(Québec) La Centrale des syndicats du Québec (CSQ) demande au gouvernement Legault d’imposer un mot d’ordre aux centres de services scolaires afin qu’ils retirent les enseignantes enceintes qui font l’objet d’un retrait préventif sans qu’elles soient tenues de faire d’autres tâches qui nécessitent des contacts avec des élèves.

Selon la centrale, près du tiers des centres de services scolaires où elle représente des syndicats réaffectent des enseignantes enceintes à d’autres tâches qui nécessitent qu’elles côtoient par la même occasion plusieurs élèves, parfois sans masque ou en bas d’une distance de deux mètres. Elle juge cette situation inacceptable dans le contexte d’une vague d’infections à la COVID-19.

Selon la vice-présidente de la CSQ, Line Camerlain, cet enjeu en matière de santé au travail survient dans les centres de services scolaires où la pénurie de main-d’œuvre est criante. « Mais on ne peut pas mettre à risque la santé des femmes enceintes et de leur futur bébé à cause de la pénurie de main-d’œuvre », affirme-t-elle.

Une lettre envoyée à Québec

En février dernier, la centrale syndicale a envoyé une lettre aux ministres Jean-François Roberge à l’Éducation, Jean Boulet au Travail et Christian Dubé à la Santé, afin de dénoncer cette situation. Dans cette missive, que La Presse a obtenue, la CSQ cite un avis émis en décembre par l’Institut de la santé publique du Québec (INSPQ) où il est écrit que « les travailleuses enceintes ayant reçu deux ou trois doses de vaccin ou ayant déjà fait la maladie avant décembre 2021 sont depuis considérées partiellement protégées ».

L’INSPQ poursuit ensuite en indiquant que les travailleuses enceintes doivent dans ce contexte « minimiser [leurs] contacts », « favoriser le télétravail » et « assurer une distanciation physique minimale de deux mètres », ce qui est impossible, juge le syndicat, en contexte scolaire.

« Vous comprendrez que nous avons d’énormes difficultés à concilier les recommandations de l’INSPQ et la réaffectation des travailleuses du milieu scolaire et, particulièrement, des enseignantes du primaire à des postes au secondaire, comme cela semble s’étendre présentement dans les centres de services scolaires », déplore la CSQ dans sa lettre.

« Comment peut-on limiter les contacts avec des personnes différentes en même temps et favoriser de petites équipes stables quand on place une femme enceinte dans une classe composée de 25 à 30 élèves, et même plus, au secondaire ? On s’éloigne encore plus de la recommandation de l’INSPQ quand la même personne se retrouve dans un autre groupe d’élèves à la période suivante et qu’elle rencontre parfois jusqu’à quatre et même cinq groupes dans une journée, c’est-à-dire possiblement 150 élèves », ajoute-t-elle.

Une situation jugée « indécente »

Le cabinet du ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, confirme avoir reçu la lettre de la centrale syndicale. Il affirme toutefois qu’il n’a pas l’intention de s’immiscer dans des cas spécifiques et que le syndicat doit s’adresser à la CNESST dans l’éventualité d’un litige entre une enseignante et un centre de services scolaire face à une question de retrait préventif.

Pour la CSQ, il est toutefois essentiel que tous les centres de services scolaires appliquent les règles sanitaires encadrant les retraits préventifs de la même façon. Le syndicat estime qu’il est « indécent » d’utiliser « les femmes enceintes pour combler les besoins qui ne peuvent être comblés autrement », et qu’il est « impossible compte tenu des effectifs de la [CNESST] de faire déplacer un inspecteur pour chaque cas » contesté entre une enseignante et son employeur.

« Si le programme PMSD a été créé, c’est pour protéger toutes les femmes enceintes et cette protection demeure primordiale, surtout lorsque l’INSPQ considère que les femmes enceintes sont moins protégées que la population en général lorsqu’il s’agit de la COVID-19 », affirme Line Camerlain.

« [La situation actuelle] bafoue les droits de ces femmes-là et c’est dangereux pour leur santé et pour celle de leur enfant à naître », juge-t-elle.