Ayant accès à des appareils électroniques, dont des téléphones cellulaires, pouvant émettre des sons de plus en plus puissants, les jeunes risquent d’endommager à long terme leur ouïe. Et avec la pandémie, la multiplication des vidéoconférences et cours à distance n’a fait qu’augmenter les risques, prévient la Dre Tamara Mijovic, otologiste au Centre universitaire de santé McGill.

« On est des heures sur nos appareils avec des écouteurs sur les oreilles. Pour l’école, les jeux vidéo, pour écouter de la musique, des films… On est loin de ce qu’on voyait il y a quelques années, alors qu’on avait essentiellement les écouteurs sur les oreilles pour écouter de la musique sur un Walkman », explique la Dre Mijovic, aussi administratrice à l’Association d’oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale du Québec.

En cette Journée de l’audition, la Dre Mijovic a acheminé une lettre à La Presse dans laquelle elle plaide pour une meilleure prévention en santé auditive. « C’est un appel à la prévention. Pour éviter les effets à long terme de trop grandes expositions », dit-elle.

Les plus récentes données de Santé Canada, datant de 2019, montrent que la moitié des jeunes de 19 à 29 ans rapportent avoir eu des symptômes, comme des acouphènes, dans leur vie. Pour la très grande majorité d’entre eux, l’acouphène n’est que passager. Mais la Dre Mijovic explique qu’il faut craindre les effets à long terme des expositions à des sons trop forts.

D’autant plus qu’avec la pandémie, les jeunes ont basculé vers l’enseignement à distance, augmentant du même coup le nombre d’heures passées avec des écouteurs sur les oreilles. « Les oreilles des jeunes sont souvent sollicitées huit heures ou plus par jour », dit-elle.

De plus en plus puissants

Les appareils, notamment les téléphones intelligents, émettent aussi des sons de plus en plus puissants. Alors que les anciens baladeurs émettaient des sons de 100 décibels (dB) maximum, certains téléphones intelligents peuvent aujourd’hui atteindre les 120 dB.

« Nous vivons dans une société de plus en plus bruyante et nos oreilles sont sans cesse sollicitées […], ajoute la Dre Mijovic. Le danger, c’est d’essayer de noyer le bruit ambiant en montant le volume de nos écouteurs. »

Des données existent sur les seuils sécuritaires d’exposition aux sons. De nombreuses études ont été menées depuis des décennies, notamment sur des travailleurs d’usine, explique la Dre Mijovic. Il a par exemple été démontré qu’une exposition continue de 85 dB ou plus pendant huit heures régulièrement peut causer un vieillissement prématuré des oreilles et mener à une perte d’audition ou à des acouphènes, explique la spécialiste. Cette perte de santé auditive peut prendre des années à se manifester. Mais pour d’autres, des pertes d’audition peuvent apparaître dès la fin de la vingtaine. « On le voit par exemple avec des travailleurs de bar », note la Dre Mijovic. Et dans la grande majorité des cas, les pertes sont irréversibles.

La spécialiste lance donc un appel à la prudence. Elle souligne que sur les téléphones cellulaires, notamment, une fonction existe pour limiter le son de l’appareil sous le seuil des 85 dB. Elle incite les gens à y recourir.

Les cinq conseils de la Dre Mijovic pour préserver ses oreilles

  1. Garder le volume de ses appareils électroniques à moins de la moitié de leur capacité maximale pour ne pas dépasser 85 décibels et ne pas noyer le bruit ambiant.
  2. Utiliser les paramètres des téléphones intelligents pouvant vous avertir si votre son dépasse les normes pour la santé auditive ou vous permettre d’imposer une limite de son prédéterminée à votre téléphone.
  3. Utiliser les applications sur téléphone intelligent qui permettent de mesurer la quantité de décibels ambiants. Éviter d’être à plus de 85 décibels pour des périodes continues.
  4. Si le nombre de décibels ambiants dépasse 85, utiliser des bouchons pour protéger les oreilles.
  5. Considérez les écouteurs avec annulation du son ambiant si le bruit ambiant vous dérange.
En savoir plus
  • 1,1 milliard
    Nombre d’adolescents et de jeunes adultes à travers le monde qui risquent de développer des pertes auditives à cause d’une « exposition prolongée et excessive à des sons forts ».
    source : Organisation mondiale de la santé