Si le Grand Prix de Formule 1 ne revient pas à Montréal l'an prochain, ce ne sera pas faute d'avoir essayé. Deux ministres et le maire Gérald Tremblay en délégation à Londres, le milieu touristique aux abois, des restaurateurs prêts à puiser dans leurs goussets pour sauver l'événement. Le richissime Guy Laliberté qui négocie en haut lieu. Au tour de Bernie Ecclestone, aujourd'hui, d'ouvrir son jeu.

Associations régionales, syndicats, mairies : les groupes du Québec sont presque tous en faveur d'une intervention de l'État pour sauver le Grand Prix du Canada. Mais le citoyen ordinaire n'est pas si chaud à l'idée d'un investissement massif de fonds publics, révèlent les résultats de la question du jour posée hier sur Cyberpresse.

Une part du suspense entourant la tenue éventuelle du Grand Prix de Montréal en 2009 prendra fin ce soir. Les ministres provincial et fédéral responsables de la région de Montréal, Raymond Bachand et Michael Fortier, et le maire de Montréal, Gérald Tremblay, feront le point de leur rencontre avec Bernie Ecclestone, qui aura lieu aujourd'hui à Londres.À la veille du verdict de cette rencontre fort attendue, les appuis envers le plan de sauvetage de la course de Formule 1 (F1) ont émané de toute part, hier.

« Si Gérald Tremblay me le demande, j'irai à Montréal pour l'appuyer, a affirmé le maire de Québec, Régis Labeaume, en entrevue téléphonique avec La Presse. Le Grand Prix de Montréal, même si c'est Montréal, est important pour tout le Québec. »

Selon M. Labeaume, la course de F1 « met le Québec sur la carte ». « Et la ville de Québec est seulement à deux heures de Montréal », a-t-il rappelé.

Même son de cloche chez les associations touristiques régionales, qui mettent de côté la rivalité entre Montréal et les régions. « L'événement lui-même rapporte beaucoup plus à Montréal, mais ça positionne l'ensemble des régions du Québec comme destinations haut de gamme », a dit Jocelyn Carrier, président des Associations touristiques régionales associées du Québec. Son organisation représente 21 des 22 associations touristiques de la province.

« Tout ce qui est bien pour Montréal est bien pour les régions, et vice-versa », a abondé Robert Coulombe, président de l'Union des municipalités du Québec.

Le trésorier de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Pierre Patry, a souligné « l'importante incidence du Grand Prix sur l'industrie touristique ». « Cela étant dit, a-t-il précisé, il faut tout de même s'assurer que les retombées économiques pour les gouvernements couvriront les frais qu'ils débourseront. »

Selon les chiffres qui circulent, Bernie Ecclestone demanderait 30 millions par année. Les retombées directes (billets, publicité...) sont évaluées à environ 15 millions. Quant aux retombées fiscales, Tourisme Montréal évalue qu'Ottawa et Québec touchent environ 30 % du total des retombées économiques, qui s'élèvent entre 75 et 100 millions.

Le public en désaccord

La population semble moins chaude à l'idée que les gouvernements investissent massivement dans le Grand Prix. C'est du moins l'avis des utilisateurs de Cyberpresse qui ont répondu hier à la question suivante sur notre site web : « Êtes-vous d'accord pour que les gouvernements paient 30 millions$ pour sauver le Grand Prix ? »

En fin d'après-midi, 77 % des 4037 réponses reçues étaient défavorables. Seulement 20 % étaient favorables à l'investissement, et 4 % ont dit ne pas avoir d'opinion.

Avant son départ pour Londres, hier matin, le ministre du Développement économique, Raymond Bachand, s'est montré rassurant sur le plan économique. « Si (Bernie Ecclestone) veut une rente équivalente à celle des Émirats arabes unis, il n'y aura pas de Grand Prix à Montréal. C'est aussi simple que ça, c'est l'argent des contribuables. »

Mais « si les paiements sont raisonnables, on pourrait avoir une entente », a dit le ministre, rappelant que le Grand Prix rapportait de l'argent à l'État.

Des écologistes mitigés

Les groupes écologistes interrogés hier étaient les seuls à exprimer des réserves sur le sauvetage du Grand Prix du Canada.

« Pour les gouvernements, il y a des dossiers plus urgents », a dit Arthur Sandborn, responsable de la campagne Climat et énergie de Greenpeace. L'écologiste a souligné que les courses automobiles et le transport des voitures sont des activités « très polluantes ».

Steven Guilbeault, porte-parole d'Équiterre, préfère que le Grand Prix ait lieu au Canada que dans des pays où les normes environnementales sont déficientes. « Mais est-ce que ça vaut 30 millions ? On pourrait faire beaucoup avec cette somme », a plaidé M. Guilbeault.

- Avec Malorie Beauchemin