Le groupe japonais de jeux vidéo Nintendo affiche toujours une forme insolente mais il a été contraint jeudi de baisser pour la deuxième fois ses prévisions de bénéfices annuels, à cause de la brusque hausse du yen et de la crise qui pourrait aussi amoindrir les achats de jeux.

Nintendo, qui a engrangé un bénéfice net de 212 milliards de yens (1,8 milliard d'euros) au terme des trois premiers trimestres de l'exercice 2008-2009, s'attend à ce qu'il s'élève à seulement 230 milliards en fin d'année contre 345 milliards de yens prévus précédemment et même 410 milliards au départ.

Le yen fort aura donc eu raison de l'envolée affolante des gains du maître du jeu vidéo depuis plusieurs années.

La fulgurante ascension de la devise japonaise, consécutive à la déroute des institutions financières américaines, rend en effet caducs les calculs antérieurs de marges sur les produits nippons vendus à l'étranger.

Cet effet comptable ne signifie toutefois pas que les produits de la maison Nintendo ont brutalement cessé de plaire, au contraire.

De fait, même si le groupe de Kyoto a indiqué que son chiffre d'affaires annuel n'atteindra pas 2.000 milliards comme espéré, mais seulement 1.820 milliards, cela restera néanmoins un record supérieur de 9% à celui de l'an passé. Son bénéfice d'exploitation pour les trois premiers trimestres écoulés (501 milliards) équivaut déjà à son chiffre d'affaires d'il y a trois ans, avant que les nouvelles consoles DS et Wii ne deviennent d'incroyables machines à cash.

Nintendo a engrangé 1.536 milliards de yens au cours des trois premiers trimestres (avril à décembre), période durant laquelle il a vendu 25,62 millions de consoles DS dans le monde, hissant le cumul à 96,22 millions d'exemplaires depuis le lancement de cette ultra-populaire famille de machines fin 2004.

En neuf mois, le pionnier nippon du secteur a écoulé 20,5 millions de consoles de salon Wii (45 millions en deux ans de présence en rayon), ainsi que 164 millions de boîtes de jeux portant sa griffe pour la gamme DS et autant pour la Wii.

Les divertissements domestiques étant généralement perçus en temps de crise comme des «anti-dépresseurs» relativement bon marché par comparaison avec les sorties festives, Nintendo est-il totalement immunisé face à une chute de la consommation due à la récente débâcle économique?

«La récession n'est pas une bonne chose y compris pour le secteur du jeu vidéo, quoi qu'on en dise», avait affirmé il y a six mois l'analyste Hiroshi Kamide de KBC Securities.

De fait, bien que brandissant des performances exceptionnelles pour les neuf mois passés, avec des recettes en hausse de près de 17% sur un an, le papa de Mario et des Pokemon se montre plus prudent dans ses prévisions pour le dernier trimestre de son exercice (janvier à mars), alors que les principaux pays où l'on se dispute généralement ses produits sont en proie à la pire conjoncture depuis que le jeu vidéo existe.

Le groupe pensait en octobre écouler 207 millions de jeux pour DS durant l'année mais ce nombre a été ramené jeudi à 193 millions même si Nintendo estime que 31,5 millions de DS seront achetées durant les 12 mois considérés soit un million de plus que prévu précédemment.

De même la firme indique désormais que 193 millions de jeux pour la Wii devraient avoir été vendus dans l'année, soit 7 millions de moins qu'envisagé à l'automne dernier.