Pauline Loctin apprivoise le papier avec doigté. Ses pliages artistiques, sous forme de décorations murales ou de lanternes, apportent une touche de sensibilité à l'habitat moderne. Rencontre  dans l'atelier montréalais de Miss Cloudy  aux couleurs de l'arc-en-ciel.

Rayonnante malgré la grisaille hivernale, Pauline Loctin, alias Miss Cloudy, plie une feuille de papier au grain épais avec une rigueur et une rapidité impressionnantes. Quelque 80 plis sont nécessaires pour cette décoration Happy Wall en 3D. Un fragment délicat vendu (sous cadre) à la boutique en ligne de la marque. «J'ai intitulé cette collection, présentée l'automne dernier à la galerie-boutique Bref, dans le Mile End, en souvenir d'une dame qui m'a confié que mes origamis la rendaient heureuse», dit-elle en souriant.

Jusqu'alors, les pliages géants de Pauline habillaient des boutiques, des musées ou des hôtels pour des événements glamour. L'installation conçue pour la thématique papier de la galerie Bref orne d'ailleurs un mur de son nouveau studio investi en octobre dans l'espace créatif Artgang.

C'est un cadeau qui a fait rebondir Pauline, titulaire d'une maîtrise en musicologie et violoncelliste, de notes de musique en plis pointus. Pendant l'été 2014, un ami lui offre pour ses 30 ans un livre sur les techniques de pliage destiné aux designers qu'elle a glissé dans sa valise les vacances venues. «Je rentrais voir mes parents en France et je voulais faire une pause d'internet, explique-t-elle. Je me suis installée sur la terrasse et j'ai enchaîné les pliages.»

Dès lors, le papier est devenu le mode d'expression privilégié de Pauline qui, grâce à de nombreuses lectures et à un entraînement constant, est aujourd'hui experte en origamis et en a même fait un métier. «La théorie est simple, puisqu'on répète deux plis: la montagne, en pointe, et la vallée, en creux, mais il faut beaucoup d'entraînement pour se perfectionner. La musique, qui est une discipline exigeante, m'a beaucoup aidée», confie-t-elle.

Objets plissés

Si l'origami, originaire d'Asie, bénéficie d'une belle reconnaissance hors de la bulle enfantine en Europe, au point d'inspirer les designers de meubles et d'objets pour la maison, ce n'est pas encore le cas en Amérique du Nord. 

«J'ai la chance d'être à peu près la seule "paper artist" à Montréal.»

L'une de ses principales tâches consiste à informer les gens des infinies possibilités de celui-ci. Il lui faut aussi gommer l'étiquette fragile du papier. Elle le mouille, le tord, le façonne...

Photo Marco Campanozzi, La Presse

L'atelier lampes Folding' Light apprend à confectionner des abat-jour et lanternes dans la couleur de son choix.

Pour ses décorations Happy Wall, elle utilise plusieurs sortes de papier aux qualités et finis variés. «J'emploie notamment du washi, au toucher proche du tissu, et un papier traditionnel fabriqué à partir de l'écorce de lokta, un arbuste qui pousse sur l'Himalaya, sur lequel les gens consignent leur documentation depuis toujours.»

Miss Cloudy donne par ailleurs des ateliers en petits groupes dans son studio. L'initiation (Fold 'N' Paper) permet de se faire la main et de confectionner des vases et cache-pots. L'atelier lampes (Folding' Light) apprend, quant à lui, à confectionner des abat-jour et lanternes dans la couleur de son choix. Bourgogne? Rose quartz? Vert sauge? Bleu électrique? Pauline en pince également pour la mode; il y a de grandes chances de trouver chez elle des nuances pile-poil dans la tendance.

Photo Marco Campanozzi, La Presse

Une création de l'atelier lampes Folding' Light