(Québec) « Ça ne passe pas. » Dur constat que fait la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE), neuf mois après le retour du cours d’éducation à la sexualité dans les écoles primaires et secondaires du Québec.

Les enseignants sont toujours mal à l’aise d’enseigner cette matière sensible, pour laquelle ils ne se considèrent pas des experts, selon la présidente de la FSE-CSQ, Josée Scalabrini.

En entrevue à La Presse canadienne, elle a déclaré en vouloir au gouvernement d’avoir rendu ce contenu obligatoire, sans vraiment consulter les enseignants, qui aujourd’hui éprouvent des difficultés.

Le gouvernement Couillard avait annoncé fin 2017 qu’il ramenait le cours d’éducation sexuelle — aboli lors de la réforme de 2003 — et le rendait obligatoire dès l’automne 2018, dans la foulée du mouvement #moiaussi.

Des réticences exprimées par des parents et des enseignants ont ralenti l’implantation du cours, mais la nouvelle administration caquiste a persisté et tranché que le programme contenait des notions « primordiales pour nos jeunes ».

Neuf mois plus tard, les enseignants sont pris avec cette tâche dont ils ne voulaient pas, selon Mme Scalabrini, et ils ne savent pas s’ils parviendront à enseigner les 5 à 15 heures d’éducation sexuelle.

PHOTO PASCAL RATTHÉ, ARCHIVES LE SOLEIL

Josée Scalabrini, présidente de la Fédération des syndicats de l’enseignement

« On est arrivé avec une solution qui nous est venue d’en haut, qui a été improvisée, qui n’a pas été préparée et on a obligé les enseignants à aller enseigner dans du mur-à-mur », a-t-elle pesté en entrevue téléphonique, en précisant pourtant être en faveur de l’éducation à la sexualité.

Au départ, les enseignants ne devaient pas être forcés à donner le cours ; d’autres intervenants, comme des travailleurs sociaux, pouvaient aussi le dispenser. Il appartenait aux écoles de déterminer le moment et la manière pour offrir ces cours.

Or, sur le terrain, c’est une tout autre histoire, selon la chef syndicale. Les écoles ont très peu de latitude, la grille-matières du régime pédagogique étant déjà suffisamment remplie, et il n’y a pas d’argent pour embaucher des intervenants externes.

« Tu ne peux pas faire ça sur l’heure du midi par une activité si tu veux couvrir tous les élèves, tu ne peux pas en faire une semaine thématique, donc la solution pour tous les milieux ça a été de dire : “Bien, c’est les enseignants qui vont le faire”. […] Oui, mais on va retirer quoi ? »

Mme Scalabrini rapporte que ses membres ne se sentent pas « à l’aise » d’enseigner l’éducation à la sexualité, car ils craignent entre autres d’être incapables de répondre aux questions difficiles des élèves. « Ce n’est pas réglé », prévient-elle.

Depuis septembre 2018, les jeunes Québécois doivent recevoir cinq heures de cours d’éducation à la sexualité par année durant le primaire et 15 heures par année au niveau secondaire.

Au primaire, les thématiques tournent davantage autour de l’estime de soi, du respect et de l’empathie. Des sujets tels que le sexisme et l’homophobie y sont abordés.

Au secondaire, la notion de consentement devient plus centrale et les questions de relations amoureuses, des comportements, de la violence sexuelle, des maladies transmises sexuellement et des grossesses précoces figurent au cursus.

La FSE représente plus de 60 000 enseignants des commissions scolaires du Québec. Elle est affiliée à la Centrale des syndicats du Québec.

Quelques exemples d’apprentissages

Maternelle

– les parties du corps

– les étapes de la naissance

Fin du primaire

– la puberté

– le sexisme et l’homophobie

Secondaire

– la notion de consentement

– l’orientation sexuelle

– la contraception et les infections transmises sexuellement

Source : ministère de l’Éducation