Le gouvernement Legault présente jusqu’ici un « bilan catastrophique » en mobilité durable, ont jugé lundi plusieurs organismes, en s’inquiétant que la nouvelle agence des transports que prépare Québec ne soit qu’un feu de paille.

Tramway de Québec, tramway de Gatineau, Projet structurant de l’Est (PSE), réseau structurant de Longueuil, prolongement du métro ou du Réseau express métropolitain (REM) vers Laval : « aucun de ces projets n’est réellement encore sur les rails », a déploré lundi le directeur général de Vivre en Ville, Christian Savard, en marge du 19déjeuner-bénéfice de Trajectoire Québec.

« Ils ont soit été complètement abandonnés, mis sur pause ou sont à une deuxième et troisième étude », a-t-il persisté. Selon lui, le Québec fait face « à un champ de ruines » en transport collectif. « On doit reprendre le momentum. On ne peut pas juste répondre qu’on va faire une agence », a martelé M. Savard, en référence à l’agence des transports que veut créer le gouvernement d’ici cet automne pour réduire les coûts et les délais.

La ministre des Transports, Geneviève Guilbault, brillait par son absence à ce congrès. Elle vient de lancer ce lundi des audits de performance financière sur les dix sociétés de transport, alors que s’amorceront bientôt de nouvelles négociations en vue de la mise sur pied d’un cadre de financement « récurrent et prévisible » sur cinq ans.

« On a choisi de nous donner des rapports d’audit de performance et une nouvelle agence au lieu de nouveaux autobus », a ironisé le directeur des relations gouvernementales d’Équiterre, Marc-André Viau.

Dans une allocution, la directrice de Trajectoire Québec, Sarah V. Doyon, a dénoncé que peu d’engagements gouvernementaux ont été respectés dans les dernières années en matière de financement. « Les projets d’infrastructure reculent au lieu d’avancer. On manque de financement pour préserver les niveaux de service existants. Il faut des réseaux de transport en commun qu’on développe en continu, plutôt qu’un petit bout tous les 40 ans », a-t-elle lancé.

« Les seuls aboutissements du gouvernement, ce sont ceux qui ont été entamés par ses prédécesseurs. On se contente de couper des rubans », a fait valoir la coordonnatrice d’Accès transport viables, Angèle Pineau-Lemieux, en rappelant que le REM est un projet ayant été ficelé sous les libéraux de Philippe Couillard.

Du plomb dans l’aile

Tout cela survient alors que plusieurs projets ont en effet du plomb dans l’aile depuis quelques années. À Québec, le tramway est retourné à la planche à dessin. Il est maintenant à l’étude par CDPQ Infra, la filiale de la Caisse de dépôt qui a livré le REM.

CDPQ Infra a toutefois abandonné le mois dernier son mandat d’étude sur le prolongement du REM vers la Rive-Sud de Montréal. Le PSE, lui, en est encore au stade de l’étude. Un tramway à 13 milliards a toutefois été avancé pour remplacer la version souterraine à 36 milliards, mais il ne sera pas livré avant 2035.

Selon Christian Savard, l’usage récurrent du gouvernement à la Caisse de dépôt est « une forme de déresponsabilisation ». « L’arrivée de la Caisse aurait dû faire en sorte qu’on fasse deux ou trois fois plus de projets », a-t-il noté.

Bref, « l’approche du gouvernement est déséquilibrée », a affirmé le responsable de la mobilité au Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-MTL), Blaise Rémillard, qui déplore « qu’aucun projet n’avance » hormis le prolongement de la ligne bleue vers Anjou. « Pour avoir une approche équilibrée, il faudrait au moins que les investissements entre le transport collectif et le réseau routier soient égaux. Ça fait des années que le Québec le promet », a-t-il conclu.

Au cabinet de Mme Guilbault, on s’est défendu lundi de travailler « à développer les réseaux de façon ordonnée, réfléchie et responsable ». « Pour ce faire, nous devrons augmenter le rythme, réaliser plusieurs projets en même temps. […] C’est exactement pourquoi la ministre travaille sur un moyen d’assurer la conception, la réalisation et l’opération de grands projets plus rapidement et à moindre coût », a soutenu le directeur des communications, Maxime Roy.