La loi 40 du gouvernement Legault, qui remplace les commissions scolaires par des centres de service, restera bel et bien suspendue dans le réseau anglophone, du moins pour le moment. Un juge de la Cour d’appel vient de reporter la cause jusqu’à la mi-septembre. Québec, de son côté, rappelle que rien n’est encore joué.

« Notre communauté est résolue à défendre notre droit de gérer et de contrôler nos établissements d’enseignement de la langue minoritaire », a réagi le président de l’Association des commissions scolaires anglophones du Québec (ACSAQ), Dan Lamoureux, dans une déclaration publiée vendredi.

Il ajoute que ce combat va « au-delà de nous, ici présents », les commissions scolaires anglophones luttant d’abord « pour la vitalité et l’avenir » de leurs écoles, « au profit de la génération actuelle et de celles qui suivront ».

La semaine dernière, la Cour supérieure du Québec a accordé un sursis aux commissions scolaires anglophones avant l’application de la loi 40. Le ministre de l’Éducation, Jean-François Roberge, avait alors signifié son intention de porter appel de la décision, se disant « convaincu que nous respectons les droits des communautés anglophones de gérer et contrôler leur réseau ».

Vendredi, le juge Benoît Moore a toutefois refusé de renverser la décision du juge de la Cour supérieure, Sylvain Lussier, en préférant renvoyer la cause au 14 septembre. C’est donc dire que la suspension de la loi reste en vigueur du côté anglophone. Dans sa première décision, le juge Lussier avait par ailleurs reconnu qu’il existait « un débat sérieux quant au respect de l’autonomie décisionnelle de la minorité anglophone en matière scolaire ».

C’est le président du Comité de parents de la Commission scolaire Sir-Wilfrid-Laurier, Adam Gordon – ainsi que l’ACSAQ et la Commission scolaire Lester-B. -Pearson – qui avaient lancé en mai la contestation initiale de la loi 40, adoptée sous bâillon au début février. Les plaignants avaient alors plaidé que la loi fait « complètement abstraction » des droits du réseau anglophone, contrevenant ainsi à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés.

Encore du chemin à faire

Joint par La Presse, le cabinet de M. Roberge indique qu’il demeurera « prudent dans ses commentaires », mais soutient qu'aucune décision n'a encore été rendue. « Les requêtes n’ont pas été tranchées et ont simplement été déférées à une formation qui entendra l’affaire le 14 septembre », souligne l’attaché de presse, Francis Bouchard.

L’ACSAQ, qui représente 340 écoles primaires, secondaires ou centres de formation professionnelle et quelque 100 000 élèves, souligne toutefois qu’il s’agit « du deuxième revirement pour le Procureur général du Québec » dans les deux dernières semaines.

Par ailleurs, les élections scolaires, que le réseau anglophone a réussi à conserver, doivent en théorie se tenir au début novembre. Or, comme le processus juridique en cours rend leur tenue « totalement impraticable », Dan Lamoureux presse Québec de reporter le scrutin jusqu’en 2021.

Il faudra aussi « prolonger les mandats des commissaires scolaires actuels jusqu’à ce que ces élections aient lieu », souligne M. Lamoureux. « Il s’agit là de la seule réaction respectueuse et raisonnable à la présente situation », avance-t-il. Le gouvernement Legault, lui, n’a pas souhaité émettre de commentaires sur cet enjeu, vendredi, « étant donné que le dossier est présentement judiciarisé ».