Si vous me lisez régulièrement, vous savez que j’accorde une grande importance aux rituels. La remise des diplômes et le bal de fin d’études font partie de cela. C’est une étape cruciale qui mérite d’être soulignée.

Je comprends parfaitement les adolescents et les parents qui sont déçus des mesures sanitaires que l’on impose aux établissements. Déjà que ces rituels ont eu la vie dure l’an dernier, voilà qu’une autre cohorte va dire adieu au monde de l’adolescence sans décorum, sans fête.

Avant d’aller plus loin, il faut démêler certaines choses. Il y a d’abord la remise des diplômes. Le gouvernement a décrété qu’elle devait avoir lieu à l’intérieur ou à l’extérieur de l’établissement et… durant les heures de classe. À cela s’ajoute le respect des « classes-bulles ».

Plus plate que ça, tu récupères ton diplôme à la bibliothèque dans une enveloppe brune.

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La Santé publique a annoncé lundi que les bals de finissants seront encore une fois interdits cette année en raison de la pandémie.

Mais le pire, c’est que la présence des parents est interdite. Imaginez un peu… Tu as vu ton enfant grandir, tu l’as soigné, consolé et écouté au moment opportun, tu l’as élevé et guidé au meilleur de tes connaissances… Il franchit une étape qui le plonge dans le monde adulte et tu dois regarder ça sur Zoom.

Je n’ai pas d’enfant, mais j’étais là quand mes deux neveux ont lancé leur mortier en poussant un grand cri de ralliement. Je me souviens très bien des frissons que j’ai eus à ce moment-là.

Je me mets à la place des parents et je peux très bien concevoir leur peine. Toute la journée, mardi, j’ai entendu et lu des messages de mères et de pères en colère. Ils ont raison de l’exprimer.

J’ai peu critiqué le gouvernement dans le choix de ses mesures sanitaires. J’ai été plutôt du genre à recadrer ceux qui trouvaient ces règles trop sévères ou exigeantes. Mais là, j’avoue qu’on aurait dû faire un plus grand effort.

Il y a une incohérence dans cette décision. Comment se fait-il que les théâtres et les salles de spectacle arrivent à accueillir un certain nombre de spectateurs en respectant les règles de distanciation et qu’on ne permette pas aux établissements de faire la même chose en utilisant des auditoriums ou des amphithéâtres ?

Et puis, pourquoi tenir cette cérémonie ennuyeuse durant les heures de classe ? Ne pourrait-on pas faire cela un samedi ou un dimanche après-midi ? Déjà, ça casserait le moule.

L’an dernier, certaines écoles ont fait preuve d’une étonnante créativité pour créer un semblant de cérémonie lors de la remise des diplômes. Souvenez-vous des parcours que les finissants faisaient avec leur bulle familiale ou quelques camarades. Il y avait une haie d’honneur, la remise du diplôme, la remise de l’album, une prise de photo, la signature d’un panneau géant, etc. Il y avait aussi eu ces remises de diplômes sous forme de « service à l’auto ».

Cette année, je ne sais pas où les directions d’établissement vont trouver la force et l’énergie pour jazzer cet instant. À la Fédération québécoise des directions d’établissements d’enseignement, on me dit que déjà le personnel des écoles réfléchit très fort à trouver des idées pour faire de cette journée quelque chose d’important et de symbolique.

Bravo !

L’autre étape de ce rituel est le fameux bal de fin d’études. Normalement, un cocktail et un repas sont organisés à l’école ou dans une salle à manger. Les parents y sont invités. Mais vers la fin de la soirée, on se débarrasse gentiment des procréateurs, on retire sa belle robe ou son complet et on va faire la fête chez celui ou celle qui a une piscine et une grande cour.

Il serait, dans les circonstances, très difficile d’accepter la tenue de ces rassemblements jugés à « très haut risque » par la Santé publique. Cela dit, il y a des fêtes improvisées dans des parcs qui ressemblent en ce moment à ça.

En interdisant l’organisation de bals, le gouvernement retire une épine du pied aux établissements et remet la gestion du problème entre les mains des parents. Ce sont ces derniers qui devront tenter de contrôler leur adolescent et le convaincre d’être patient encore quelques mois.

Mais bon, un bal de fin d’études qui marque la fin de ton secondaire alors que tu viens de commencer le cégep, ce n’est plus du tout pareil.

François Legault a fait preuve d’une grande écoute jusqu’ici. Il a été ferme la plupart du temps, mais il a su faire preuve de souplesse à l’occasion. Il n’est pas trop tard pour revenir en arrière et permettre des mesures moins contraignantes pour cette grande étape.

Cette pandémie a été particulièrement difficile pour deux groupes de la société : les jeunes et les aînés. Et cela, pour des raisons à la fois très différentes et, somme toute, fort semblables.

Le besoin de l’autre.

Et le plaisir d’avoir un bal.

Celui qu’on rêve de vivre une première fois. Et celui qu’on aimerait tellement revivre.