Comme partout au Québec, les élèves du Juvénat Saint-Louis-Marie terminent leur année scolaire ces jours-ci. Ils passeront leurs examens cette semaine. Et les enseignants les corrigeront.

Mais cette année, les résultats scolaires du Juvénat, habituellement conservés sur place, seront envoyés au ministère de l'Éducation, tout comme les archives des 58 dernières années. Puis, durant l'été, on remettra les clés de l'école à la caisse populaire locale, à qui reviendra la tâche de la vendre.

Après 58 ans d'existence, le Juvénat Saint-Louis-Marie, à Saint-Guillaume, dans le Centre-du-Québec, ferme ses portes. La petite école privée avec pensionnat n'a plus assez d'élèves pour poursuivre ses activités. Il y en avait 51 cette année, répartis dans trois classes (1re, 2e et 3e secondaire). L'école n'avait qu'une quarantaine d'inscriptions pour septembre prochain.

Déjà endetté de 170 000$, le Juvénat Saint-Louis-Marie fonctionnait à perte depuis trois ans. Les prévisions des années prochaines étaient sombres: impossible d'assumer les frais de roulement, encore moins d'entretenir comme il le faudrait l'édifice centenaire, construit en 1886.

Le Juvénat Saint-Louis-Marie est planté au milieu de la municipalité de Saint-Guillaume, à une trentaine de kilomètres à l'ouest de Drummondville. En 1956, les frères de Saint-Gabriel l'ont acquis pour la somme symbolique de 1$, à condition d'enseigner aux garçons du village. Ils ont rénové le bâtiment à l'abandon avec l'aide des villageois. En 1999, les frères l'ont donné à une corporation laïque formée de villageois, qui le gère encore aujourd'hui.

«Dans les années 90, on a eu jusqu'à 91 inscriptions», se souvient le directeur Luc Georgeff, qui y enseigne depuis 1985.

Depuis une dizaine d'années, le Juvénat tente par plusieurs moyens d'attirer la clientèle, qui vient du Centre-du-Québec, mais aussi de Montréal et d'ailleurs au Québec. L'hiver dernier, la direction a tenté un blitz de recrutement. Si un élève recrutait un autre élève, on lui offrait un iPod nano. Pour deux nouveaux élèves, on lui offrait un iPod touch. Et pour trois élèves, un iPad. «On n'a eu aucune nouvelle inscription», dit Luc Georgeff.

Des élèves ont durement encaissé l'annonce de la fermeture, le mois dernier. À La Presse, plusieurs ont souligné le caractère familial du Juvénat. Les deux tiers des élèves étaient pensionnaires.

«C'est vraiment triste, ça me fait vraiment quelque chose», dit Rachel St-Laurent, dont les deux frères aînés ont fréquenté le Juvénat. Son jeune frère, qui était inscrit en première secondaire l'an prochain, ne pourra suivre la trace de ses aînés.

Que feront ces jeunes en septembre? La moitié d'entre eux se sont inscrits au collège Saint-Bernard, à Drummondville, où il y a aussi un pensionnat. C'est là, également, que les deux directeurs du Juvénat Saint-Louis-Marie poursuivront leur carrière.

Compressions successives

Les compressions successives des subventions gouvernementales aux écoles privées fragilisent leur situation financière, surtout en région, selon la Fédération des établissements d'enseignement privé (FEEP). En tenant compte de l'augmentation du coût de la vie, les collèges privés subventionnés ont un manque à gagner de 524$ par élève comparativement à il y a cinq ans, selon la FEEP.

En plus du Juvénat St-Louis-Marie, la FEEP perd un autre membre cette année: le collège coopératif l'Horizon, à Ham-Nord, dans le Centre-du-Québec. Le collège avait seulement 40 inscriptions pour l'an prochain.

Il ne reste que 18 pensionnats et 1215 pensionnaires dans les écoles privées québécoises membres de la FEEP. Il y a 20 ans, la FEEP comptait 65 pensionnats et 6000 pensionnaires.