On le sait, pour plusieurs, le déplacement vers le bureau est parfois instantané. Un ordinateur installé dans une pièce de fortune avec un lien sans fil et le tour est joué. Mais pour d'autres, l'espace physique est encore déterminant et étroitement relié à leurs fonctions. Alors, comment aménage-t-on une pièce selon sa profession quand on peut travailler de la maison?

On le sait, pour plusieurs, le déplacement vers le bureau est parfois instantané. Un ordinateur installé dans une pièce de fortune avec un lien sans fil et le tour est joué. Mais pour d'autres, l'espace physique est encore déterminant et étroitement relié à leurs fonctions. Alors, comment aménage-t-on une pièce selon sa profession quand on peut travailler de la maison?

 L'architecte Natalie Dionne a eu le privilège de concevoir son lieu de travail en lien avec sa résidence et de le bâtir sur un des rares terrains vagues «adossés au Plateau-Mont-Royal» encore disponibles.

«Nous sommes situés dans les friches urbaines. Les gens qui occupent des fonctions semblables aux nôtres font souvent le choix de s'installer dans les zones mixtes où occupations résidentielle, industrielle et commerciale se côtoient. On s'approprie ainsi les limites des quartiers, là où l'embourgeoisement ne s'est pas encore rendu.»

Cela permet notamment de faire les choses à sa façon et d'y avoir accès de façon abordable. Nathalie Dionne et son conjoint Martin Laneuville, également architecte de formation, ont fait l'acquisition d'un ancien petit bâtiment industriel et du terrain connexe afin d'y élire domicile, de transformer et de créer à leur goût ce qui leur permettait d'offrir un toit à leur fille et d'exercer leur métier. «L'architecte en moi a toujours voulu créer quelque chose de neuf» explique Mme Dionne. «Je voulais un bureau professionnel à la maison, un atelier où l'on peut occuper l'espace pour concevoir des prototypes ou des maquettes; un lieu propice à la création avec une mixité travail et atelier de fabrication.»

Inspirant, l'endroit l'est certes. Les matières brutes qui le composent y sont mises en valeur. Le plancher de béton poli avec une meule au diamant rend le grain lisse et offre une surface brillante et chaleureuse (et lavable). Les tables de travail en pin constituées d'un seul bloc renforcent cette appartenance minimaliste. Elles peuvent accueillir quatre postes de travail. Le bureau abrite aussi deux bibliothèques (technique et de références). Ordinateurs, fax et imprimante complètent l'ensemble. De plus, la lumière abonde grâce aux immenses fenêtres de bois de cédro (une essence du Honduras).

Du contreplaqué marin a été adopté pour les façades extérieures et de la tôle ondulée, qui ne demande pas d'entretien, orne le mur donnant sur la ruelle. Les fenêtres de ce même côté sont en verre poli et préservent l'intimité de l'endroit. L'accent est donc mis sur la cour intérieure, véritable petite oasis composée notamment d'une terrasse en bois (du ipé brésilien), de dalles d'ardoise et de verdure.

«Nous avons une approche hybride et nous voulions faire le lien entre l'industriel et le résidentiel. Aller au bout de nos idées, créer un espace sans compromis et pousser l'exploration de matériaux. Utiliser au maximum une parcelle urbaine vide et s'installer en mitoyenneté. C'est le lieu qui a dicté l'intervention.» Et les propriétaires ont fait preuve d'assez d'imagination et d'originalité pour composer avec les contraintes et déplacer en quelque sorte la cour au centre du projet afin de s'offrir un environnement visuel très intéressant. «Nous avons choisi de nous retourner vers l'intérieur, à la manière de certains architectes japonais en contexte urbain.» Une idée qui fera sans doute beaucoup de chemin.

Travailler dans ses chaudrons

Se sustenter n'est pas qu'un besoin primaire. C'est aussi parfois un moyen de gagner sa croûte, précisément. La cuisine d'Helen Larsson, malgré son décor coquet et chaleureux, sert en quelque sorte de laboratoire à cette consultante en alimentation qui agit à l'occasion comme chef privé. La rénovation totale de cette cuisine, réalisée il y a quelques années, devait tenir compte de cette préoccupation dans sa conception. En fait, il s'agit d'une vaste pièce semblable à bien d'autres cuisines, à quelques détails près. On y retrouve deux fours, un réchaud, un immense frigo, une grande cuisinière à gaz comptant cinq ronds, un îlot doté d'un lavabo, des espaces de rangement particulièrement abondants et tout un pan de livre de recettes.

Celle qui se spécialise dans la cuisine actualisée souhaitait que le concept des lieux reflète son goût de faire plaisir aux gens et préserve ce sceau d'authenticité de ce qui est fait maison, à l'image de ses services. La convivialité devait donc être au rendez-vous. Après avoir consulté moult revues et publications consacrées à la décoration de cuisines, elle a fait appel aux services de la designer Sheryl Johnston qui avait travaillé pour une de ses amies. Cette alliance s'est avérée fructueuse.

«Je fais beaucoup de recherche et les membres de ma famille me servent à l'occasion de cobayes», plaisante Helen Larrson. Je reçois aussi énormément et j'aime mettre mes invités à contribution. Cet endroit me plaît. Je m'y sens bien. Je suis contente qu'une des fenêtres donne dans la rue. Je vois du mouvement, c'est plus animé.» Pour ce qui est des matières, le marbre a été privilégié pour les plans de travail. «On peut y étendre directement le caramel. C'est la surface idéale.» Les origines suédoises de la cuisinière l'inclinent à favoriser le pin. Mais comme cette essence se prêtait moins bien à ses besoins, la designer l'a plutôt convaincue de considérer le chêne dont la teinture a satisfait ses goûts. Si c'était à refaire, la seule chose qu'elle souhaiterait intégrer serait un système de son et peut-être une prise de courant. On n'est jamais trop branché.

Un grenier dépoussiéré

Pour David Gaucher, scénographe, le fait de consacrer une pièce de sa maison à son espace de travail a été déterminant au moment de l'achat de sa nouvelle demeure, il y a un an. «Nous avons visité près d'une trentaine de propriétés. Aucune ne convenait à nos critères. Ce n'est pas facile de trouver un appartement qui possède un espace décloisonné allant de 400 à 600 pieds carrés.»

Le coup de coeur a finalement eu lieu dans le nord de la métropole. Un haut de duplex, historique et cité au patrimoine, possédant un grenier avec beaucoup de cachet a ravi les attentes de l'artiste. Plutôt que d'aménager cette pièce en fonction de ses besoins professionnels, il a choisi de s'y soumettre pour ainsi dire. De ranger ses accessoires dans les combles du grenier et de profiter de la luminosité de l'endroit. Le plafond très haut - 13 pieds à la pointe la plus élevée -, et les immenses murs de pierre laissent ainsi libre cours à son imagination.

«À l'occasion, cette pièce a aussi une fonction d'apparat. Elle devient un peu un portfolio tridimensionnel. Plusieurs des maquettes des projets qui ont ponctué mon travail y sont en montre. De plus, je suis content que mon bureau soit détaché du reste de la demeure. Je voulais un minimum de distance entre ma vie privée et mon travail.»

La fabrication d'espaces de rangement est aussi prévue. Pour l'instant, une table de travail trône souverainement.