Même si la technologie prend de plus en plus de place dans nos maisons, les carnets et outils de planification en papier ne sont pas près de céder leur place sur nos bureaux ou nos comptoirs de cuisine. La papeterie connaît même un petit âge d'or, et les créations québécoises s'y taillent une belle place.

Le plaisir d'écrireEn ce lundi après-midi de veille de rentrée, la boutique Boucle & Papier ne dérougit pas. Les clients entrent et sortent sans relâche à la petite papeterie du Mile End pour faire le plein de carnets, d'agendas, de crayons, de papier d'emballage, de cartes de souhaits...

À l'approche de l'automne, les agendas et les planificateurs hebdomadaires remportent un vif succès, affirme Jessyca Houle, propriétaire du magasin sis boulevard Saint-Laurent. «Les gens utilisent encore beaucoup d'outils d'organisation papier», observe-t-elle. Et d'ailleurs, elle est la première à partager cette passion avec ses clients. «Le papier, pour moi, c'est important. J'ai toujours un agenda, j'ai toujours un cahier.» Les notes de cette entrevue ont d'ailleurs été écrites à la main... ce qui tend également à lui donner raison!

Si la technologie vient à notre secours la plupart du temps, elle ne permet toutefois pas d'avoir une vue d'ensemble de nos tâches. «Plus les gens utilisent leur laptop, plus ils ont besoin d'un outil qui est complémentaire», croit l'illustratrice Mélanie Ouellette, cofondatrice avec son conjoint Brice Salmon de la marque montréalaise Baltic Club.

«Oui, on a presque tous notre agenda sur notre téléphone. Mais pour planifier la semaine et les to-do, c'est agréable de l'avoir visuellement.»

Le tandem vient justement de conclure un partenariat avec Vanessa Sicotte, de Damask & Dentelle, pour créer un agenda de l'année 2018. La blogueuse a pondu les textes, alors que les illustrations sont signées Baltic Club.

Petit engouement

Chez Boucle & Papier, la boutique a triplé son stock en deux ans d'existence, ce qui confirme l'engouement, constate Jessyca Houle. «La vente de papier en ligne, ce ne sera jamais comme les vêtements. Parce que souvent, ce sont des achats plus spontanés, et les gens veulent les voir, y toucher.»

Pour la jeune femme d'affaires, c'est avec les cartes de souhaits que tout a commencé. Pour la petite histoire, sa mère a gardé toutes ses cartes d'anniversaire depuis sa naissance! «C'est parti de là et, par la suite, je me suis dit: il faut bien en vivre. Donc, de fil en aiguille, tout le côté papeterie s'est ajouté.»

Chez Baltic Club, on faisait également des cartes avant d'élargir l'offre aux carnets, aux affiches et même aux épinglettes. Mélanie et Brice viennent d'ailleurs d'ouvrir une boutique, également boulevard Saint-Laurent, tout près de la rue Bernard.

«C'est arrivé presque par accident, explique Brice Salmon avec un sourire. On cherchait un autre local, parce qu'on avait acheté du nouvel équipement qui ne rentrait pas dans notre atelier. Alors tant qu'à faire, on a pris pignon sur rue.» Les entrepreneurs y ont aussi vu une occasion de se rapprocher de leur communauté, et ils en profitent pour donner des ateliers de fabrication de carnets.

C'est justement dans le même local, derrière l'espace boutique, qu'ils conçoivent et confectionnent tous leurs produits. «On est les seuls dans ce domaine à Montréal à tout faire nous-mêmes, du design jusqu'à la vente finale», affirme Brice.

Leurs créations sont vendues dans une centaine de boutiques aux États-Unis, dont Home Goods. En contrepartie, une section de leur magasin montréalais est également consacrée à des marques «amies», qui viennent d'un peu partout et qu'ils se plaisent à faire découvrir aux passants.

Les choses vont si bien qu'ils songent déjà à une deuxième succursale, bien que la première ait ouvert ses portes en mai seulement.

«Un petit plaisir»

Les cartes vendues dans ce genre de papeterie sont plus chères que dans les grandes surfaces, mais elles demeurent abordables.

«C'est un petit plaisir qu'on peut se faire pour pas cher, autant si on a une mauvaise ou une bonne journée», croit Jessyca Houle, dont la grande majorité de la clientèle est d'ailleurs féminine.

«Parfois, s'offrir un nouveau cahier peut être synonyme d'un nouveau départ.»

Le papier a aussi un petit côté solennel, voire émotionnel. «Donner une carte, ça reste quelque chose de spécial», note Mélanie Ouellette.

Objets de collection

La tendance papeterie n'est sûrement pas près de s'éteindre, parce que les jeunes en sont très friands, selon Brice Salmon. Et surtout, ils ont tendance à collectionner ces beaux objets plutôt que de les utiliser! «Les cartes de souhaits, ils ne les envoient pas, précise le cofondateur de Baltic Club. Ils les gardent, ils les accrochent... Même chose pour les carnets de notes: souvent, ils n'osent pas écrire dedans, car ils ont peur de les abîmer.»

Une chose est certaine, ces jeunes sont séduits par l'aspect unique de ces créations. «Ce qu'on vend, il suffit d'aller sur l'internet et ils en trouvent à la pelle. Mais le fait d'avoir quelque chose de tangible, tout de suite, fait main, ici, ils aiment beaucoup», conclut Brice Salmon.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Les clients passent à la boutique Boucle & Papier, dans le Mile End, pour faire le plein de carnets, d'agendas, de crayons, de papier d'emballage et de cartes de souhaits.

Des marques d'ici

Baltic ClubBaltic Club est l'oeuvre de deux jeunes entrepreneurs montréalais, partenaires d'affaires et de vie. On reconnaît leur signature par leurs carnets aux motifs de marbre, ainsi que ceux marqués des illustrations de Mélanie Ouellette.

ArchipelPetits bateaux, petits robots, les motifs imaginés par Véronique Richard sont imprimés sur ses cahiers géométriques. Idéal pour une pensée bien structurée.

PaperoleLa petite entreprise montréalaise de cahiers, de cartes de souhaits et d'autres objets de papier fait appel à différents illustrateurs pour ses collections. Ici, Justyna Stasik a imaginé les cahiers foodie: à manger, à boire et pour se sucrer le bec.

Bien à vousJeanne Joly et Patricia Lanoie se sont connues en travaillant dans l'industrie de la musique. De cette rencontre est née leur petite entreprise Bien à vous, où elles créent une multitude de cartes de souhaits, mais aussi quelques carnets.

KayéDerrière les cahiers bilingues de Kayé se trouve Vanessa Girard, une ancienne de la boutique Lowell. Ces mini-carnets thématiques (cocktails, bouffe, voyages et plantes) permettent de garder le cap sur les petits gestes du quotidien: quand a-t-on arrosé les plantes pour la dernière fois? Est-il temps d'ajouter de l'engrais?

Couple d'idéesCouple d'idées, c'est un... couple, qui ne manque pas d'idées! Leurs cahiers ont tous un concept:  style chemise, moitié blanc, moitié ligné... sans oublier leurs quatre carnets qui totalisent 1 km d'écriture.

Merci aux boutiques Boucle & Papier et Baltic Club de nous avoir prêté les exemplaires des cahiers de notes.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse

Paperole

Quelques classiquesMême si on aime les nouveautés qui sortent de l'ordinaire, certains irréductibles préfèrent la sobriété quand il est question de carnets. Voici quelques classiques qui tiennent toujours leurs promesses.

Moleskine

La célèbre marque italienne n'a plus besoin de présentation. Les carnets possèdent plusieurs variations, mais le format classique compte une couverture rigide et un rabat élastique. On trouve même des boutiques Moleskine dans quelques grandes villes du monde.

Rhodia

On reconnaît habituellement les cahiers Rhodia à leur couverture orange couronnée de deux sapins. Mais la marque française - rachetée par Clairefontaine il y a 20 ans - innove aussi. Elle a notamment sorti une collection limitée au style rétro, dont on voit un exemplaire sur la photo.

Appointed

Appointed est une entreprise où tout est fait localement... à Washington! Leurs grands carnets ont des couleurs sobres sans être ennuyantes, et sont dotés d'un fini intéressant.

Rifle Paper Co.

Les motifs fleuris de cette entreprise floridienne ont fait le tour du monde. On les retrouve imprimés partout: sur les carnets, les cartes de souhaits, les étuis à iPhone, les bougies... Le couple derrière Rifle Paper Co. a même récemment établi une collaboration avec les souliers Keds.

Field Notes

Simples et utilitaires, les cahiers de Field Notes ont aussi un petit côté vintage. L'entreprise de Chicago se spécialise dans les carnets format poche, qui sont souvent vendus par trois. Ils tirent leur inspiration des cahiers de notes promotionnels autrefois donnés aux fermiers.

Shinola

La marque de luxe de Detroit est connue notamment pour ses montres et ses vélos, mais elle fabrique aussi des carnets. Comme le reste de ses produits, les cahiers ont une esthétique simple et irréprochable.

Photo Hugo-Sébastien Aubert, La Presse