(Saint-Hyacinthe) Peu abordé lors des précédentes élections municipales, l’environnement est cette année un enjeu « incontournable » un peu partout au Québec. Le sujet pourrait même être la clef permettant d’accéder à la mairie, dans certaines municipalités.

Marijo Demers s’est lancée dans la course à la mairie de Saint-Hyacinthe en bonne partie en raison de ses préoccupations environnementales.

« Je veux faire quelque chose pour que mon milieu de vie soit adapté et résilient à ce qui s’en vient », explique à La Presse la femme de 41 ans.

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Marijo Demers, candidate à la mairie de Saint-Hyacinthe

« On est témoins jour après jour des changements climatiques, ils sont réels dans nos vies », constate la professeure de sciences politiques au cégep de Saint-Hyacinthe, aussi mère de deux enfants.

Elle a fondé le parti Saint-Hyacinthe unie, une formation « transpartisane » qui fait de l’environnement un enjeu « transversal », qui croise tous les autres.

« [L’environnement], c’est son sujet principal », dit André Beauregard, le seul autre candidat à la mairie de Saint-Hyacinthe, à propos de son adversaire.

L’homme de 53 ans, conseiller municipal depuis 12 ans, constate que l’environnement occupe une place croissante dans les campagnes électorales municipales.

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André Beauregard, candidat à la mairie de Saint-Hyacinthe

« On ne peut plus passer à côté », dit-il, indiquant toutefois ne pas savoir si le sujet sera déterminant lors du vote.

Les deux candidats s’entendent sur le fait que les enjeux environnementaux sont nombreux à Saint-Hyacinthe : manque d’espaces verts et îlots de chaleur, avec un taux de canopée sous les 8 %, surverses d’eaux usées dans la rivière Yamaska – 1317 déversements en 2020, ce qui en fait l’une des 35 pires municipalités du Québec selon le plus récent palmarès de la Fondation Rivières –, manque de connectivité du réseau cyclable.

Consultez la carte des déversements de la Fondation Rivières

« Vague écologiste » ?

La bataille qui se joue à Saint-Hyacinthe est loin d’être unique au Québec ; un nombre significatif de personnes se sont lancées en politique municipale pour des motivations écologistes cette année.

Le mouvement « La Vague écologiste au municipal », né dans le cadre de la présente campagne pour encourager les candidats ayant l’environnement à cœur et les autres de mettre l’écologie de l’avant dans les débats, a rallié 188 candidatures de gens adhérant ouvertement à ses idées et plus de 400 bénévoles pour les soutenir.

« Ça a même influencé des personnes qui n’en auraient pas parlé sinon, qui se forcent pour prendre des engagements [en matière d’environnement] », affirme l’une des coordonnatrices du mouvement, Marie-Ève Bélanger-Southey.

La place qu’occupe l’environnement dans les présentes élections municipales est « sans commune mesure » avec les élections passées, estime-t-elle.

Son constat est partagé par la professeure de géographie sociale à l’Université du Québec à Montréal (UQAM) Anne Latendresse, qui lie cet engouement à la place accrue des questions environnementales dans la société.

Une bonne partie de la population réalise que les municipalités ont un rôle à jouer sur les solutions qui permettent de contrer ou d’atténuer les changements climatiques.

Anne Latendresse, professeure de géographie sociale à l’UQAM

Elle cite les problèmes d’érosion des berges, contre lesquels se sont mobilisées des municipalités du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie.

De l’aménagement du territoire, qui influence la protection des milieux naturels et l’étalement urbain, aux questions de logement et de transport en passant par la gestion des matières résiduelles, Marie-Ève Bélanger-Southey souligne que le gouvernement municipal a une grande influence sur une multitude d’enjeux ayant des répercussions environnementales.

« Ça peut avoir l’air niaiseux, les subventions pour les couches lavables, mais ça peut réduire énormément ton tonnage de déchets », illustre-t-elle.

Débats sur l’environnement

Signe que l’environnement est un enjeu qui gagne en importance dans les élections municipales, de nombreux débats portant spécifiquement sur ce sujet ont été organisés cette année, partout au Québec.

« Ça donne l’occasion aux citoyens et citoyennes de rencontrer leurs candidats pour savoir quelles sont leurs idées pour lutter contre la crise climatique et pour la protection de l’environnement », explique Marie-Ève Leclerc, coordonnatrice de l’initiative Vire au vert, qui a recensé 37 débats et qui a rédigé 68 propositions pour l’environnement destinées à ceux et celles qui briguent les suffrages.

Ces rendez-vous ont attiré des centaines de personnes et généré des milliers de visionnements en ligne, de Saint-Hyacinthe à Québec en passant par Montréal, où Valérie Plante et Denis Coderre brillaient toutefois par leur absence.

« Le palier municipal, c’est celui qui a la capacité de mettre en place des mesures plus rapidement, c’est un pouvoir qui est plus concret pour les citoyens », explique Marie-Ève Leclerc, qui qualifie l’environnement de question « incontournable » dans les élections de cette année.

Il y a des partis qui ont fait de la question environnementale leur raison d’être ; ça, on n’avait jamais vu ça avant.

Marie-Ève Leclerc, Vire au vert

Marijo Demers, qui revendique fièrement cette « étiquette » écologiste, croit que cet engagement vert permettra à beaucoup de candidats et de candidates de se faire élire.

« Je pense qu’en novembre, on va en voir beaucoup », dit celle qui aspire à devenir la première femme élue à la mairie de Saint-Hyacinthe.

Le temps presse pour agir, rappelle Marie-Ève Bélanger-Southey, soulignant que la communauté scientifique prévoit que l’augmentation de la température de la Terre atteindra 1,5 °C d’ici 2025.

« C’est avant la fin du mandat des politiciens qui vont être élus [en novembre], dit-elle. Il nous reste un mandat politique pour changer les choses radicalement et, nous, on croit beaucoup au niveau municipal pour le faire. »