Le couple d'entrepreneurs Judith Richardson et Charles Le Pierrès a relancé sa griffe il y a peu, mais celle-ci s'est déjà imposée au Canada tout en perçant aux États-Unis. En effet, si Judith & Charles est une jeune marque, le couple derrière elle s'appuie sur une expérience de longue date dans le prêt-à-porter. Pendant 22 ans, ils ont fait vivre en Amérique du Nord la marque française Teenflo, avant de rebaptiser et de « rebrander » leur entreprise sous le nom de Judith & Charles.

«L'élève a dépassé le maître», résume Charles Le Pierrès, que l'on rencontre aux bureaux du quartier Chabanel de la maison.

Avec Judith & Charles, une des premières décisions du couple a été de vendre ses créations dans ses propres boutiques, plutôt que de compter sur des détaillants, comme c'était le cas avec Teenflo.

Un avantage en temps de crise, qui assure que l'ensemble de la collection est présent en boutique - plutôt que quelques éléments esseulés.

Judith & Charles compte aujourd'hui 12 magasins, au Canada et aux États-Unis, et pas moins de 140 employés. En 2015, trois nouvelles boutiques ouvriront leurs portes sous l'égide de licenciés, en Chine et au Qatar.

«C'est un test. Je veux voir où tout cela va nous mener», dit, curieux, M. Le Pierrès.

Classique

La marque assume pleinement le côté classique de ses vêtements. Les coupes comme les matières sont féminines et sobres.

Un style qui semble devoir beaucoup à Judith Richardson, aperçue aux bureaux de Judith & Charles. Mme Richardson assure la création des vêtements et supervise le travail de trois designers.

À l'exception des mailles, tous les tissus sont choisis auprès de fournisseurs italiens connus de longue date, explique M. Le Pierrès. Tout est ensuite confectionné en Ontario, auprès de fournisseurs choisis eux aussi il y a 20 ans.

«Ce n'est pas que nous n'avons pas essayé de produire à Montréal, mais il n'y avait personne. Les gens n'étaient pas disposés à faire ce que l'on avait en tête: livrer un produit impeccable, dit M. Le Pierrès. Et après, comme on veut un vêtement impeccable, on a préféré rester au Canada quand tout le monde partait en Chine.»

Ces amoureux du détail ont en effet une vision précise de ce que doivent être des vêtements haut de gamme. Pas question, donc, de lésiner sur la qualité.

«Notre marge est moindre, mais ce n'est pas grave», estime M. Le Pierrès.

Image

Le souci du détail - et un certain contrôle de leur image - est au coeur des préoccupations de la maison montréalaise.

Ainsi, la décoration des boutiques et la musique qui y joue sont décidées au siège social de Judith & Charles. Et les licenciés devront aussi se plier à la philosophie de la maison.

Partenaires dans la vie comme en affaires, Judith Richardson et Charles Le Pierrès travaillent côte à côte depuis une vingtaine d'années.

Tous deux sont autodidactes: Judith Richardson a commencé sa carrière chez Esprit Canada.

En revanche, rien ne destinait Charles Le Pierrès à se lancer dans la mode. Il est né dans une famille modeste (père marin, mère femme de ménage), dans le sud-ouest de la France, et n'a pas poussé ses études.

«J'ai quitté l'école à 14 ans, et je n'ai aucun diplôme», dit-il.

Quelques années et un service militaire plus tard, il travaille au Club Med quand il rencontre sa future conjointe, Judith Richardson, alors en vacances.

«Après, je suis venu au Canada, et j'ai vendu des emballages. C'est Judith qui a eu l'idée de se tourner vers Teenflo, se souvient-il. On a démarré la compagnie, et je ne connaissais rien aux vêtements.»

Vendeur-né, Charles Le Pierrès réussit très vite à faire sa marque dans le textile.

«C'est incroyable, quand j'y repense», s'amuse-t-il, avant d'ajouter, sérieux: «La vente, c'est facile. Ce qui ne l'est pas, c'est de concrétiser les idées. C'est le rôle de Judith, concrétiser toute la collection.»

Que réserve l'avenir à Judith & Charles? On ne peut évidemment rien prédire, mais une chose est sûre, Charles Le Pierrès espère ouvrir de nouvelles boutiques.

«J'aimerais beaucoup développer le marché américain», dit-il.

Avec déjà deux boutiques à New York et une troisième à venir au World Financial Center, les amarres sont déjà lâchées.