entrée de l’établissement construit en 1913 et 1914, on célèbre les élèves et les maîtres de l’école qui ont servi durant la Première Guerre mondiale.

  • Construit principalement en 1913-1914, le bâtiment qui abrite aujourd’hui l’école FACE est situé en plein cœur de la ville, dans le secteur du Mille carré doré, à deux pas de l’Université McGill.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Construit principalement en 1913-1914, le bâtiment qui abrite aujourd’hui l’école FACE est situé en plein cœur de la ville, dans le secteur du Mille carré doré, à deux pas de l’Université McGill.

  • Cette classe est devenue la salle du conseil étudiant. L’impressionnant tableau est resté. « Avant il y avait une superbe prof qui enseignait le français et le cinéma en secondaire 5. Il faut avoir une personnalité particulière pour aimer ce petit espace », dit Stéphane Abran, le directeur de l’école.

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    Cette classe est devenue la salle du conseil étudiant. L’impressionnant tableau est resté. « Avant il y avait une superbe prof qui enseignait le français et le cinéma en secondaire 5. Il faut avoir une personnalité particulière pour aimer ce petit espace », dit Stéphane Abran, le directeur de l’école.

  • Les gymnases ont conservé leurs planchers d’origine. Au plafond, les tuyaux de l’ancien système de chauffage à eau chaude sont restés. « La brique vernissée est la brique d’origine », dit l’architecte Julie Bédard.

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    Les gymnases ont conservé leurs planchers d’origine. Au plafond, les tuyaux de l’ancien système de chauffage à eau chaude sont restés. « La brique vernissée est la brique d’origine », dit l’architecte Julie Bédard.

  • La salle de concert a été restaurée au tournant des années 2010. On peut y accueillir environ 600 personnes. C’est là que les élèves de secondaire 5 font leur dernier concert, après 12 années passées à l’école.

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    La salle de concert a été restaurée au tournant des années 2010. On peut y accueillir environ 600 personnes. C’est là que les élèves de secondaire 5 font leur dernier concert, après 12 années passées à l’école.

  • D’un côté les filles, de l’autre les garçons : les escaliers étaient conçus spécialement pour assurer la séparation entre les sexes ! Il y en a quatre dans tout le bâtiment.

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    D’un côté les filles, de l’autre les garçons : les escaliers étaient conçus spécialement pour assurer la séparation entre les sexes ! Il y en a quatre dans tout le bâtiment.

  • L’horloge de la bibliothèque est d’origine et fonctionne toujours. Les boiseries ont été restaurées il y a quelques années après qu’un dégât d’eau soit survenu.

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    L’horloge de la bibliothèque est d’origine et fonctionne toujours. Les boiseries ont été restaurées il y a quelques années après qu’un dégât d’eau soit survenu.

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Aujourd’hui, ce sont les jeunes de l’école FACE qui arpentent les couloirs de la bâtisse signée par les frères Edward et W. S. Maxwell, des architectes à qui l’on doit aussi le Musée des beaux-arts de Montréal.

Il s’agit d’une école à vocation artistique où se côtoient des élèves de la maternelle à la 5e secondaire, du centre de services scolaire de Montréal (CSSDM), mais aussi de la commission scolaire English-Montréal. FACE, c’est pour « Formation artistique au cœur de l’éducation », ou « Fine arts core education », selon la langue qu’on choisit.

On sait depuis des années que le bâtiment de la rue University, voisin du campus de l’Université McGill, devra être rénové de fond en comble. Il est arrivé à sa « fin de vie utile », dit Stéphane Chaput, directeur général adjoint du CSSDM.

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Dans le cadre des rénovations, la cour intérieure sera réaménagée et sera destinée aux petits de la maternelle.

C’est une bâtisse historique qui rappelle son époque. « Au départ, l’école était aménagée sur la base d’une ségrégation des sexes », lit-on dans l’étude patrimoniale menée pour le compte du CSSDM.

Une aile était pour les filles, l’autre pour les garçons. BOYS, GIRLS, lit-on au-dessus des entrées extérieures. La cafétéria est aussi séparée en deux, et on a poussé le concept jusque dans les escaliers dits « croisés » : ils étaient ainsi conçus pour que les élèves de sexes différents ne s’y croisent pas, justement.

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Julie Bédard, architecte pour le centre de services scolaire de Montréal

Une telle conception d’escaliers, l’architecte du CSSDM Julie Bédard dit qu’elle n’avait « jamais vu ça », pas plus que les autres architectes qui ont été appelés à visiter le bâtiment.

Les loggias en façade, la petite classe avec un immense tableau, les armoires en bois du local de sciences et la bibliothèque, restée inchangée depuis 1915 et superbement restaurée après un dégât d’eau, sont autant de joyaux qui survivront à la réfection de cet « exemple exceptionnel de l’architecture scolaire à Montréal au début du XXe siècle », lit-on aussi dans l’étude patrimoniale.

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Avec ses boiseries, le laboratoire de sciences aussi témoigne du passé. De là, les élèves ont une vue imprenable sur le mont Royal.

Des centenaires en « très mauvais état »

Cette école, comme l’école secondaire Sophie-Barat dans le quartier Ahuntsic, est au nombre des bâtiments patrimoniaux du CSSDM. Considérées comme en « très mauvais état » par Québec, elles constitueront les deux gros chantiers des prochaines années pour le centre de services.

« Je me suis fait poser la question : pourquoi ne pas trouver un autre endroit [pour relocaliser l’école] ? Si on cherche un terrain pour reconstruire un bâtiment comme celui-là, neuf, il n’y en a pas », dit M. Chaput, qui ajoute que le centre de services a une « responsabilité sociale par rapport au patrimoine ».

N’aurait-on pas dû s’en occuper avant, des belles écoles centenaires ?

« Il y a des choix qui ont fait que les coquilles de nos bâtiments au fil des 40 ou 50 dernières années n’ont pas été entretenues à la hauteur de ce qu’elles auraient dû être », admet M. Chaput.

Reste que l’école Sophie-Barat, dont une aile a été fermée d’urgence il y a quelques années parce que jugée trop dangereuse, a été récupérée comme une « icône de vétusté », ajoute le directeur général adjoint.

« Pourquoi ? Il y en a des pires au Québec », estime Stéphane Chaput.

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Stéphane Chaput, directeur général adjoint du centre de services scolaire de Montréal

Le bâtiment de FACE, assure-t-on, est parfaitement sécuritaire. Le CSSDM a récemment embauché à temps plein un régisseur dont le travail consiste à s’assurer que « rien ne va faire que le bâtiment sera plus vétuste que ce qu’il devrait l’être ».

L’idée : s’assurer de pouvoir se rendre jusqu’au déménagement des élèves, prévu pour les rentrées 2024 et 2025. Pendant les travaux de réfection, les élèves du primaire et du secondaire iront apprendre dans deux écoles dites transitoires, des bâtiments que le CSSDM est… à rénover.

Si tout va comme prévu, ils y seront pour cinq ans. Le CSSDM estime que la nouvelle école, dont la conception a été confiée au consortium d’architectes Beaupré Michaud, Ædifica et Smith Vigeant Architectes, ouvrira en 2029 ou 2030.

« Ça va dépendre des surprises qu’on va avoir au fur et à mesure », dit Stéphane Chaput, directeur général adjoint du CSSDM.

On pourra alors dire de l’école, qui sera âgée de près de 120 ans, qu’elle s’est refait une jeunesse.

En savoir plus
  • 1300
    Nombre d’élèves qui devront déménager d’ici quelques années pour qu’on rénove l’école FACE.
    Source : CSSDM
    24 millions de dollars
    Depuis 2003, somme investie dans les travaux d’entretien du bâtiment patrimonial.
    Source : CSSDM