Après Alexandre Despatie, le déluge? Peut-être pas, mais il risque d'y avoir des nuages gris dans le ciel quand le Lavallois de 25 ans prendra sa retraite, peut-être aussi tôt qu'après les Jeux olympiques de 2012.

Car on ne remplace par un athlète de cette trempe du jour au lendemain. En fait, on ne le remplacera peut-être jamais.

«Dans l'histoire du plongeon, il n'y a eu que très peu d'athlètes comme Alexandre, a fait remarquer Arturo Miranda, entraîneur de l'équipe canadienne de plongeon et ancien coéquipier de Despatie. Peut-être quatre ou cinq. Il y a eu Greg Louganis, Dmitry Sautin et quelques Chinois, dont Chong He... Ils sont tellement exceptionnels dans leur sport.

«Combien de Tiger Woods avons-nous eu, combien de Diego Maradona? ...C'est quelque chose d'unique.»

Il faudra bien remplacer un Despatie un jour. Celui-ci le reconnaît d'emblée, il aura «une grande décision» à prendre après les Jeux de Londres.

«Après 2012, ça va faire 23 ans que je plonge et il va falloir que je commence à penser sérieusement à ce que je veux faire après, avait indiqué Despatie à La Presse Canadienne à l'approche des Jeux du Commonwealth de New Delhi. Je ne dis pas que c'est officiel que je vais prendre ma retraite après 2012, mais c'est certain que si je continue après ça, ce sera une année à la fois.»

Le jour où Despatie prendra sa retraite, Plongeon Canada aura un grand trou à combler. Ce sera d'ailleurs la même chose quand Émilie Heymans, de Greenfield Park, décidera de quitter.

Selon Miranda, il sera injuste de demander à ceux et celles qui suivront - tels que Riley McCormick, 19 ans, et Reuben Ross, 24 ans, chez les hommes, ainsi que Jennifer Abel, 19 ans, chez les femmes - de maintenir le même niveau d'excellence. Parce que Despatie et Heymans ont atteint un niveau de performance qui va au-delà des attentes du plus exigeant des entraîneurs.

«Nous avons commencé à travailler là-dessus», a indiqué Miranda, cette semaine pendant les Jeux du Commonwealth, au cours d'un entretien au Complexe aquatique Dr S.P. Mukherjee de New Delhi. On pense déjà au fait qu'Alex et Émilie vont quitter. Ce sera la fin d'une ère. Nous devons juste nous préparer pour la prochaine.

«Déjà, Plongeon Canada a embauché Michel Larouche pour voyager au pays et former des entraîneurs, qui pourront mieux développer nos athlètes au sein des clubs.»

Miranda a dit ne pas connaître encore les plongeurs de la relève chez les hommes puisqu'il consacre tout son temps à l'équipe senior à Montréal. Mais il soupçonne qu'on entendra moins souvent l'hymne national canadien, dans les cérémonies d'après-compétition, quand Despatie ne fera plus partie de l'équipe masculine.

«Il va y avoir une période creuse, en espérant qu'elle ne soit pas trop longue, a dit Miranda. Il s'agira d'essayer de faire sa place parmi les 12 premiers, et de bâtir à partir de là.

«Le plongeon, c'est un sport où ça prend du temps avant de devenir bon. On a vu Alex exceller à 13 ans mais les plongeurs, on le voit partout au monde, se développent plus tard - dans la vingtaine, vers la fin de l'adolescence.

«Il y a plus de profondeur chez les femmes, mais reste qu'on n'a pas une Blythe Hartley ou une Émilie Heymans qui se profile à l'horizon. Je dirais quand même que ce sera un peu plus compétitif de ce côté.

«Je pense que Jennifer Abel va être là pendant un bout de temps, a ajouté Miranda. Elle a une bonne puissance et beaucoup de talent. Elle devrait remporter des médailles dans le futur.»

Abel a d'ailleurs commencé à le faire dans le présent, elle qui a remporté sa troisième médaille des Jeux du Commonwealth, mercredi, quand elle a raflé l'argent au 3 m.

En profiter pendant qu'on peut

D'ici l'heure de la retraite, les plongeurs de la relève pourront continuer de profiter de l'influence positive d'un Despatie et d'une Heymans. Ce sera le cas d'Abel, qui s'entraîne avec Heymans au centre national de Montréal, et de Ross, un double médaillé à New Delhi qui est déménagé au Québec afin de s'entraîner à temps plein avec Despatie, son partenaire au 3 m synchro.

«Leur présence permet aux autres plongeurs de maintenir un haut niveau de compétition, ça les force à tenter de les rattraper», a souligné Miranda.

Les jeunes plongeurs gagneront aussi à voir l'attitude qu'un Despatie adopte avant et pendant les compétitions.

«Alex est un grand compétiteur. C'est ce qui le rend si bon, a indiqué Miranda. Il est très doué physiquement, mais il y a d'autres plongeurs qui sautent plus haut que lui, ou qui réussissent des rotations plus rapides. Au plongeon, ce n'est pas celui qui saute le plus haut, c'est à quel point tu peux réussir à faire ce que tu dois faire, au moment où tu dois le faire. Alex est très bon à ce niveau, il l'a démontré toutes ces années.»