Comme à l'habitude, Steve Bégin avait pris place dans les derrières rangées de l'avion. Lorsque l'appareil s'est posé à Philadelphie, il a donc été, comme à l'habitude, l'un des derniers à sortir.

Sauf que jeudi, Guy Carbonneau lui a fait un signe discret au moment où il allait débarquer.

«C'est là que ça a déboulé, a raconté Bégin. Carbo m'a annoncé la nouvelle, puis j'ai aussi parlé à Bob Gainey.

«Je l'ai remercié, je suis allé saluer les gars, puis j'ai pris une navette pour essayer d'attraper un vol qui devait partir une demi-heure plus tard. Une chance que le vol a eu un peu de retard parce que je courais dans l'aéroport.

«Je n'ai pas eu le temps de respirer. Tout le monde m'appelait. Et j'ai dû recevoir 100 messages-texte.»

Bref, une journée de fou pour Bégin, sa dernière en tant que membre du Canadien.

Comme il arrive souvent dans des moments aussi émotifs, ce n'est que plus tard qu'il a pris la pleine mesure de ce qui lui arrivait.

«Je suis arrivé vers la fin de la troisième période du match des Stars, a poursuivi Bégin. Je suis allé manger puis je me suis couché. Sauf qu'au milieu de la nuit, je ne dormais plus. C'est à ce moment-là que j'ai vraiment réalisé ce qui se passait.

«C'est spécial...»

Le joueur originaire de Trois-Rivières a vu son association avec le Tricolore prendre fin après six années. Six années au cours desquelles il est devenu une coqueluche des amateurs par son style de jeu dévoué, par l'intensité et les dents qu'il a laissées sur la patinoire, et par sa présence constante dans la communauté.

«Un de mes amis m'a suggéré d'aller lire les babillards des différents sites internet, a mentionné Bégin. C'est fou. Les fans parlent de moi en mentionnant que j'ai du coeur, que j'ai de la classe... C'est le fun de lire des choses de même.

«Je ne peux rien faire d'autre que les remercier. En six ans à Montréal, je n'ai jamais eu de problèmes avec personne. Je me suis senti apprécié et les amateurs m'ont toujours encouragé.»

Jamais assez préparé

Le vétéran de 30 ans refuse de dire qu'il est à la croisée des chemins, même si les décisions de Guy Carbonneau tendaient à suggérer le contraire.

«Je vois cet échange comme un nouveau départ, un nouveau souffle. C'est sûr que j'aurais aimé avoir plus de chances. Il y a des joueurs qui ont l'air d'avoir plusieurs vies, mais ça n'a pas été mon cas.

«Carbo avait peut-être fait un X sur moi et voulait passer à autre chose.»

Dans les circonstances, Bégin a apprécié les démarches de Bob Gainey pour l'accommoder.

«Bob a été très respectueux. J'ai beaucoup de respect pour lui. Avec mon agent, on avait déterminé que je n'avais plus d'avenir avec le Canadien.

J'avais été laissé de côté lors des cinq derniers matchs et Bob lui-même ne savait pas quand je pourrais jouer de nouveau.

«Donc j'étais prêt à partir. J'avais d'ailleurs dit à ma femme que je ne pensais plus être ici dans une semaine, après la date-limite des transactions.

«Mais tu as beau te préparer, tu ne l'es jamais assez...»

Mercredi, le DG était venu s'entretenir avec Bégin durant l'entraînement de l'équipe à Brossard. Mais ce n'était pas pour lui dire qu'il avait une transaction sur la table.

«C'était plutôt pour me dire qu'il faisait des démarches, qu'il avait passé le mot aux autres équipes, mais qu'il n'y avait pas grand-chose qui se passait jusque-là.»

Retrouvailles rapides

Avec les Stars, Bégin rejoindra une organisation sérieuse qui a redressé la barre après un début de saison misérable.

Il retrouvera aussi des visages connus comme ceux de Mike Ribeiro et Stéphane Robidas.

«Il n'y avait pas de meilleur endroit que Dallas où m'envoyer, admet Bégin. Mais dans le meilleur des mondes, je serais resté à Montréal et je jouerais.»

Le 8 mars prochain, les Stars recevront le Canadien à Dallas. Disons que les retrouvailles viendront vite!

«C'est sûr que ce sera émotif, convient Bégin. Je vais me retrouver devant mes chums, c'est la première fois qu'une telle chose va m'arriver...»