Lucie Poirier et Jean-Michel Lopez se sont rencontrés il y a plus de trois décennies chez un verrier. «J'avais un voisin qui créait des lampes selon la technique Tiffany. Mon rêve était de faire de la beauté avec mes mains; alors un jour j'y suis allée, il m'a embauchée et il m'a formée», raconte Lucie.

Le hasard a voulu que cet artisan soit un ami de Jean-Michel: «Il m'a proposé d'apprendre le métier et c'est là que j'ai rencontré Lucie, qui était devenue professionnelle.»

De là est née l'histoire de ce couple animé par la passion de l'art du vitrail.

En 1982, ils partent en France où ils créent leur atelier, Le Château de Verre, et exposent leurs travaux dans plusieurs villes de l'Hexagone ainsi qu'en Suisse. De retour au Québec deux ans plus tard, ils s'installent en Estrie.

Des tableaux vivants

Si les vitraux évoquent généralement la splendeur des églises, ils s'intègrent à tout type de bâtiment. Au-delà de l'ornementation des portes et fenêtres, le vitrail peut créer des divisions entre deux espaces sans obstruer la lumière. Il permet aussi de préserver l'intimité, notamment dans une salle de bains. «Dans ce cas, on utilise des verres texturés. En fait, tout est possible, tant pour les formats que pour les styles. Victorien, Art déco, Art nouveau, contemporain... Tout dépend du lieu, des goûts et du budget de chacun.»

Richement détaillés ou simplissimes, les décors sont toujours sublimés par le savoir-faire des artisans, la noblesse du verre et les jeux de transparence.

«L'extérieur influence l'aspect du vitrail; son effet change selon le temps, la couleur des feuilles, la luminosité. C'est comme un tableau vivant différent chaque jour», dit Jean-Michel. 

Un montage façon casse-tête

La conception d'un vitrail nécessite six étapes. «On dessine d'abord le motif. Ensuite, on double le dessin sur un carton pour créer chaque morceau, un peu comme un patron de couture. Puis on dépose les morceaux sur le verre de couleur sur une table lumineuse pour en voir l'effet. Chaque élément est coupé à l'aide d'un couteau à verre et meulé pour assurer un parfait ajustement avant d'être serti d'un ruban de cuivre. Les segments de verre sont alors disposés sur le dessin de départ, à la façon d'un casse-tête. Quand tout est en place, on soude avec un alliage de plomb et d'étain. Cette soudure adhère sur le cuivre qui a serti chaque morceau sur les deux faces», explique l'artisan.

D'apparence délicate et fragile, le vitrail est pourtant très solide. «On garantit la structure et la décoloration à vie, car les verres artistiques choisis sont teintés dans la masse. Ça ne bougera jamais parce que le verre est serti et que la soudure en épouse l'épaisseur. On travaille selon la technique Tiffany, qui date du XIXe siècle. C'est aussi grâce à cette méthode très précise que l'on peut créer des motifs richement détaillés comme les bouquets de fleurs», explique Jean-Michel.

De l'imposte minimaliste ornant le haut d'une porte résidentielle aux lampes et aux coupes aux drapés uniques, en passant par les bijoux et les vitraux monumentaux qu'on retrouve au couvent des soeurs clarisses à Sherbrooke, ce couple à la fois artiste et artisan a trouvé son bonheur autour du verre. «On se trouve très chanceux de travailler dans le Beau, d'être en effervescence quand on crée parce qu'on fait les pièces ensemble et que c'est un renouvellement perpétuel. Les vitraux existent depuis des siècles et il en émane quelque chose de touchant», conclut Lucie.

PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, LA PRESSE

Sous forme d'imposte, de médaillon, d'ornement de porte ou de fenêtre, le vitrail anime tous les styles décoratifs et magnifie la lumière. Il suffit à créer une ambiance chaleureuse et à habiller un intérieur, si épuré soit-il. À partir de 125 $ le pied carré.