«Ici, c'est la plage des chiens, nous sommes seulement des invités», plaisante José Luis, un habitué venu avec Morena sa jeune chienne Labrador à la «BauBeach», une des rares plages canines à proximité de Rome.

Dans un pays qui compte près de six millions de chiens enregistrés auprès du ministère de la Santé italien (chiffres de 2012), les bandes de sable de la Botte restent pour la plupart interdites au meilleur ami de l'homme.

«Une aberration quand on sait que les chèvres ou les chevaux sont eux autorisés», s'agace auprès de l'AFP Patrizia Daffinà, pionnière et fondatrice en 1998 de l'association «BauBeach» («bau» étant le «wouaf» des chiens italiens), première plage canine à voir le jour en Italie.

«La politique touristique du développement balnéaire lancée dans le pays au sortir de la Seconde Guerre mondiale a chassé les chiens de nos plages pour leur donner une image de propreté», regrette cette ancienne scénariste pour le cinéma italien, aujourd'hui plus cynophile que cinéphile.

Une plage au poil

Sur le front de mer de Maccarese, petite localité à quelques kilomètres au nord de Rome, à deux pas de la plage privée réservée à la police italienne, la «BauBeach» s'étend sur quelque 7000 m2, pouvant ainsi accueillir plus de 100 chiens en même temps.

Pour pouvoir profiter de cet espace privilégié, les maîtres doivent se munir du carnet de santé de l'animal et s'affranchir d'une inscription annuelle de 13EUR à laquelle s'ajoute un billet d'accès journalier de 4EUR, 3EUR pour les chiens adoptés dans un chenil.

«Hormis les chiennes en chaleur, tous les chiens peuvent profiter de notre plage, du rottweiler au caniche, aucune discrimination de race n'est pratiquée chez nous», précise Patrizia qui l'an dernier a enregistré plus de 7000 entrées entre mai et septembre, «un chiffre en constante progression».

Lorsqu'un doute persiste sur la bonté de caractère d'un chien, ce dernier, à l'instar d'une entrée en boîte de nuit, doit se soumettre à un examen rapide effectué par un membre «doté d'un bon flair» de la «BauBeach», avant de se voir ou non refuser l'accès à la baignade.

Une fois la laisse détachée, «condition absolue, selon Patrizia, pour laisser le chien sociabiliser, s'amuser en toute liberté et s'affranchir de tensions potentielles», transat, parasol et gamelle s'offrent à l'animal, le tout sous le contrôle d'un vétérinaire.

Une vie de chien

Alors que les «toutous» de petits gabarits préfèreront plonger dans un petit bassin artificiel pour y récupérer un bâton ou simplement barboter avec leur maître, les nageurs aguerris -- y compris les énormes terre-neuves -- iront eux se frotter aux vagues de ce coin de la Méditerranée.

Allongée sur un transat avec entre ses jambes sa chienne Melissa, Roberta est venue depuis Rome «grâce au bouche-à-oreille»: «C'est super, mon chien s'amuse et moi je me repose, on fait d'une pierre deux coups!»

Le bain terminé, assommés par l'effort et la chaleur, les chiens peuvent réguler leur température interne -- d'un degré supérieur à celles des humains (37°) -- en s'abreuvant dans leur gamelle et en s'allongeant à l'ombre d'un parasol installé au ras du sol spécialement pour eux.

Malgré toutes ces attentions réservées aux canidés, les «accompagnateurs» ne sont pas non plus délaissés: du bar, où ils peuvent garder un oeil sur leur bête qui gambade au loin, à la plage d'une propreté irréprochable, tout est fait pour que la journée se déroule «au poil».

Placée sous le drapeau vert du bio, la «BauBeach» est nettoyée à l'aide de produits non polluants par une équipe en permanence mobilisée.

«Voir son chien nager, s'amuser avec d'autres chiens, ça te rend heureux parce que lorsque ton animal va bien, tu vas bien toi aussi», sourit le maître de Morena pendant que celle-ci s'ébroue avant de s'amuser à creuser un énième trou. Une vraie vie de chien.

PHOTO GABRIEL BOUYS, AFP

PHOTO GABRIEL BOUYS, AFP