Les cris racistes lancés contre Samuel Eto'o et Mario Balotelli, dimanche au stade Sant'Elia de Cagliari, ont suscité mardi une indignation tardive en Italie ainsi qu'un débat entre les tenants de la fermeté et ceux qui plaident pour un traitement par le mépris.

Sur le moment, il n'y a pas eu de scandale.

Au cours du match, les deux attaquants de l'Inter visés par une partie des tifosi sardes sont restés stoïques. Il est vrai que le Camerounais Eto'o et Balotelli, Italien d'origine ghanéenne, ont déjà eu à subir ce genre de traitement. Après la rencontre, nulle trace non plus de réactions indignées.

Et puis lundi, la presse italienne s'est demandée pourquoi rien n'avait été dit ou fait, pourquoi le match n'avait pas été suspendu comme le prévoit la loi, pourquoi ceux qui ont crié, minoritaires, n'ont pas été à leur tour sifflés par le reste du public.

Et cette fois, les réactions tant sportives que politiques ont afflué.

Le président du syndicat des joueurs, Sergio Campana, puis le président de l'Inter, Massimo Moratti, ont assuré que le match aurait dû être suspendu, au moins temporairement, pour donner un signal fort.

«Rien de significatif»

«Les cris racistes sont une insulte à l'intelligence. Malheureusement, il y aujourd'hui trop d'incidents racistes dans les stades. Ceux qui voulaient que le match soit suspendu ont raison», a renchéri mardi Pier Luigi Bersani, un des leaders du Parti démocratique (PD, gauche).

Dans un tel cas, la décision de suspendre le match ne revient cependant pas à l'arbitre, mais au représentant des autorités détaché auprès du stade. Et à ce sujet, le préfet adjoint de Cagliari, Giuseppe Gargiulo, a été clair.

«En seconde période, (...) avec l'entrée en jeu de Balotelli, il y a eu quelques accès de cris racistes accompagnés de quelques sifflets. Mais rien de significatif, a-t-il expliqué. Au cours des dernières minutes, il y a eu une légère intensification de ces cris. À ce point, j'ai consulté un dirigeant de l'Inter et nous avons convenu qu'il n'était absolument pas nécessaire d'intervenir vu qu'il manquait peu de temps avant le coup de sifflet final».

«Cagliari n'est pas une ville raciste», a souligné de son côté le président du club Massimo Cellino, ajoutant qu'il ne fallait «pas instrumentaliser certains événements, ne pas leur accorder trop d'importance et ainsi les transformer en problèmes».

«Caisse de résonance»

L'entraîneur Massimiliano Allegri a, lui, juste entendu «la désapprobation du public avec des sifflets, mais seulement pour contester un comportement anti-sportif (d'Eto'o)».

«En en parlant, cela offre une caisse de résonance à ceux qui commettent ces actes», a abondé Adriano Galliani, numéro 2 de l'AC Milan, le club propriété du chef du gouvernement Silvio Berlusconi.

«Je pense que les joueurs peuvent faire beaucoup sans même parler. Par exemple (...), en se tournant vers les ultras le pouce tendu vers le bas», a proposé pour sa part Alessandra Mussolini, députée du Peuple de la Liberté (PDL, droite), majoritaire.

En avril dernier, Balotelli, 19 ans, avait été couvert de cris et d'injures par les tifosi de la Juventus lors d'un match à Turin. La Juve avait ensuite été sanctionnée d'un match à huis clos.

Cela ne risque toutefois pas d'arriver au club de Gagliari : l'arbitre n'a rien consigné dans son rapport, base indispensable pour que la justice sportive puisse prendre une sanction.