Pupitres presque jamais lavés. Poussière qui s'accumule dans les coins. Conduites de ventilation jamais nettoyées en 12 ans. Souris qui se baladent à la cafétéria. Dans certaines écoles du Québec, la propreté des locaux laisse grandement à désirer, révèlent des documents obtenus grâce à la Loi sur l'accès à l'information. Les principaux syndicats de l'enseignement le confirment: l'état général de propreté des écoles québécoises est carrément «médiocre».

En épluchant des rapports d'inspection réalisés dans différentes commissions scolaires québécoises de 2008 à 2011, on apprend entre autres que les pupitres ne sont presque jamais lavés à la polyvalente de L'Ancienne-Lorette à Québec. Que des souris et des criquets ont été trouvés dans une cafétéria de l'école Sainte-Martine à Valleyfield. À l'école Amédée-Boutin à Québec, les tableaux de classe sont rarement lavés et il y a des fourmis mortes dans les fenêtres.

À l'école Jules-Émond, les poubelles ne sont vidées que le midi et des restes de nourriture peuvent passer la fin de semaine dans la poubelle de la classe. À l'école secondaire Roger-Comptois, le bloc sportif était si sale en septembre 2009 qu'il commençait à y avoir des moisissures. À l'école Jeunes du monde, il y a des «mousses qui roulent partout», et le local des petits-déjeuners était «affreux à tous les points de vue» en mai 2010.

Moisissures

Dans d'autres commissions scolaires, c'est la qualité de l'air et la présence de moisissures qui inquiètent les enseignants. Au moins trois écoles de la Commission scolaire des Affluents se sont fait recommander de fermer temporairement certaines classes le temps de décontaminer leurs locaux envahis par les moisissures.

Et en novembre 2010, un rapport d'inspection de l'air a été effectué à l'école l'Arc-en-ciel à la suite de plaintes d'enseignants qui déploraient «l'empoussièrement général des aires de travail et que des particules semblaient tomber des grilles d'air frais». Certains manifestaient même des symptômes tels que des allergies, des bronchites ou des sinusites récurrentes. Le rapport d'inspection mentionne que le nettoyage des systèmes de ventilation remontait à environ 12 ans et que le taux de CO2 dans l'air était trop élevé dans certaines classes.

La pointe de l'iceberg

Ces quelques cas ne sont que la pointe de l'iceberg. Car plusieurs commissions scolaires ont refusé de transmettre leurs rapports de propreté et salubrité à La Presse. Mais pour les principaux syndicats de l'enseignement, l'état de propreté des écoles est carrément «médiocre».

«Il y a très peu d'écoles où les gens ne se plaignent pas de la salubrité», affirme le président de l'Alliance des professeurs de Montréal, Alain Marois. Dans plusieurs établissements, les concierges semblent débordés et ne parviennent qu'à nettoyer l'essentiel, selon M. Marois. Conséquence: certains enseignants se plaignent de maux de tête et de problèmes respiratoires.

«D'autres se tannent et lavent carrément eux-mêmes leur classe. Ça alourdit encore plus la tâche enseignante», souligne le président de la Fédération autonome de l'enseignement, Pierre St-Germain. Selon lui, la malpropreté des écoles est surtout visible depuis les importantes coupes en personnel de soutien survenues il y a 15 ans. «Il y a moins de concierges qu'avant, et ça paraît, note-t-il. Les enseignants payent le prix, mais les élèves aussi.»

«Les écoles sont sales. Et le plus frustrant pour les enseignants, c'est qu'ils doivent se plaindre à répétition avant que les choses ne changent», ajoute la présidente de la Fédération des syndicats de l'enseignement, Manon Bernard. Par exemple, il peut parfois s'écouler des semaines avant qu'une simple poignée de porte soit changée.

Plus de planchers à laver

Le vice-président de la Fédération du personnel de soutien scolaire (CSQ), Éric Pronovost, refuse de dire que les écoles du Québec «sont sales». «Mais dans les écoles, il y a beaucoup moins de concierges par mètre carré qu'avant. Les concierges ont doublé les superficies qu'ils doivent couvrir. Pendant ce temps, le nombre d'élèves augmente dans plusieurs écoles. Vraiment, la tâche s'alourdit», dit M. Pronovost, qui représente 1500 concierges de 22 commissions scolaires différentes.

M. Pronovost ajoute que certaines commissions scolaires confient l'entretien des écoles à des firmes privées. «Ces concierges ont des tâches précises à effectuer. Si on leur demande de faire autre chose, ils doivent demander la permission. Et c'est à ce moment qu'il peut s'écouler des semaines avant qu'une poignée de porte ne soit changée», dit-il.