La mort du signaleur routier Marc Séguin, heurté par un automobiliste sur un chantier en octobre 2022 à Carignan en Montérégie, s’explique notamment par une gestion de la signalisation « déficiente », a tranché mercredi un rapport d’enquête.

Dans un document rendu public, la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) conclut en effet que « la gestion de la signalisation sur le chantier était déficiente puisque la méthode de contrôle de la circulation utilisée ne respectait pas les plans et devis spécifiques au chantier exposant ainsi le signaleur routier à un danger de happement ».

C’est le 19 octobre 2022 que le drame s’était produit, sur le chemin Sainte-Thérèse, dans une zone de travaux routiers où la circulation se faisait par alternance grâce à des feux intermittents.

Le chauffeur d’un véhicule qui « ne semblait pas vouloir s’arrêter » était alors arrivé à l’entrée de la zone de travaux avant d’heurtrer le signaleur, qui se trouvait alors « au centre de la voie de circulation », rappelle la Commission dans son rapport. Marc Séguin, âgé de 58 ans, a alors été transporté à l’hôpital dans un état critique. Son décès y a malheureusement été constaté peu après.

Sur les réseaux sociaux, plusieurs signaleurs avaient manifesté leur indignation. « Il est déplorable qu’en 2022, nous allons encore au travail protéger des travailleurs, en ne sachant pas si nous-mêmes allons revenir », avait par exemple dénoncé sur Facebook la signaleuse Nathalie Diamond.

« Absence d’un moyen de communication »

Selon la CNESST, c’est « l’absence d’un moyen de communication verbale entre le signaleur routier et les travailleurs du chantier » qui ont obligé M. Séguin « à se positionner au centre de la voie fermée à la circulation, afin de voir les situations d’empiétement ».

Il s’agissait d’ailleurs du deuxième accident mortel à survenir en moins d’une semaine au même endroit. Quelques jours auparavant, deux adolescents sur un scooter avaient été heurtés par une conductrice, aussi sur le chemin Saint-Thérèse, à l’endroit où se trouvait le chantier. L’un d’eux est décédé.

Un homme de 30 ans, Alexy Gutierrez-Marcil, a été formellement accusé de conduite dangereuse ayant causé la mort de Marc Séguin, peut-on lire dans des documents judiciaires. L’homme doit revenir devant le tribunal le 18 avril pour la suite des procédures.

À l’Association des travailleurs en signalisation routière du Québec (ATSRQ), le président Jean-François Dionne, dont le groupe avait tenu des manifestations dans la foulée du décès de Marc Séguin, déplore que le chantier ne fût pas sécuritaire. « Nous sommes frustrés que le surveillant mandaté n’a pas arrêté les travaux, en plus d’avoir oublié une meilleure signalisation routière sur place », explique M. Dionne à La Presse mercredi. « Ce n’est pas la première fois qu’on voit ça. »

L’ATSRQ affirme qu’environ 210 signaleurs ont été blessés sur les routes du Québec en 2022. Il s’agit d’une hausse par rapport à 2021, année où 161 signaleurs routiers ont été impliqués dans un accident au Québec. Quelque 104 travailleurs avaient été blessés en 2020, 80 en 2019, environ 75 en 2018 et une soixantaine en 2017. En 2016, 47 accidents étaient survenus.

L’ATSRQ dit également avoir « remarqué que la remorque-barrière n’a pas été utilisée ». « Ça aurait mis le signaleur à extérieur de la zone de fange », note M. Dionne.

Quelles solutions ?

Pour éviter qu’un tel accident ne se reproduise, la CNESST recommande aux entrepreneurs en construction « d’appliquer une gestion de la signalisation qui privilégie l’utilisation de moyens techniques pour le contrôle de la circulation en alternance, particulièrement sur les routes où la vitesse est élevée (barrière du signaleur routier, feux de circulation pour travaux, et ecetera) ».

Les autorités suggèrent également de s’assurer qu’une « signalisation minimale conforme aux normes » du ministère des Transports et de la Mobilité durable (MTMD) soit en place. En tout temps, le signaleur routier doit se trouver « dans une position sécuritaire, si sa présence est nécessaire, en fonction des dessins normalisés ou des plans de signalisation », insiste la Commission.

Elle rappelle que « l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour protéger la santé et assurer la sécurité et l’intégrité physique et psychique de ses travailleurs », ayant aussi « l’obligation de s’assurer que l’organisation du travail ainsi que les équipements, les méthodes et les techniques pour l’accomplir sont sécuritaires ».