La flamme olympique est arrivée à Brasilia mardi, première étape d'un parcours dans tout le Brésil jusqu'aux JO de Rio en août, un acte symbolique dans la capitale qui pourrait être le dernier de Dilma Rousseff en tant que présidente.

Dorénavant, durant trois mois et à travers plus de 300 villes, la célèbre torche passera par des rituels indigènes, voguera à bord d'un canoë, fera du cheval, sera suspendue à un hélicoptère ou plus simplement portée à pied par l'un des 12 000 relayeurs, jusqu'à son arrivée le 5 août dans le mythique stade Maracana de Rio, ouvrant les premiers JO en terre sud-américaine.

C'est Fabiana, capitaine de l'équipe du Brésil féminine de volley double championne olympique en titre, qui a été sa première relayeuse.

Mme Rousseff a allumé la torche avec le feu provenant du site antique grec d'Olympie. «Nous traversons une période très difficile, vraiment critique de l'histoire du pays et de l'histoire de la démocratie mais le Brésil saura offrir le meilleur accueil aux athlètes et aux visiteurs étrangers», a-t-elle affirmé.

Mais elle risque de ne pas assister ès qualités aux Jeux: elle sera mise à l'écart du pouvoir, pendant 180 jours au plus, si le Sénat le décide à la majorité simple, dans le cadre d'une procédure en destitution, ce qui est vraisemblable selon les pointages de la presse brésilienne.

A l'issue de son procès devant les sénateurs pour avoir maquillé les comptes publics, un vote des deux tiers sera requis pour la destituer.

Trêve olympique?

En cas de mise à l'écart provisoire et/ou définitive, elle serait remplacée par son vice-président, Michel Temer, leader du premier parti du pays, le PMDB, qui faisait partie jusqu'en mars de la coalition gouvernementale. Mme Rousseff l'a traité de «traître» et principal conspirateur du «coup d'État» parlementaire dont elle se dit la victime.

Cette ex-guérillera de 68 ans, qui fait face à une dynamique politique puissante (une majorité écrasante de députés avaient avalisé le processus de destitution) et à une impopularité personnelle record, a prévenu qu'elle se battrait jusqu'au bout.

Mais elle semble empêtrée dans une ambiance de fin de règne et a, selon le quotidien Folha de Sao Paulo, «donné l'ordre de vider ses tiroirs».

Et l'étau judiciaire se resserrait sur les proches de la présidente: mardi soir, le procureur général du Brésil a demandé à la Cour suprême d'ouvrir une enquête sur trois de ses ministres et surtout sur son prédécesseur et mentor, Luiz Inacio Lula da Silva, dans le cadre du scandale de corruption Petrobras.

Dans l'Antiquité, l'arrivée de la flamme annonçait une trêve afin que les athlètes puissent se rendre au tournoi d'Olympie. Mais signe de la tension politique, les premiers relais ont été marqués par quelques pancartes exhibées par des manifestants.

La chef de l'État a joué son va-tout en lançant l'idée d'une élection présidentielle anticipée.

«Le soutien augmente au sein» du Parti des travailleurs au pouvoir (PT, gauche) pour un scrutin anticipé le 2 octobre quand se tiendront les municipales dans le pays, et «les sondages montrent que la population souhaite» cette solution, a déclaré le sénateur Paulo Paim (PT) au journal O Globo.

Plaies 

Mme Rousseff réfléchirait à une démission assortie d'une réforme constitutionnelle convoquant de nouvelles élections. Cette initiative semble avoir peu de chances de trouver un écho favorable au Congrès, vu le faible soutien parlementaire de la présidente, mais pourrait lui servir à mettre la pression sur M. Temer.

Celui-ci, dont des proches sont également dans le collimateur de la justice, ne pèse que un à 2% des intentions de vote, selon un récent sondage. Mme Rousseff, elle, rappelle sans cesse qu'elle a recueilli 54 millions de suffrages, et accuse son vice-président d'utiliser l'arme de la destitution pour s'emparer du pouvoir sans passer par les urnes.

Mais si le Sénat baisse le pouce, il n'y aura plus de rendez-vous olympique pour elle. Elle serait alors «très triste», parce qu'elle a «déployé de grands efforts pour la tenue de ces Jeux», a-t-elle dit dernièrement sur CNN.

La crise économico-politique a totalement éclipsé la préparation des Jeux dans le pays.

Une épidémie de zika, virus entraînant la malformation cérébrale de bébés quand il touche la mère enceinte, et des hausses de dengue, de H1N1 et de chikungunya, ont également assombri l'horizon olympique.