À la surprise générale, l'équipe canadienne de water-polo féminin ne s'était pas qualifiée pour les Jeux olympiques de Pékin. Une expérience douloureuse que les joueuses ne veulent pas revivre quatre ans plus tard.

Joëlle Békhazi avait le sort de son équipe au bout de sa main droite. À la 19e ronde d'une interminable séance de tirs de barrage, elle devait marquer pour maintenir le Canada en vie dans cette finale des Jeux panaméricains de Guadalajara, au Mexique, en octobre. Son tir a frappé la barre transversale avant d'atterrir sur la ligne des buts.

Transie de froid après deux heures dans l'eau, la vision brouillée par le chlore, Békhazi a compris que le ballon n'était pas rentré en se retournant et en voyant les Américaines se réjouir. Ces dernières assuraient leur qualification pour les Jeux olympiques de Londres. Les Canadiennes devaient encore attendre leur tour.

«Je suis devenue toute molle et j'ai coulé presque au fond de la piscine. Je n'y croyais pas», a raconté l'attaquante de Pointe-Claire, rencontrée la semaine dernière à la piscine du Centre sportif du Parc olympique.

Ses coéquipières l'ont ramenée à la surface pour la consoler. Personne n'allait la blâmer. Le Canada avait mené pendant trois quarts et demi et les occasions de sceller l'issue de ce match exceptionnellement serré ont été multiples. Comme ce tir de pénalité avec 18 secondes à faire qui a aussi atterri sur le poteau.

Même si elle a mis quelques semaines à retrouver sa confiance sur la ligne de 5 mètres, Békhazi a tourné la page. Comme ses coéquipières. «Je suis mauvaise perdante et c'est l'un des matchs dont je suis le plus fière», dit la capitaine Krystina Alogbo.

Heureusement, l'équipe de l'entraîneur-chef Pat Oaten a eu une autre occasion de se qualifier. Ça se passera à Trieste, en Italie, à partir de dimanche. Le Canada ouvrira le tournoi regroupant neuf équipes dans un match de poule contre le Kazakhstan. Les quatre pays demi-finalistes obtiendront leur billet pour Londres. En clair, cela veut dire gagner le match de croisement entre les groupes A et B, vendredi. Dans un monde idéal, le Canada n'affronterait pas l'Italie, Oaten craignant que l'équipe locale ne soit favorisée par l'arbitrage.

Il y a quatre ans, toujours en Italie, l'équipe canadienne s'était heurté à un mur. Persuadée de se qualifier, la jeune formation s'était butée à la Grèce, qui l'avait emporté 5-2. «On y pense chaque jour», dit Alogbo.

Même si elle était blessée à l'époque, Békhazi s'en souvient comme si c'était hier. À la simple mention de ce tournoi, ses yeux s'embuent et sa gorge se noue. «On ne veut plus jamais ressentir cette douleur-là», dit l'athlète de 23 ans.

Elle s'excuse et essuie quelques larmes. Les dernières semaines ont été chargées d'émotion. Elle a regardé à la télévision la compétition de sélection de l'équipe de natation. Plusieurs des nageurs sont des amis et s'entraînent dans la même piscine. «Nous, on n'est pas encore qualifiées. Et je veux tellement le faire...»

Membre de l'équipe depuis 2005, la Montréalaise Dominique Perreault est persuadée que le groupe a acquis la maturité nécessaire pour décrocher la qualification olympique.

«On sait mieux gérer nos émotions, nos défaites et nos victoires», affirme la gauchère de 27 ans, médaillée de bronze aux Mondiaux de Montréal, en 2005, et d'argent à Rome, en 2009.

Aux derniers Championnats du monde de Shanghai, l'été dernier, le Canada a été éliminé en quart de finale par la Chine, future médaillée d'argent, et a dû se contenter du huitième rang.

La discipline, la qualité de l'avantage numérique et la faculté de s'adapter aux changements tactiques des adversaires seront des facteurs-clés, selon les joueuses.

«Honnêtement, sur papier, on est la meilleure équipe, tranche Alogbo. On devrait pouvoir gagner les matchs par quatre-cinq buts. On est imbattables.»

Oaten n'en pense pas moins, même s'il préfère afficher une saine prudence. À ses yeux, le tournoi de qualification s'annonce plus chaud que celui des Jeux olympiques. La Grande-Bretagne, un second couteau en water-polo, étant sélectionnée d'office comme pays hôte, toutes les puissances européennes doivent passer par la qualification. «Si les choses vont bien en Italie, je pense qu'on sera sur le podium à Londres», prédit l'entraîneur.