Depuis plus de 40 ans, le tourneur sur bois Jean-Marc Parent fait évoluer son art. Son parcours est à l'image de ses cônes, ce prisme, symbole de la croissance personnelle, qu'il se plaît à transformer en objets de décoration. Il focalise son expérience vers un ultime sommet : permettre au bois de «parler».

Québec - M. Parent tourne le bois depuis 1969. «L'idée qu'on peut modeler le bois comme on veut, j'ai flashé là-dessus!», se souvient-il. Des coupes, des verres à bière, des objets d'art... Certaines pièces prennent quelques minutes à façonner, illustre-t-il, d'autres, quel­ques heures et d'autres, plusieurs jours. «De trois, quatre minutes à trois, quatre jours!»

L'artisan de Saint-Norbert-d'Arthabaska, dans le Centre-du-Québec, manipule ses pièces avec soin. Ses fines coupes ont en fait l'air aussi délicates que le cristal. On imagine tout de suite que le travail doit nécessiter une très grande minutie.

«C'est hyperdélicat, et ce n'est pas rien qu'à cause des outils : l'expérience se prend!» Et M. Parent en accumule depuis quatre décennies. «C'est pas parce qu'on aime courir qu'on va faire le marathon», avance l'autodidacte, toujours prudent. «Un verre à bière, ça prend 40 ans, plus trois heures, à faire», ajoute-t-il, badin.

Le pot avec couvercle est son récipient favori à tourner. Fait en trois parties, il est possible de lui donner plus de personnalité. «C'est la pièce qui offre le plus de possibilités!»

M. Parent emploie la technique «bout de grain» et sculpte ses pièces à l'intérieur d'une même bûche. «On doit faire extrêmement attention au bois, certains sont extrêmement craqueux.»

Arbres meurtris

Le Soleil a rencontré M. Parent à la Coopérative Vert-Tuyau dans le quartier Petit-Champlain, lors de sa journée de garde. Il y est un artisan coopérant, on y trouve donc plusieurs de ses pièces, surtout les plus petites. La coopérative est pour lui une oeuvre collective en soi; elle nécessite le travail créatif de tous les membres.

Jean-Marc Parent joue avec les essences. Il aime beaucoup le cerisier et l'ostryer de Virginie. «Tous les bois ont leurs caractéristiques. Ils parlent tous : il faut écouter ce qu'ils ont à dire.»

Ce sont surtout les bois meurtris qui lui parlent. M. Parent ne fait aujourd'hui que de la récupération : des branches mortes, du bois amassé lors de nettoyages d'érablière, des bûches qui ont séché quelques années.

Une branche qui a «mûri» depuis deux ans offre souvent d'agréables surprises. Surtout si les vers et les champignons s'en sont mêlés. On remarque en effet le passage des petits êtres vivants sur le bois grugé de certains ouvrages.

Le tourneur propose plusieurs accessoires pour la cuisine : moulins à poivre, rouleaux à pâte, verres. Mais aussi des objets déco comme ces vases à petite ouverture pour accueillir les fleurs séchées. Sans oublier les accessoires féminins comme des pics à cheveux.

M. Parent s'amuse aussi avec les champignons, tournés de toutes les grosseurs : des gros, en cèdre, qui peuvent être posés dans le jardin, des petits décoratifs pour les tablettes, et d'autres aimantés qui «poussent» sur les frigos.

Mais ce sont souvent ses toupies qui attirent l'attention. Des toupies qui virevoltent en équilibre sur un doigt. Pourquoi ces jouets sont-ils si appréciés? «C'est un fil conducteur vers l'enfance», explique tout simplement l'artisan.

Pour la finition, M. Parent emploie plusieurs scellants, de la cire d'abeille à la laque, en passant par la résine époxy alimentaire pour les verres.

L'artisan offre aussi des cours de tournage sur bois, du «surf» sur bois, à Québec, à l'école d'ébénisterie Artebois (www.artebois.com). N'importe qui peut s'y initier, et prendre goût, peut-être, à écouter le bois «parler».