Environ 3,5 % des classes des écoles publiques du Québec ont un taux de CO2 supérieur au seuil limite de 1500 ppm fixé par le ministère de l’Éducation.

Pour la première fois depuis l’installation des lecteurs de CO2, le ministère de l’Éducation du Québec a dévoilé mercredi matin l’état de la qualité de l’air dans les classes des écoles publiques du Québec.

La semaine dernière, 96,5 % des classes avaient un taux moyen hebdomadaire de CO2 inférieur au seuil limite de 1500 ppm (parties par million) fixé par le gouvernement du Québec. Toutefois, 3,5 % des classes avaient un taux moyen hebdomadaire de CO2 supérieur à 1500 ppm : 3,1 % des classes avaient un taux jugé limite entre 1500 et 2000 ppm, et 0,4 % des classes avaient un taux supérieur à 2000 ppm, un seuil à ne pas dépasser, selon le ministère de l’Éducation. La situation était similaire pour les trois semaines précédentes.

Le niveau de CO2 mesure la qualité de l’air dans une classe. En temps de COVID-19, cette mesure est particulièrement importante. Plus le taux de CO2 est faible (ex. : moins de 1000 ppm), mieux la classe est ventilée, et moins il y a de risques que le virus infecte de façon aérienne d’autres élèves dans la classe si un élève a la COVID-19.

Quand le taux moyen de CO2 est à un seuil limite entre 1500 et 2000 ppm, le ministère de l’Éducation recommande aux écoles d’apporter des correctifs, notamment d’ouvrir davantage les fenêtres et les portes. Au-delà de 2000 ppm, Québec demande aux écoles d’en faire part aux centres de services scolaires, qui pourront ainsi demander un échangeur d’air. À la fin du mois de janvier, Québec avait installé environ 500 échangeurs d’air dans les écoles.

Le ministère de l’Éducation publiera maintenant de façon régulière les données sur le taux de CO2 dans les écoles, comme il le fait pour le taux d’absentéisme des élèves. Les taux de CO2 représentent la moyenne des taux durant la journée scolaire entre 8 h et 16 h du lundi au vendredi (y compris lorsqu’il n’y a pas d’élèves dans la classe, ainsi que les journées pédagogiques ou de tempête).

518 millions

Le gouvernement du Québec a aussi indiqué mercredi matin qu’il avait dépensé 293 millions en travaux pour améliorer la qualité de l’air dans les écoles depuis le début de la pandémie (pour être plus précis, il s’agit des travaux réalisés depuis juillet 2020). Québec dit aussi prévoir d’autres travaux de 225 millions au cours de la prochaine année pour améliorer la qualité de l’air – ce qui portera la somme totale à 518 millions depuis juillet 2020.

Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, estime que ces 518 millions seront suffisants pour améliorer la qualité de l’air dans les écoles. « À la fin de l’opération dont on parle, [une opération de] près d’un demi-milliard, je pense que les travaux seront faits. Il y aura toujours des correctifs à apporter, on améliore notre réseau en continu, mais le travail sera fait », a dit Jean-François Roberge en point de presse mardi.

Avec ses dépenses de 293 millions depuis l’été 2020, le Québec est la deuxième province qui a dépensé le plus (au prorata de sa population) pour des travaux d’amélioration de la qualité de l’air parmi les quatre provinces recensées par La Presse.

Le Québec accuse toutefois un retard par rapport à d’autres provinces comme la Colombie-Britannique et le Nouveau-Brunswick : 54 % de ses écoles publiques n’ont pas de système de ventilation mécanique, un ratio beaucoup plus élevé.

De façon générale, un système de ventilation mécanique est la meilleure solution en matière de qualité de l’air dans les écoles – ce qui permet notamment d’y diminuer la propagation de la COVID-19. On peut aussi installer un échangeur d’air, ouvrir les fenêtres et les portes ou installer un purificateur d’air pour améliorer la qualité de l’air dans une classe.

Trop tard, disent les partis de l’opposition

Les partis de l’opposition à l’Assemblée nationale estiment que ces dépenses pour améliorer la qualité de l’air dans les écoles surviennent trop tard durant la pandémie.

« C’est vraiment très tard. Plus que tard. Je veux dire, la réalité, c’est : pourquoi est-ce que ces investissements-là n’ont pas eu lieu bien en amont de tout ça ? », a demandé Dominique Anglade, cheffe de l’opposition officielle et du Parti libéral du Québec.

« Le problème, ce n’est pas le montant, c’est la vitesse d’exécution, dit Gabriel Nadeau-Dubois, chef parlementaire de Québec solidaire. À l’automne 2020, Québec solidaire demandait la mise en place de détecteurs de CO2 et de purificateurs d’air dans les classes du Québec. Jean-François Roberge a [alors] ridiculisé notre proposition, littéralement, a dit qu’on se prenait pour d’autres. […] Mon problème avec ce dossier-là, ce n’est pas le montant, c’est la lenteur inadmissible de Jean-François Roberge qui s’est traîné les pieds. »

« [Le ministre Jean-François Roberge] est sûrement en retard, dit Paul St-Pierre Plamondon, chef du Parti québécois. […] Quand le gouvernement nous répète sans arrêt que personne n’aurait fait mieux, allez voir la ventilation dans le reste du Canada. Les gestes qui ont été posés, les avancées pour justement donner des environnements sécuritaires dans les classes. Regardez ce que la communauté anglophone à Montréal a décidé de faire en finançant soi-même les purificateurs d’air tellement le gouvernement a dormi sur ça. Qu’on arrête de me dire que personne n’aurait fait mieux, s’il vous plaît. »

Les partis de l’opposition ont aussi dénoncé le peu de transparence du gouvernement Legault dans ce dossier. D’autres provinces canadiennes comme la Colombie-Britannique, l’Ontario et le Nouveau-Brunswick ont chiffré leurs dépenses en matière de qualité de l’air depuis un certain temps. La Presse faisait d’ailleurs état des dépenses de ces provinces dans un article publié mercredi matin (Québec n’avait alors pas souhaité donner ses chiffres). « Je suis surprise, d’abord et avant tout, de constater à quel point, si on se compare à d’autres endroits comme la Colombie-Britannique et l’Ontario, ces chiffres-là sont disponibles. Mais qu’on n’ait pas ces chiffres au Québec », a dit Dominique Anglade.

Le ministère de l’Éducation du Québec a publié ses chiffres mercredi matin par communiqué de presse. Parmi les 293 millions dépensés par Québec pour améliorer la qualité de l’air, Québec aurait dépensé 188 millions pour l’entretien de systèmes de ventilation mécanique, 78 millions pour remplacer ou ajouter des fenêtres ouvrantes, 13 millions pour réparer des systèmes de ventilation, et 14 millions pour d’autres mesures (ex. : remplacement des filtres de système de ventilation, échangeurs d’air), selon un article publié mercredi dans Le Journal de Québec.

Avec Hugo Pilon-Larose et Charles Lecavalier, La Presse