Alexandre Despatie s'est blessé sérieusement lors d'un entraînement en prévision du Grand Prix de plongeon de Madrid, en Espagne. Le plongeur de 27 ans s'est infligé une profonde coupure au haut du front, qui a nécessité une opération.

Despatie s'est blessé en frappant le tremplin de plein fouet lors d'un triple saut périlleux et demi retourné. Dans ce saut, les plongeurs se placent dos à l'eau avant de se propulser dans les airs et de pirouetter vers la planche.

«Quelque chose est arrivé sur ce plongeon», a indiqué le directeur en chef des techniques de Plongeon Canada, Mitch Geller. «Il a perdu l'équilibre et il n'a pas réagi correctement. Il était trop près du tremplin, et sa tête a frappé le bout de la planche, juste sous la racine des cheveux.»

Après être tombé à l'eau, Despatie a été secouru par les sauveteurs sur place et par son entraîneur Arturo Miranda, lui-même sauveteur certifié. «Il ne semble pas avoir perdu connaissance, et si ç'a été le cas, ce fut très, très brièvement, a précisé Geller, qui n'était pas sur place. Il était certainement ébranlé, un peu confus.»

Transporté à l'hôpital, Despatie a passé une batterie complète d'examens, qui n'ont pas révélé de blessures internes. L'entaille d'une dizaine de centimètres demandait cependant une opération sous anesthésie générale. L'intervention d'une quarantaine de minutes était sur le point de commencer au moment d'écrire ces lignes, tard en soirée en Espagne.

Christiane Despatie, la mère d'Alexandre, avait pu s'entretenir avec Miranda juste avant l'opération. «Il m'a dit: «Ça paraît pire que c'est», a-t-elle indiqué. Il s'est ouvert le front solide et il avait l'air ébranlé. Mais Arturo m'a dit qu'Alexandre lui parlait et que ce qu'il disait avait du sens, ce qui est une bonne nouvelle.»

Despatie demeurera en observation pour une période minimale de 24 heures. Les médecins voudront aussi s'assurer que le double médaillé olympique n'a pas subi de commotion cérébrale. «S'il y a une commotion, elle est légère, ce ne serait pas sérieux», a fait valoir Geller lorsqu'on l'a interrogé à ce sujet.

Le directeur de Plongeon Canada est davantage préoccupé par une possible infection de la plaie lorsque Despatie sera en mesure de retourner à l'eau. «À cause de l'endroit de la blessure, il est difficile de l'imperméabiliser, à moins de lui raser la tête, de couvrir la plaie et de l'enrubanner. On ne sait pas combien de temps ça prendra à guérir et quand il pourra retourner à l'eau. Il y a beaucoup d'inconnu en ce moment.»

L'autre source d'inquiétude est l'impact psychologique d'une telle mésaventure. «Quand quelqu'un subit un accident comme ça, ça arrive généralement par surprise, a souligné Mitch Geller. On ne veut pas que l'athlète soit en quelque sorte confus à propos de sa technique et de comment s'y prendre pour exécuter cette habileté. La véritable question est de savoir s'il était conscient ou non de la proximité du tremplin ou s'il a été surpris. Il faut voir comment il réagira après cet accident et comment ça l'affectera la prochaine fois où il exécutera ce plongeon. Ce sont les choses qu'on ne sait pas.»

Pour l'instant, il apparaît «hautement improbable» que Despatie prenne part au Grand Prix de Madrid, qui se déroulera de vendredi à dimanche. Geller s'interroge aussi déjà sur le bien-fondé d'une participation possible du triple champion du monde au Grand Prix de Bolzano, la semaine prochaine en Italie, la dernière compétition préparatoire avant les Jeux olympiques de Londres, qui s'ouvriront le 27 juillet.

Cette blessure survient au milieu d'une dernière année déjà mouvementée pour Despatie, qui a fêté son 27e anniversaire vendredi, la veille de son départ pour l'Espagne. L'été dernier, il a raté les Championnats du monde de Shanghai pour soigner une bursite et une tendinite au genou gauche.

Après neuf mois hors des bassins, il a assuré sa qualification olympique lors de la compétition de la dernière chance, la Coupe du monde de Londres, en février. Affûté comme jamais à la suite d'un entraînement à sec effréné, il a causé une surprise de taille en gagnant le bronze dans la capitale britannique.

Les dernières séances avant son départ pour l'Europe ont été très concluantes. «Il m'a appelé pour me dire qu'il avait eu la meilleure semaine d'entraînement de sa vie», a dit sa mère.

Despatie n'en est pas à son premier accident en plongeon. En mars 2005, aux championnats canadiens à l'Université Laval, il a eu la peur de sa vie quand sa tête a frôlé la plateforme de 10 mètres sur un triple saut périlleux renversé. Ce sont ses orteils qui ont finalement touché au béton, et il a atterri sur le ventre, se blessant à la mâchoire et à une jambe. Ce fut sa dernière compétition à la tour. Quatre mois plus tard, il a gagné deux médailles d'or au tremplin aux Mondiaux de Montréal.

Quatre mois avant les Jeux de Pékin, où il a gagné l'argent au 3 m, Despatie a également eu peur en se fracturant un pied lors d'un échauffement. En Chine, des maux de dos ont aussi mis en péril sa participation. «Alexandre prend toujours le chemin difficile. Je pense qu'il a pris le plus difficile cette année», a commenté Mme Despatie, inquiète de la condition de son fils.

Geller doute fort que cette dernière blessure compromette la présence de Despatie aux Jeux de Londres. «Il a amplement de temps pour se remettre, a-t-il jugé. La question est de savoir comment cela affectera son niveau de confiance. Impossible d'y répondre. Ce qu'on sait, c'est qu'Alex a fait face à l'adversité à maintes reprises dans le passé. Il est probablement le meilleur athlète pour composer avec la situation.»