Contrairement à ce qu'il prétend, Hamza Chaoui a bel et bien été mis à la porte d'un centre communautaire pour ses propos «à la limite de la radicalisation», soutient un représentant de la communauté musulmane d'Anjou.

Il a raconté à La Presse, hier, les événements survenus il y a environ six mois dans un centre d'Anjou fréquenté par la communauté musulmane. L'imam Chaoui s'y rendait «souvent pour faire des prêches et provoquer un débat». «Au début, c'était correct, c'était acceptable. Mais au fur et à mesure, il y avait des petits dérapages. On en a discuté avec lui pour tirer la sonnette d'alarme. Mais à un certain moment, on a vu que ça se répétait et on a décidé d'arrêter les choses. On l'a remercié pour ne pas contaminer les jeunes», a affirmé cette source, qui préfère garder l'anonymat. Elle ne veut pas être emportée dans un tourbillon médiatique.

Selon ce membre de la communauté musulmane, les propos d'Hamza Chaoui n'étaient pas violents. «Mais c'était des concepts qui étaient à la limite de la radicalisation», qui concernaient les femmes et le système d'éducation. Il n'a pas voulu donner plus de précisions. «On a essayé de mettre un holà à tout ça», a-t-il dit, précisant que l'expulsion d'Hamza Chaoui s'est faite sans esclandre. À sa connaissance, l'imam n'a jamais remis les pieds dans ce centre depuis. Et leurs chemins ne se sont pas croisés par la suite.

Il soutient avoir alerté la députée d'Anjou-Louis-Riel, la ministre de la Sécurité publique Lise Thériault, peu de temps après les événements. Il lui a parlé de nouveau d'Hamza Chaoui la semaine dernière, alors que La Presse a révélé son projet d'ouvrir un «centre communautaire islamique» destiné aux jeunes dans l'est de Montréal.

Lise Thériault avait raconté l'histoire de l'expulsion d'Hamza Chaoui dans une entrevue à La Presse samedi, mais le principal intéressé avait nié les événements le lendemain. Notre source confirme que la ministre dit vrai.

«Tout dérapage, ça ne nous intéresse pas, parce que ça se retourne contre notre communauté. Notre objectif est de protéger nos enfants et la communauté», a insisté le représentant musulman.

«Pas assez sage»

Hamza Chaoui ne paraissait toutefois pas «aussi méchant que ce qu'on a médiatisé», selon lui. «Il n'était pas assez sage» et «il manquait de recul par rapport au développement des concepts».

Selon lui, «il y a des gens qui sont connus par les services [l'État] et qui sont pires que lui». A-t-il déjà croisé ce genre d'individus? «Nous, on s'est mis d'accord qu'à chaque fois qu'il y a un dérapage, on avertit notre maire [Luis Miranda] ou on avertit notre députée», a-t-il dit.

Questionné pour savoir si Hamza Chaoui s'autoproclame imam, il a répondu qu'un débat agite justement la communauté au sujet des qualifications requises pour porter ce titre. «On a exigé que les imams aient assez de bagage de théologie pour arriver à expliquer des concepts musulmans qui sont très tolérants», a-t-il indiqué, sans donner plus de détails sur le cas de M. Chaoui.

Comme La Presse l'a révélé, Hamza Chaoui faisait valoir il y a quelques semaines l'incompatibilité «complète» entre l'islam et la démocratie, notamment parce que ce système peut mener à l'élection de représentants homosexuels ou athées. Il disait également que les femmes doivent avoir un tuteur.

Samedi, la Ville de Montréal a annoncé qu'elle oppose une fin de non-recevoir au projet d'Hamza Chaoui, craignant pour la sécurité de la population. Elle modifiera sa réglementation pour bloquer la création d'un tel centre.

Notre source appuie la décision de la Ville. «On est pour l'encadrement. Il faut vérifier ce qu'il voulait faire exactement. S'il veut ouvrir un centre communautaire pour créer des problèmes à la communauté, ça ne nous intéresse pas.»

Ce musulman très engagé dans sa communauté se dit inquiet qu'il y ait «amalgame» et que l'islamophobie gagne du terrain. «Les mass-médias n'invitent jamais la communauté pour débattre sur des sujets, par exemple, la dernière fois au niveau de la Charte. On a laissé tout le monde tirer sur nous, et on a été les dindons de la farce!», a-t-il lancé. Il juge que les «extrémistes» ou «les gens qui sont contre les musulmans» monopolisent l'attention médiatique. On ne donne pas la parole aux «musulmans modérés qui participent dans l'économie, dans la construction du pays, malheureusement».