L'Autrichien Dietrich Mateschitz a eu un sacré culot, en 1987, quand il a lancé sa boisson énergisante. Il avait ramené l'idée d'Asie, s'était trouvé un associé et avait investi toutes ses économies dans une usine.

Une étude de marché ne lui avait pourtant accordé aucune chance de succès: sa boisson était infecte, la couleur était repoussante et ses prétendues qualités nutritionnelles étaient pour le moins douteuses.

Vingt ans plus tard, Mateschitz est entré dans le club sélect des milliardaires et plus personne ne met en doute son génie du marketing. La réussite de Red Bull repose entièrement sur l'image rebelle de la marque et même les avertissements des experts sur les dangers de la boisson ne contribuent qu'à la rendre encore plus populaire.

Rejetant les publicités traditionnelles et misant sur la rumeur, le bouche à oreille et surtout sur le pouvoir de l'internet et des médias sociaux, Red Bull est rapidement devenu un produit-culte.

C'est Mateschitz lui-même qui a eu l'idée d'associer des sportifs à la marque, beaucoup de spécialistes des sports extrêmes, évidemment, mais aussi des athlètes olympiques. Les Québécois Erik Guay et Sébastien Toutant sont du lot depuis quelques années, Alex Harvey s'est ajouté à la liste récemment.

Tous ces champions n'avaient probablement pas consommé la fameuse boisson avant leur compétition, si on en croit les études sur les ingrédients. On a en effet trouvé dans le Red Bull un véritable cocktail de vitamines, une forte dose de caféine, du glucoronolactone (un glucide) et de la taurine. C'est généralement la présence des deux dernières substances qui est décriée, car on ne connaît pas leurs effets à long terme sur l'organisme.

Les responsables du marketing de la marque préfèrent d'ailleurs insister sur la stratégie sportive de la marque, comme si le parrainage des athlètes procurait une garantie quant à la salubrité du produit.

Red Bull investirait près de 30% de son chiffre d'affaires (plus de 700 millions) dans le marketing et les retombées sont spectaculaires. La Formule 1 est l'exemple même de cette stratégie qui procure une visibilité planétaire à Red Bull, à la télé et dans tous les grands médias, sans avoir à verser un centime aux réseaux, aux journaux, aux magazines ou aux sites spécialisés.

Le prochain défi sera toutefois de conserver cette image hors normes alors qu'on approche des 20 milliards de canettes vendues. Parvenu au sommet, Red Bull pourra-t-il rester un produit «cool»?

Les concurrents, qui ont copié la recette et la stratégie, se multiplient et si aucun n'a encore approché, même de loin, le succès de l'original, ils ne manquent ni de moyens ni d'arguments.

Red Bull a entrepris une diversification, avec d'autres boissons notamment, mais les profits de l'entreprise reposent encore exclusivement sur la canette argent et bleu. Et tout indique que le sport restera le vecteur dominant d'une stratégie de marketing qui est maintenant enseignée dans toutes les grandes écoles du monde entier.