Le Bayern Munich et le Borussia Dortmund, en infligeant des raclées retentissantes à deux géants, le Barça et le Real, ont confirmé l'excellente santé d'un soccer allemand pas loin de dominer l'Europe, avec les armes de l'efficacité retrouvée, du beau jeu et de la santé financière.

Au terme des deux demi-finales aller de Ligue des champions, le bilan est sans appel: les clubs d'outre-Rhin ont infligé un cinglant 8-1 aux grands d'Espagne. Et une finale 100% germanique se profile, pour la première fois dans l'histoire de la plus prestigieuse des compétitions européennes, le 25 mai à Wembley.

«La communauté du soccer européen se prépare à un passage de témoin», s'enflammait jeudi le magazine spécialisé Kicker. Les deux coups d'éclat de mardi et mercredi ont clairement marqué les esprits, mais ils constituent surtout la confirmation de la vigueur retrouvée des clubs allemands, dans la foulée de l'équipe nationale entraînée par Joachim Löw.

Et si la «Mannschaft» peine encore à concrétiser son renouveau par des titres qui récompenseraient son jeu séduisant, les clubs sont en passe de prendre le relais.

Après les phases de poules en Ligue des champions et en Ligue Europa League, l'Allemagne comptait déjà le chiffre record de sept équipes qualifiées pour les phases finales: le Bayern, Dortmund et Schalke avaient en outre tous trois fini à la première place de leurs groupes, Leverkusen, Hanovre, Mönchengladbach et Stuttgart poursuivant l'aventure en 16e de finale de l'Europa League.

Après la Bavière, la Ruhr

Autre symbole: le parcours brillant du Borussia Dortmund. Si l'Europe est en effet habituée à la régularité dans l'excellence du Bayern, les performances du club de la Ruhr signalent avec plus de force qu'il se passe vraiment quelque chose dans le soccer allemand.

Après avoir évité le gouffre de la faillite en 2006, bien loin de ses années de gloire de la décennie 90 (C1 gagnée en 1997), le club s'est redressé à tous les niveaux, sous la houlette d'une direction rigoureuse et d'un entraîneur charismatique et brillant, Jürgen Klopp.

Le BVB a d'abord conquis deux championnats, une Coupe d'Allemagne, et se trouve maintenant aux portes de la finale de la plus prestigieuse compétition européenne. Un parcours accompli par une équipe à la moyenne d'âge de moins de 25 ans!

Le milieu offensif Mario Götze, 20 ans, comparé à Messi et dont le transfert annoncé vers le Bayern pour 37 millions d'euros (49 millions $) a fait couler beaucoup d'encre, son complice Marco Reus, 23 ans, ou le défenseur international Mats Hummels, 24 ans, incarnent cette nouvelle génération.

Leur éclosion, comme celle d'autres talents (les jumeaux Bender, le défenseur Badstuber, etc.), est le fruit de l'intense politique de repérage mise en place par la DFB, la fédération allemande, qui, dans la foulée de la déroute de l'Euro 2000, a créé son «Talentförderprogramm» (programme de promotion des talents) avec 366 centres de repérage à travers tout le territoire.

Perspectives

«Le soccer allemand est bien sûr un bon soccer et en ce moment, il dispose d'une génération avec des types très talentueux», reconnaissait d'ailleurs mercredi soir l'entraîneur du Real, José Mourinho.

Ce talent s'exprime en outre dans un style bien éloigné de la rigueur industrieuse qui a longtemps fait la réputation du soccer germanique. En moyenne, on compte par exemple trois buts par rencontre de Bundesliga, la moyenne la plus forte d'Europe, qui explique aussi sans doute pourquoi les stades sont pleins (80 460 supporteurs de moyenne pour Dortmund, là aussi record d'Europe).

Cerise sur le gâteau, les clubs allemands sont financièrement en bonne santé.

La dette totale cumulée des 36 clubs de Bundesliga et Bundesliga 2 n'atteint pas 750 millions d'euros (995 millions $) quand elle culmine à 3,6 milliards d'euros (4,8 milliards $) pour les clubs pros espagnols. Une situation qui pourrait encore renforcer l'attrait du championnat allemand, au moment où l'UEFA de Michel Platini s'apprête à instaurer ses nouvelles règles sur le fair play financier.

Les raisons de se réjouir s'accumulent donc et la presse allemande peut jubiler: «L'Espagne a les titres, l'Allemagne les perspectives», soulignait ainsi le magazine Focus.