L'authenticité est toujours payante. L'ancien dur à cuire du Canadien Chris Nilan est d"une franchise et d'une lucidité saisissantes dans le documentaire "The Last Gladiator", dont c'était la première montréalaise hier soir.

Nilan parle sans pudeur des affres du métier de bagarreur, puis de sa descente aux enfers: conflits avec la justice, mais surtout dépendance à l'alcool, aux anti-inflammatoires et même à l'héroïne. On aurait entendu une mouche voler dans la salle de cinéma après le film lorsque Nilan s'est adressé aux spectateurs, parmi lesquels Geoff Molson, Marc Bergevin, Serge Savard, Réjean Houle, Yvon Lambert, Brian Gionta, Erik Cole, David Desharnais, Josh Gorges, Brandon Prust, Colby Armstrong, André Roy, Georges Laraque et Jean Pascal, entre autres.

Comme une majorité d'anciens bagarreurs, Nilan ne portera pas de regard critique sur son métier, même s'il a admis être tombé dans l'héroïne pour chasser la douleur qui était rendue insupportable après 30 interventions chirurgicales. Il cataloguera d'ailleurs les morts de Derek Boogaard, Rick Rypien et de Wade Belak, survenues à quelques mois d'intervalle, d'incidents isolés. Ironiquement, le meilleur souvenir en carrière de Nilan demeure le but qu'il aura marqué en tir de punition, et non pas l'une de ses bagarres mémorables.

L'Américain avouera d'ailleurs comme tous ses pairs qu'il souhaitait d'abord jouer au hockey, mais qu'il devait aussi "remplir son rôle". D'où sa confusion lorsqu'un de de ses plus grands mentors, Jacques Lemaire, lui a demandé de se battre moins souvent pour se concentrer sur ses talents de hockeyeur. Heureusement, le successeur de Lemaire, Jean Perron, n'assistait pas au visionnement puisqu'il n'est pas montré sous l'angle le plus favorable. L'ancien entraîneur et DG des Bruins, Mike O'Connell, passe aussi au tordeur en étant qualifié par le héros de "l'une des plus grandes mauviettes de l'histoire du hockey".

Mais ce film est aussi, surtout, la relation tordue entre un père et son fils. Quand Nilan avoue au début du film que le fait de se faire battre par son paternel au cours de sa jeunesse n'a visiblement pas contribué à en faire un meilleur homme, et quand il se demande à haute voix si ses cinq premières années de vie n'ont pas été aussi nocives que les années où il faisait la loi avec ses poings sur la patinoire, on a envie d'en connaître davantage sur ce lien particulier. Son père pleurera souvent dans le film, mais on ne sent aucune compassion envers son fils, surtout de la honte. Dur.

Un film à voir.