Une croisière aller-retour de Montréal à bord du navire d'une grande société? Oui, c'est possible. Pas d'avion à prendre, pas de file d'attente dans les aéroports. Un vrai bonheur pour des Montréalais! Récit.

À la fin du mois de septembre, nous sommes montés à bord du Crystal Symphony dans le port de Montréal. L'itinéraire «Treasures of Canada» prévoyait des escales à Sept-Îles, aux Îles-de-la-Madeleine, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Québec, avant de retourner à Montréal une semaine plus tard. Une croisière magnifiée par les couleurs de l'automne et réchauffée par l'accueil dans les villes visitées.

Jour 1 Départ

Le Crystal Symphony quitte le port de Montréal à 18h pendant que Louis Armstrong chante What a Wonderful World. Cette chanson est diffusée sur les ponts chaque fois qu'un navire Crystal Cruises lève l'ancre.

Après le Vieux-Port si joliment aménagé et l'impressionnante brasserie Molson, les passagers s'extasient devant le Stade olympique et les pyramides qui se découpent dans le ciel. Jusqu'au bout de l'île, sauf quelques petites sections, le coup d'oeil sur la rive est réjouissant. Même le secteur des raffineries a fière allure quand on le voit du fleuve!



Le premier repas à la salle à manger est l'occasion de faire connaissance avec les autres passagers, dont certains ont déjà fait plusieurs croisières en Europe et dans les Caraïbes à bord de ce même navire. «Le Symphony est un peu comme ma maison de campagne, dit une femme de Philadelphie qui en est à sa 19e croisière. J'y retrouve des visages familiers chez les passagers et parmi le personnel. C'est un peu comme une famille.»

Étonnamment, il y a moins d'une cinquantaine de Québécois à bord. Les quelque 200 autres Canadiens résident surtout en Ontario et en Colombie-Britannique. Les croisières sur le Saint-Laurent attirent majoritairement les Américains, et ils sont environ 600, provenant de tous les États. Quelques Européens, Mexicains et Australiens complètent le nombre des 850 passagers, retraités pour la plupart.

Le Symphony est un navire luxueux, d'une élégance classique. Il vient de bénéficier d'une cure jeunesse au cours de laquelle tous les espaces ont été complètement réaménagés. Les cabines sont un peu plus petites que celles des récents navires, mais elles sont confortables et ont une touche design. De taille moyenne, le navire est toutefois pourvu de nombreux espaces communs ainsi que d'une diversité de restaurants et de bars comparable à celle des mastodontes des mers.

Jour 2 En mer (Saguenay)

Cette journée est consacrée à la contemplation. Le paysage brumeux du Saint-Laurent fait place à un soleil éclatant quand on s'engage sur la rivière Saguenay, à proximité de Tadoussac. On admire les falaises abruptes du fjord, des panoramas à la beauté sauvage, rehaussés par les teintes rouges, orange et jaunes des feuilles. Le navire fait à peine quelques rides sur les eaux sombres de la rivière Saguenay, véritable bras de mer intérieure.

Nous apercevons de loin la statue Notre-Dame-du-Saguenay, installée depuis 1881 sur une des corniches du cap Trinité, à plus de 300 m (1000 pi) au-dessus de l'eau. Cette oeuvre en bois de Louis Jobin mesure 8,5 m. Vers 13h, le navire s'arrête devant la statue et comme le veut la tradition, le capitaine fait jouer l'Ave Maria. C'est un moment émouvant.

Le trajet en sens inverse sur la rivière Saguenay nous ramène ensuite au fleuve Saint-Laurent, en direction de Sept-Îles. Quelques bélugas s'amusent à faire des coucous et tout le monde est sous le charme.

Crystal Cruises est reconnu pour son programme d'apprentissage en mer ainsi que pour la renommée de ses conférenciers. Des cours de toutes sortes sont offerts: langue, danse, marche nordique, art, artisanat, golf, informatique, bridge, dégustation de vins, montage photo et vidéo sur iPad, yoga, taï chi. Il y a aussi des cours de jeu au casino, divers ateliers, des séminaires et des conférences donnés par des invités de marque.

Pour la soirée du capitaine, les passagers sortent leurs grandes tenues. Et le menu de la salle à manger propose un véritable festin: caviar, huîtres, homard, etc. Le sommelier recommande d'excellents vins, en accord avec les mets. Pas besoin de s'inquiéter des prix puisque c'est une croisière tout inclus. Boissons, vins, champagnes et alcools sont gratuits partout sur le navire. Même les pourboires sont compris dans le prix de la croisière et aucuns frais supplémentaires ne sont exigés dans les restaurants de spécialité.

Photo fournie par Crystal

Une des suites du Crystal Symphony.

Jour 3 Sept-Îles

Avec ses eaux claires et ses forêts boréales, Sept-Îles se présente comme un joyau des héritages francophone et amérindien. La ville de 28 000 habitants est dotée d'un port de croisière moderne, à proximité du centre-ville. Cinq ou six grands navires y accostent chaque année et la ville se mobilise pour recevoir la visite.

Sous une immense tente blanche, dressée à quelques mètres de la passerelle, des dizaines de résidants se sont rassemblés pour faire aimer leur coin de pays. Des stands mettent en vedette des produits de la région, vendus par ceux qui les fabriquent. Par exemple, Camil Cyr propose ses boules de Noël en bois pendant que sa femme tricote à ses côtés. C'est si authentique que ça devient exotique!

Des chanteurs de la région se succèdent sur la scène et des ordinateurs avec accès gratuit à l'internet sont mis à la disposition des visiteurs. Même si les Septiliens parlent peu anglais, leur sourire et leur générosité sont de puissants moyens de communication. La chaleur de l'accueil est telle que l'escale en devient inoubliable.

La promenade du Vieux-Quai, aménagée devant un paysage absolument unique, permet de respirer l'air vivifiant du large. On peut ensuite s'attabler aux Terrasses du capitaine pour déguster une exceptionnelle chaudrée de fruits de mer. Le propriétaire raconte que son père Clément Soucy a été le premier à pêcher la crevette au Québec, au début des années 60. «Les crevettes abondaient le long du littoral, mais il fallait encore convaincre les gens de la Côte-Nord qu'elles étaient propres à la consommation», se souvient Gilles Soucy, qui a grandi à Sept-Îles.

Des autobus scolaires mènent les excursionnistes au Vieux-Poste, ensemble de cinq bâtiments comprenant un magasin général et une chapelle. Quoique sentant encore le neuf, cette reconstitution de l'ancien poste de traite de fourrures, créé en 1661 par la Compagnie de la Baie d'Hudson, est fort intéressante. Pour sa part, le Musée régional de la Côte-Nord raconte l'histoire de la région, allant des pêcheurs basques aux mines actuelles en passant par le commerce des fourrures. L'excursion comprend une incursion dans la réserve indienne, un aperçu des plages à perte de vue et un arrêt au belvédère d'où l'on aperçoit les sept îles de l'archipel qui a donné son nom à la ville.

Après le dîner, le pianiste de renommée mondiale Philip Wojciechowsky présente son récital dans le théâtre Hollywood. Un moment très apprécié qui clôture une belle journée.

Jour 4 Îles-de-la-Madeleine

Peu à peu se dessinent les falaises rouges, sculptées par les marées. Le Symphony jette l'ancre au large et de petits bateaux transportent les passagers qui le souhaitent à Cap-aux-Meules, centre névralgique des Îles-de-la-Madeleine.

Situé dans le golfe du Saint-Laurent, l'archipel est constitué d'une douzaine d'îles, dont les six principales sont reliées entre elles par d'étroites dunes de sable. Des maisons de bardeaux de toutes les couleurs se détachent sur le ciel bleu. Tout autour, des étendues de graminées donnent un cachet particulier à l'ensemble.

Cap-aux-Meules n'a pas beaucoup à offrir aux touristes, sauf une promenade sur le sentier du littoral qui conduit au belvédère. Ceux qui acceptent de braver le vent et la pente sont cependant récompensés lorsqu'ils atteignent le sommet du cap. Tant de beauté et de poésie confirment que le Québec n'a rien à envier aux autres destinations du monde.

Pour avoir une idée du potentiel touristique des îles, il faut cependant prendre un taxi ou se joindre à une excursion. Celle vers Havre-Aubert, situé à une soixantaine de kilomètres, comprend une visite du lieu historique La Grave, du phare et des boutiques d'artisanat. Une autre visite guidée se rend à Havre-aux-Maisons. Cette île a quelque chose de séduisant avec son caractère champêtre et ses maisons éparses au milieu du paysage. Des autobus scolaires peu confortables sont affectés aux excursions, mais personne ne se plaint.

La gastronomie des Îles a de quoi enchanter les visiteurs. Fruits de mer et poissons font partie des menus de la plupart des bistros et restaurants.

Les gens des Îles sont très sympathiques et ils savent recevoir! Des femmes distribuent généreusement du sucre à la crème aux passagers qui retournent vers le navire.

Photo fournie par Crystal

Jour 5 Saint-Pierre-et-Miquelon

C'est un rendez-vous manqué. De forts vents empêchent le Crystal Symphony d'accoster dans ce territoire outre-mer de la France, souvent isolé dans un épais brouillard.

L'horaire de la journée est revu rapidement. Ceux qui sont inscrits à différents cours bénéficient d'une séance supplémentaire et de nouvelles activités sont mises sur pied. Loin d'être déçus, bien des passagers apprécient cette journée en mer supplémentaire.

Dans le spa, que l'on dit feng shui, les masseuses et esthéticiennes sont très occupées. Le cinéma présente de récents films, le casino propose bingo et tournoi de black-jack tandis que des conférences sont ajoutées au programme initial.

L'atmosphère est très détendue. Dans les bars, on déguste une coupe de champagne ou sirote un espresso. Pianistes et ensembles à cordes interprètent d'agréables mélodies.

Quand le soleil se pointe en après-midi, les passagers profitent de la piscine du navire. Jusqu'à maintenant, la température automnale n'a pas permis de s'y baigner.

Après quatre jours à bord du Symphony, les passagers ont fait plusieurs rencontres, formé des groupes. Ils ont eu le temps d'explorer le navire, de découvrir les restaurants de spécialité. Il n'y a pas moins de sept endroits où manger. Outre la salle à manger, le restaurant asiatique Silk Road et le Sushi Bar du grand chef Nobu Matsuhisa sont très fréquentés. Le restaurant italien Prego se démarque également par son excellente cuisine de la Toscane.

Jeff Nease, un humoriste qui se produit régulièrement à Las Vegas, présente ce soir son spectacle. Le théâtre Hollywood fait salle comble pour les deux représentations.

Photo Andrée Lebel, La Presse

Les rives du Saint-Laurent vues du Crystal Symphony.

Jour 6 En mer (golfe du Saint-Laurent)

Cette seconde journée en mer a quelque chose de romantique. Avec la pluie et l'épais brouillard qui entoure le navire, on a l'impression d'être dans un chaud cocon. À intervalles réguliers, la corne de brume vient ajouter son voile de mystère.

Tout est calme sur le navire. C'est le temps de terminer les livres empruntés à la bibliothèque, d'aller tenter sa chance au casino, de s'offrir le bijou ou le vêtement qui nous attire dans les boutiques.

Comme tous les après-midis, l'Afternoon Tea est servi dans l'élégant décor du Palm Court. Ce moment de béatitude est enveloppé par la musique classique du Ginger String Quartet.

Des conférences passionnantes sur Nixon, Al-Qaïda et la Russie de Poutine font salle comble au Galaxy Lounge. Le chef invite aussi ceux qui le désirent à une visite guidée des cuisines.

Les personnes qui voyagent seules à bord du Symphony ne sont pas vraiment seules. Tous les jours, les quatre Ambassador Hosts sont là pour elles. Ces messieurs distingués, qui dansent divinement bien, accompagnent celles qui le désirent sur les pistes de danse. Des rencontres quotidiennes pour les gens seuls sont aussi organisées au moment de l'apéro.

Jour 7 Québec

Le navire accoste au pied de la rue Saint-Paul, dans le Vieux-Québec. Ainsi, les passagers peuvent aller se promener tranquillement dans le quartier, s'arrêter dans de charmants bistros pour un café ou un croissant. Avec le château Frontenac haut perché et les couleurs de l'automne, il y a de quoi réaliser des photos qui susciteront l'envie.

Des excursions sont offertes à l'île d'Orléans, aux chutes Montmorency et dans la haute-ville, mais plusieurs croient qu'il serait dommage de s'éloigner du Vieux-Québec avec ses monuments historiques, ses galeries d'art et ses antiquaires. Certains se joignent à des visites à pied du quartier. D'autres se dirigent vers la Citadelle, la place Royale ou le marché du Vieux-Port pour faire provision de produits québécois. Les confitures maison, miels, nougats et cidres seront d'excellents souvenirs de voyage. Sans compter que l'ambiance du marché est fort agréable.

Au Musée de la civilisation, les passagers se reconnaissent entre les armures, masques et armes de l'exposition Samouraï. Ceux qui s'intéressent à l'histoire visitent l'expo permanente Le temps des Québécois. Cette synthèse de plus de 400 ans d'histoire, très bien présentée, rappelle les grands événements qui ont façonné le Québec.

En fin d'après-midi, c'est avec un brin de nostalgie que les passagers retournent à bord du Crystal Symphony. Plusieurs de ceux qui viennent de découvrir Québec se promettent d'y revenir pour quelques jours.

Le navire met le cap vers Montréal à 18h, pendant que les passagers fredonnent What a Wonderful World en même temps que Louis Armstrong. Ces dernières minutes de clarté laissent entrevoir les côtes colorées du Saint-Laurent. On se régale une dernière fois des excellents sushis du chef Nobu Matsuhisa ou des divins soufflés au chocolat du Prego.

Demain matin nous serons de retour dans le port de Montréal. La seule pensée de ne pas avoir d'avion à prendre a quelque chose de réjouissant. Un taxi et hop! à la maison. Fort agréable et très reposante, cette croisière!

Les frais de cette croisière ont été payés par Crystal Cruise Line.





Photo Andrée Lebel, La Presse

Le fjord du Saguenay.