Tour de force: l'architecte Jean Verville a réussi à loger quatre «pièces» dans un minuscule espace de 7 m2. Un exercice d'optimisation qui lui a valu, en janvier, un Grand Prix du Design. Découvrez toutes les astuces de cet aménagement ultra pensé.

Jean Verville occupe, avec sa conjointe, l'artiste céramiste France Goneau, une maison de 82 m2 (880 pi2) dans le Plateau Mont-Royal. Passionné par les espaces ultracompacts et leur optimisation, l'architecte s'est attaqué à une toute petite chambre d'invités peu utilisée de sa propriété.

Transformée en « microespace modulable », cette pièce d'une superficie de 7 m2 (75 pi2) concentre aujourd'hui quatre fonctions : espace de travail, coin lecture, chambre d'appoint et salle d'exercices. Une transformation où tout a été soigneusement calculé. L'élément-clé de cette organisation ?

La polyvalence du mobilier, composé principalement d'une table murale à abattants, qui s'articule au gré des besoins des occupants. Autre idée forte : le camouflage. Ici, le mur du fond cache plusieurs armoires, un placard et un lit escamotable. Une fois le lit relevé, rien ne paraît, car la surface de la paroi verticale est entièrement couverte de fins panneaux miroir d'acrylique. Ce qui produit un jeu de réflexions qui agit sur la perception de l'espace et de l'aménagement. La table de travail semble plus longue qu'elle ne l'est en réalité, la fenêtre et une oeuvre d'art, du mur opposé, se réfléchissent sur la paroi...

Une sorte de trompe-l'oeil miroitant qui multiplie les perspectives, amplifie la luminosité et repousse les limites de la pièce, qui paraît plus spacieuse. Aussi, l'ensemble est dominé par le blanc, qui illumine les lieux.

Petits espaces, grandes idées

La vague des micromaisons (ou mouvement small house) pique de plus en plus la curiosité du milieu du design. De son côté, Jean Verville s'intéresse vivement, depuis des années, à l'architecture contemporaine au Japon et à ses petits habitats très fonctionnels. Le concepteur, connu pour sa démarche minimaliste, en est à son sixième séjour de recherche au pays.

«À chaque séjour, dit-il, j'ai tenté de saisir davantage pourquoi et comment les créateurs japonais excellaient à optimiser les espaces tout en les rendant efficaces et porteurs d'émotions.»

Lors de son plus récent séjour, en compagnie de sa conjointe France Goneau, l'architecte a partagé le quotidien d'un couple d'amis tokyoïtes ayant un jeune enfant, dans son micro-appartement pendant trois semaines. «Étonnamment, même si nous étions cinq à vivre dans un espace réduit, nous ne nous sommes jamais sentis à l'étroit, car le lieu avait été savamment réfléchi», raconte Jean Verville.

Respect du budget

L'optimisation de la surface habitable de la chambre d'invités a été effectuée tout en respectant le coût de construction estimé (3000$), grâce à l'utilisation de matières économiques, comme de fins panneaux miroir d'acrylique, des panneaux de mélamine, qui ont servi à fabriquer les armoires, et du contreplaqué russe. Celui-ci compose la table murale à abattants, la base du lit escamotable et la tablette qui permet de déverrouiller son mécanisme. «Si vous privilégiez des matériaux abordables, il importe alors de mettre davantage de temps dans la conception, souligne l'architecte, et de s'assurer que chaque détail sur les plans soit réalisé avec soin.»

Les microespaces

1. BUREAU

L'espace de cette minuscule chambre d'invités servait rarement. Aujourd'hui, cette pièce est utilisée pratiquement tous les jours en guise de bureau. La table murale à abattants fait 2,4 m (8 pi) de longueur et offre, lorsqu'elle est entièrement déployée, une surface de travail de 76 cm (30 po) de profondeur.

Le mur couvert de fins panneaux miroir d'acrylique (qui dissimule plusieurs espaces de rangement) produit un jeu de réflexions.

La table de travail semble plus longue, la fenêtre et l'oeuvre d'art de France Goneau, du mur opposé, se réfléchissent sur la paroi.

2. COIN LECTURE

À demi déployée, la table de travail devient un dossier permettant de transformer le lit escamotable déplié en coin-lecture. Une lampe articulée a été judicieusement installée pour lire ou travailler. Quant au matelas, il fait alors office de siège.

PHOTO FOURNIE PAR JEAN VERVILLE ARCHITECTE

PHOTO FOURNIE PAR JEAN VERVILLE ARCHITECTE

3. CHAMBRE D'APPOINT

Un lit escamotable à deux places se cache dans l'épaisseur du mur tapissé de miroir d'acrylique. Une chambre d'appoint peut ainsi être créée rapidement. Idée futée: une bande de circulation a été prévue, de chaque côté du lit, lorsque la table est complètement rabattue contre le mur. À demi dépliée, la table demeure assez profonde pour y laisser un ordinateur portable et des documents de travail. Elle peut aussi faire office de table de nuit.

4. SALLE D'EXERCICES

Une fois relevé, le lit escamotable libère le volume de la pièce durant le jour. Il suffit ensuite de rabattre complètement le plan de travail le long du mur pour dégager au maximum la surface au sol et ainsi obtenir l'espace nécessaire pour faire de l'exercice, comme du Pilates. De plus, le mur « miroir » permet de surveiller l'exécution de ses mouvements.

PHOTO FOURNIE PAR JEAN VERVILLE ARCHITECTE