(Montréal) Un officier de la Sûreté du Québec (SQ) a déclaré lundi, lors de l’enquête de la coroner Géhane Kamel, qu’il n’y avait pas suffisamment de collaboration entre la police et le système de santé mentale en matière de sécurité publique.

Charles Côté a déclaré que souvent, lorsqu’il tente d’obtenir des informations de base sur un patient à des fins de sécurité publique, il essuie un refus de la part des travailleurs de la santé, qui invoquent la confidentialité.

M. Côté a témoigné à l’enquête sur le meurtre de la sergente Maureen Breau, 42  ans, qui a été poignardée à mort avec un couteau de cuisine le 27 mars 2023 par Isaac Brouillard Lessard, un homme ayant des antécédents de problèmes de santé mentale. Brouillard Lessard, 35 ans, a été abattu par la police quelques instants après l’attaque survenue à Louiseville, en Mauricie.

« À ce stade-ci, nous nous battons pour freiner un système qui ne fonctionne pas très bien, c’est la réalité au Québec », a déclaré l’agent Côté. Il a retenu ses larmes et a dit : « Je suis là pour Maureen. »

M. Côté a répondu à un appel 911 à l’appartement de Brouillard Lessard le 30 décembre 2022, quelques jours après son déménagement à Louiseville. Il avait appelé la police après qu’une recherche d’un chat perdu s’était transformée en altercation entre lui et un voisin.

L’incident s’est terminé sans accusation, mais Charles Côté dit avoir déposé un rapport interne après avoir appris que Brouillard Lessard était suivi par la Commission d’examen des troubles mentaux du Québec.

L’officier Côté a déclaré avoir appris d’un travailleur de la santé que Brouillard Lessard avait des antécédents de violence contre des employés du système de santé. Mais il a ajouté que d’autres travailleurs affectés au dossier de Brouillard Lessard avaient refusé de parler de lui.

Dans son rapport interne, M. Côté a exhorté les autres agents à « agir avec prudence » auprès de Brouillard Lessard. L’avis de police a été diffusé par courriel et était toujours affiché sur un tableau d’affichage, dans la salle de breffage des policiers, lorsque Mme Breau a été tuée quelques mois plus tard.

L’agent Côté était l’un des nombreux policiers qui avaient interagi avec Brouillard Lessard et qui témoigneront dans les prochains jours.

Le 30 janvier, son partenaire, Gabriel Ménard, a affirmé lors de l’enquête que les policiers se heurtent souvent à un « mur » lorsqu’ils tentent d’obtenir des informations sur des cas de santé mentale.

M. Ménard avait croisé Brouillard Lessard le 30 décembre 2022 – avant l’arrivée de M. Côté à l’appartement – lorsque l’homme l’a approché pour lui demander de l’aide pour retrouver son chat.

Lundi également, l’enquête a entendu Élodie Lévesque, une patrouilleuse qui s’était rendue chez Brouillard Lessard trois jours avant l’agression, après que les parents de l’homme eurent appelé la police dans l’espoir de le faire hospitaliser de force en raison de la détérioration de sa santé mentale. Il avait envoyé des textos de menaces et passé des appels téléphoniques à sa mère et à d’autres membres de sa famille.

Mme Lévesque a déclaré que même si la police avait remarqué une épée de style katana et un autre couteau dans son appartement lors de sa visite le 24 mars 2023, elle n’avait pas estimé avoir de raison d’arrêter Brouillard Lessard, malgré les inquiétudes de ses parents.

Plusieurs policiers doivent témoigner cette semaine, notamment les trois collègues de la sergente Breau, qui étaient avec elle la nuit où elle a été tuée ; l’un des trois policiers a été grièvement blessé.

La police a reçu quatre appels impliquant Brouillard Lessard entre décembre 2022 et le 27 mars 2023, lorsqu’elle est allée l’arrêter pour profération de menaces et violation de sa probation.

L’enquête a déjà appris que Brouillard Lessard avait été déclaré non criminellement responsable à cinq reprises pour des infractions en 2014 et 2018. Il avait également passé un an dans un hôpital psychiatrique de Montréal et avait été suivi par la Commission d’examen des troubles mentaux du Québec depuis 2014.

Le mois dernier, les inspecteurs de la santé et de la sécurité du travail du Québec ont déclaré à l’enquête que les agents n’avaient pas bien planifié leur intervention avant de tenter d’arrêter Brouillard Lessard.