Transparence, résille, asymétrie, drapés, cols châles, la mode masculine telle que présentée à la Semaine de mode de Montréal par la griffe Ezra Constantine, la semaine dernière, n'est pas pour le commun des mortels. Ce qui ne l'empêche pas, au contraire, d'être magnifique dans son étrangeté. Rencontre (dans un hall d'hôtel montréalais) avec un tandem de créateurs torontois qui fait beaucoup jaser.

Kirk Pickersgill et Stephen Wong se connaissent depuis l'adolescence. Ensemble, ils s'imaginaient devenir un jour les prochains Dolce&Gabbana et dessinaient des collections fictives pour leur éventuelle griffe de rêve.

Puis Kirk est parti travailler comme styliste pour des marques réputées comme DSquared2 et Neil Barrett, tandis que Stephen a roulé sa bosse comme concepteur de costumes au cinéma, à l'époque où Toronto se positionnait comme ville de tournage. Il a entre autres produit des vêtements pour les films Last Days of Disco, American Psycho et Hairspray.

Forts de leurs expériences respectives, les deux hommes se sont retrouvés dans la Ville reine pour entreprendre leur grand projet. «Nous nous sentions prêts», lance Stephen. Le rêve est donc devenu réalité au printemps 2006, lorsqu'ils ont lancé Greta Constantine, une griffe pour femmes moderne et d'un luxe subtil, qui a immédiatement attiré l'attention du grand magasin Holt Renfrew, où la marque est vendue en exclusivité.

De collection en collection, les designers ont perfectionné leurs superbes drapés et leur esthétique de femme à la fois chic et choc.

Puis l'an dernier, sans se poser de questions, ils ont commencé à habiller l'homme. «Ça s'est fait de manière très progressive et naturelle. Il y avait toujours des hommes dans les défilés et les séances photo de Greta, soit nus, soit en maillots de bain. Les gens ont commencé à nous demander d'habiller les mannequins! Alors nous avons conçu la première collection de cette manière, en imaginant ce que l'homme de Greta porterait», explique Stephen.

Et au final, est-ce que Greta et Ezra feraient un beau couple? «En fait, tout en demeurant cool, je crois que Greta est un peu plus classique qu'Ezra», répond Kirk.

En effet, Ezra repousse clairement les limites de la masculinité. On peut penser à des versions haut de gamme de complexgeometries ou de Travis Taddeo, deux griffes montréalaises qui présentent un visage très contemporain et osé de la mode masculine. Mais dépouillés de leurs artifices de défilé, certaines pièces plairont certainement à l'homme «fashion».

Si Kirk et Stephen ont choisi de montrer leur collection printemps-été 2011 à Montréal, c'est parce qu'ils croient que cet homme qui aime la mode (pensez Pierre Lapointe) habite la métropole québécoise. «Pour moi, Montréal est la contrepartie élégante de Toronto, qui est plus terre-à-terre, déclare Stephen. Nous pensons qu'il y a un marché ici pour Ezra. Mais nous avons tout de même été agréablement surpris par la réponse des Torontois à la griffe. Ils l'ont accueillie avec enthousiasme.»

Le tandem n'entend pas s'arrêter aux vêtements. En temps et lieu, ils aimeraient créer chaussures, sacs et autres accessoires pour compléter leurs collections. Avec des entrées chez Harrod's, à Londres, et dans la salle de montre italienne qui vend entre autres Lanvin et Vera Wang dans toute l'Europe, Greta et Ezra sont en voie de devenir un couple vedette.

Ezra et Greta Constantine sont en vente chez Holt Renfrew, les prix vont de 195$ à 2500$.

Infos: www.gretaconstantine.com