Dans un geste d'ouverture inhabituel, le gouvernement chinois vient de lancer un site web offrant à la population la possibilité d'exprimer franchement son opinion sur la marche du pays, occasion sitôt saisie par de nombreux internautes pour vertement critiquer le pouvoir.

Depuis l'ouverture du site la semaine dernière, des dizaines de milliers de messages ont abordé de façon directe les problèmes de liberté d'expression, de collusion ou de corruption en Chine, même si d'autres messages chantent les louanges du parti communiste au pouvoir.

«Si vous vous préoccupez des conditions de vie de la population, alors soyez solidaires: tuez les responsables corrompus et les tyrans locaux», conseillait par exemple un message adressé au président Hu Jintao.

Le site, baptisé «ligne directe sur Zhongnanhai», le siège du pouvoir au coeur de Pékin, offre une faculté pratiquement jamais accordée à la population chinoise et dépend du Quotidien du peuple, journal officiel du Parti communiste chinois.

La censure très active en Chine interdit généralement aux internautes de déposer des opinions critiquant le gouvernement ou évoquant la question des droits de l'Homme. Mais en l'espèce la règle ne semblait plus s'appliquer pour de nombreux commentaires.

Toutefois, affirmait un internaute dans une contribution en ligne, la censure était toujours en vigueur sur le nouveau site, malgré la fenêtre de libre expression apparemment ouverte.

«Camarade Hu, n'est-il pas intéressant de constater que j'ai laissé tant de messages et que tous ont été harmonisés? Ne pouvez-vous donc pas nous laisser dire la vérité?», a-t-il écrit à l'adresse du président Hu.

Les cybercitoyens chinois ont pris l'habitude d'utiliser le verbe «harmoniser» dans le sens de «censurer», en référence ironique aux coupes sur l'internet exercées par le pouvoir au nom de «l'harmonie sociale».

Mais c'est la hausse des prix de l'immobilier qui semblait beaucoup préoccuper les Chinois qui étaient nombreux à dénoncer la collusion de responsables locaux corrompus et de promoteurs immobiliers avides.

«Quand les prix vont-ils baisser?», demandait un internaute, «la seule chose qui ne monte pas, ce sont les salaires!»