Et puis, «vous avez aimé le match?» gazouillait l'Impact de Montréal à ses abonnés Twitter au lendemain de la victoire in extremis contre le Sporting Kansas City. Pas plus qu'il faut, me suis-je sagement empêché de répondre. Au risque de jouer les rabat-joie, les résultats positifs arrachés dans le temps additionnel ont parfois tendance à masquer les facettes moins reluisantes du jeu déployé par l'équipe triomphante.

L'émotion intense ressentie par ceux qui étaient encore présents parmi les 20 527 spectateurs au moment du but dramatique de Blake Smith contrastait drôlement avec l'ensemble d'un match dans lequel l'Impact manquait (encore) de liant.

On sait bien que le rythme du jeu ne peut pas toujours être endiablé. Or, c'est davantage au sujet de l'animation offensive du bleu-blanc-noir que les inquiétudes continuent de s'accroître. Si l'action menant au but victorieux démontre à nouveau le potentiel du onze montréalais, la construction d'attaques dangereuses a été beaucoup trop rare contre le Sporting et son pressing agressif.

À l'origine des ennuis de l'Impact, c'est la relance du jeu dans sa propre moitié de terrain qui s'avère de plus en plus problématique. Non seulement Alessandro Nesta et Matteo Ferrari perdent un nombre inhabituellement élevé de ballons, mais les milieux de terrain montréalais n'arrivent plus à faire le relais entre la défense et l'attaque, si bien que la charnière italienne semble maintenant opter pour ignorer les appels de balle d'Arnaud, Felipe, voire Patrice Bernier. Étant donné les difficultés rencontrées par les deux premiers, difficile de blâmer les vétérans de Série A.

Et à force de voir un Marco Di Vaio esseulé en pointe et incapable d'établir des ponts avec ses ailiers, on a donc pu constater l'inefficacité de la recette montréalaise lorsque le jeu n'est pas ouvert. Pensez-vous que le mot se passe en MLS?

Idée de jeu plus claire

L'Impact a beau afficher une volonté de «poser le jeu» - à l'opposé du kick&run -, l'équipe ne partage pas toujours une intention collective pour déséquilibrer la défense adverse. En bref, Di Vaio n'aime pas recevoir le ballon dos au but; les milieux ne semblent plus savoir où aller, à qui passer; les défenseurs découragés commencent à balancer en avant des ballons de plus en plus difficiles à négocier.

On m'accusera de faire un constat pessimiste, mais il faut éviter de se bercer d'illusions quand les occasions obtenues sont surtout le fruit d'un rebond favorable plutôt que d'une construction préméditée.

Voilà donc la raison pour laquelle l'arrivée d'un nouveau «patron» dans l'entrejeu montréalais pourrait rafraîchir une attaque devenue prévisible. La mise sous contrat de l'Argentin Hernan Bernardello bousculera assurément la hiérarchie au milieu du terrain, mais elle vise avant tout à rétablir la confiance au sein d'une équipe en proie au doute lorsqu'elle est sous pression.

Si Patrice Bernier avait joué avec brio le rôle de maestro lors des premiers matchs de l'Impact cette saison, les changements tactiques ont modifié la tâche du Québécois, qui influe moins sur le jeu. Or, à l'issue du match contre Kansas City, je n'ai pas l'impression que Bernier sera celui qui écopera quand Bernardello jouera. On ignore cependant si le nouvel agencement permettra d'obtenir un rendement digne des possibilités offertes par les deux joueurs.

On soupçonne également que l'introduction d'Adrian Lopez Rodriguez, surnommé Piscu, ne nuira pas aux relances montréalaises. Car s'ils sont reconnus pour leur fiabilité en défense, les arrières italiens n'ont pas la réputation d'être des fabricants de jeu. S'il faut se fier à ses premières touches à l'entraînement, l'Espagnol fait preuve d'une élégance avec le ballon qu'on souhaiterait contagieuse. Reste à voir de quelle manière il s'adaptera à la réalité de la Ligue majeure nord-américaine.

Le mois d'août sera chargé pour l'Impact, et peu importe le système de jeu employé, le onze montréalais aura besoin d'idées claires pour se maintenir dans le peloton de tête en MLS tout en disputant la phase de groupe de la Ligue des champions.

Et si on se montre aussi exigeant envers le club bleu-blanc-noir en dépit de son surprenant parcours, c'est surtout parce que l'on a envie que l'équipe continue de surpasser les attentes qu'elle a elle-même créées.