L'opposition doute fort de la capacité du gouvernement libéral d'implanter 70 nouveaux groupes de maternelle pour les bambins de quatre ans en milieu défavorisé à temps pour la rentrée - et tout autant de sa récente promesse de l'étendre à tous les enfants québécois.

Les 70 classes seront en place pour la prochaine année scolaire, a assuré le jour même le ministre de l'Éducation, Sébastien Proulx, qui soutient que le projet n'accuse «aucun retard».

Le Parti québécois (PQ) et la Coalition avenir Québec (CAQ) ont reproché jeudi au gouvernement de n'avoir aucune idée de ce qu'il veut faire en matière d'éducation et d'être en mode improvisation.

La promesse des 70 classes en milieu défavorisé a été annoncée par Québec en novembre. La maternelle universelle a été décidée au conseil général du Parti libéral dimanche dernier.

Mais alors que l'année scolaire actuelle tire à sa fin, le milieu de l'enseignement dit s'inquiéter du manque d'information du ministère pour mener à terme ce projet.

La situation a été dénoncée jeudi matin en point de presse par le député Alexandre Cloutier, aussi porte-parole péquiste en matière d'éducation.

Il a fait valoir qu'avec ce manque d'information, il est impossible pour les commissions scolaires d'effectuer la planification nécessaire, sans savoir où ces classes seront installées et sans connaître le budget dont elles disposeront.

«On est rendu à la fin du mois de mai et les commissions scolaires n'ont eu aucune information sur le déploiement à venir», a lancé M. Cloutier.

«On arrive à la fin de l'année, à la dernière minute, puis on leur dit: bien là, on vous donnera de l'information incessamment, sous peu.»

«Quel manque de vision, quelle improvisation», a dénoncé le député.

Devant ce constat, M. Cloutier indique que les libéraux sont «à des années-lumière» d'étendre la maternelle quatre ans à tout le réseau, puis qu'ils ne sont même pas capables de faire le premier pas avec les groupes en milieu défavorisé.

Le porte-parole de la CAQ en matière d'éducation, Jean-François Roberge, est du même avis. Il se dit loin d'être certain que les parents pourront envoyer leurs enfants de quatre ans dans les 70 nouveaux groupes à la fin de l'été.

Le gouvernement aurait dû donner les directives en janvier, pour que les écoles aient le temps de s'organiser, croit-il.

Il estime que le gouvernement a lancé en l'air cette idée de la maternelle à quatre ans sans y avoir réfléchi.

«Nous, on a préparé un plan précis graduel sur cinq ans», fait-il valoir, ajoutant que son parti a un plan d'infrastructure, pour évaluer les agrandissements et aménagements requis, et prévoir l'embauche du personnel supplémentaire qui sera requis. Il affirme qu'il manque 5400 classes pour offrir la maternelle à tous les petits Québécois de quatre ans.

Le Parti libéral a récupéré le plan de la CAQ, «mais il ne comprend pas ce que ça représente», dit-il.

M. Roberge estime que le gouvernement doit mettre les bouchées doubles dès demain pour libérer le budget nécessaire afin que cet objectif se réalise.

Les deux porte-parole ont rappelé que le comité-conseil, chargé de conseiller le ministre de l'Éducation sur cet enjeu, n'a pas tenu de réunion en près d'un an.

En entrevue avec La Presse Canadienne jeudi après-midi, le ministre Proulx affirmait n'avoir aucune inquiétude.

Bien qu'il reste à identifier les milieux défavorisés où ces classes seront implantées, «il n'y a aucun retard», assure-t-il, précisant que les «derniers contacts sont en train de se faire», les espaces disponibles sont vérifiés, tout comme les ressources disponibles. Le budget est déjà dégagé, a ajouté le ministre.

«Il s'agit d'une question de jours», a-t-il dit. Le ministère va rencontrer les différentes commissions scolaires et les annonces suivront.

Le ministre Proulx soutient que l'an dernier, les classes ont été annoncées à la mi-juin. «Et ce n'est pas différent des autres années. Tout sera en place», a-t-il conclu.

Tous les partis à Québec revendiquent la paternité de l'idée de la maternelle dès l'âge de quatre ans. Alexandre Cloutier a rappelé que le Parti québécois sous Pauline Marois avait entamé ce plan en 2012. Puis l'idée a été prônée par la CAQ et remise dans l'air du temps. Le gouvernement libéral avait d'abord écarté cette proposition de la CAQ avant de l'adopter dimanche et soutenir que son parti en avait parlé avant la formation caquiste.