Gérald Tremblay était-il vraiment à la réunion où Martin Dumont prétend avoir appris qu'Union Montréal tenait une double comptabilité ?

L'ex-organisateur a «oublié» de parler de la présence du maire lorsque les enquêteurs de la Commission l'ont interrogé pour la première fois. Il n'a ajouté ce «détail banal» que quelques jours avant sa comparution.



Martin Dumont avait choqué, en octobre, lorsqu'il avait relaté que, en 2004, Gérald Tremblay avait quitté précipitamment une réunion au moment où le trésorier d'Union Montréal, Marc Deschamps, avait commencé à expliquer que le parti tenait une double comptabilité. «Je n'ai pas à savoir ça !» aurait dit le maire en sortant de la pièce.

Or, lors de sa première rencontre préparatoire en vue de son témoignage devant la Commission, le 11 septembre, Martin Dumont a raconté aux enquêteurs comment il avait appris qu'Union Montréal trichait dans sa comptabilité, mais il n'a pas précisé que le maire était présent. C'est seulement le 17 octobre, lorsqu'il a étudié le plan de son témoignage avec les procureurs de la Commission, qu'il en a fait mention pour la première fois.

L'avocat d'Union Montréal, Me Michel Dorval, a mis en doute cette explication. Il ne s'agit pas d'un simple détail comme la couleur d'un tapis, a-t-il fait valoir. «Lorsque c'est un fait aussi dramatique - que vous dévoiliez devant le maire que vous dépassez les budgets et que l'agent officiel sorte un document parlant d'une double-comptabilité qui déjoue la loi -, c'est un détail que vous auriez oublié ? 

Même la juge Charbonneau a paru étonnée. «Dois-je comprendre que si vous ne l'avez pas dit la première fois, c'est que cet incident était banal ?» «Oui, c'était banal», a aussitôt répondu le témoin.

Martin Dumont a repris son témoignage ce matin après que la commission Charbonneau eut finalement accepté de ne pas tenir compte de la vidéo dans laquelle il admet avoir dit des faussetés lors de sa première comparution.

Il est contre-interrogé par l'avocat d'Union Montréal, Me Michel Dorval, qui s'est appliqué à démonter plusieurs éléments du témoignage qu'il a rendu l'automne dernier.

Me Dorval a notamment présenté une série de factures qui démontrent que le parti n'a jamais changé de coffre-fort, contrairement à ce qu'avait affirmé Dumont.

Il avait frappé l'imaginaire en affirmant qu'Union Montréal recevait tellement d'argent comptant que le coffre-fort du parti ne fermait plus, à l'automne 2004. Il disait avoir suggéré au responsable du financement, Bernard Trépanier, d'acheter un coffre plus grand, ce que Trépanier aurait fait.

Me Dorval a toutefois présenté diverses factures qui contredisent cette version. L'une d'elles indique que le fameux coffre-fort a été acheté en 2001. Une autre indique que le même coffre a été déménagé en 2006 lorsque Union Montréal a changé de locaux.

Une facture indique également qu'il a fallu faire réparer la serrure du coffre-fort en novembre 2004. Selon Me Dorval, cela donne à penser que, si le coffre-fort ne fermait pas, c'est en raison de la défectuosité de la serrure et non parce qu'il débordait.

Me Dorval a également mis en doute l'histoire des menaces qu'aurait proférées l'entrepreneur Nicolo Milioto contre Dumont. «Tu sais, Martin, que mes fondations de trottoir sont très épaisses et profondes. Il ne faudrait pas que tu te retrouves dans mes fondations de trottoir», lui aurait dit l'entrepreneur.

Mais voilà, le rapport de la première rencontre préalable de Dumont avec les enquêteurs diverge avec certains détails du témoignage. Les enquêteurs avaient noté le 11 septembre que Dumont avait demandé à une réceptionniste de faire sortir Milioto parce qu'il l'avait menacé. Or, à la deuxième rencontre avec les enquêteurs, en décembre, Dumont a fait biffer toute référence à la présence d'une réceptionniste. 

Martin Dumont a justifié aujourd'hui ce changement en affirmant que les enquêteurs avaient mélangé deux histoires. Me Dorval en déduit plutôt que l'ex-organisateur essaie d'éviter que l'on vérifie les faits auprès de la réceptionniste.