On dit que la pièce de la maison qui en révèle le plus sur la personnalité des propriétaires n'est ni la cuisine ni la chambre à coucher... mais bien le bureau!

Est-il méthodiquement rangé? Y règne-t-il un désordre créatif? Son propriétaire a-t-il choisi avec soin les meubles ou agencé ceux qui ne trouvaient aucune place ailleurs dans la maison? Quatre personnalités ont accepté de nous parler de leur rapport au bureau... à la maison!

JOSÉE FISET, CHEF D'ENTREPRISE

Le loft bureau

1 Josée Fiset a fondé la boulangerie Première Moisson, en 1992, avec sa mère et ses frères. Au siège social de Dorion, elle se partage entre diverses facettes de l'entreprise, des ressources humaines aux finances, en passant par le développement de produits, le service à la clientèle, les ventes et le marketing!

Mais la cadence ralentit quand elle retrouve son loft bureau, à la maison. «C'est MOOON espace, dit-elle avec un joyeux accent sur le «mon». Ici, je suis hyperefficace... en réflexion. J'ai vraiment besoin des deux environnements. Les deux sont inspirants et nécessaires.» Josée Fiset vit à l'Île-des-Soeurs avec ses deux enfants, Anne, 13 ans, et Nicolas, 15 ans dans deux jours (le 11 avril), Léo le bichon frisé et Catou la chatte.

Q: Passez-vous beaucoup de temps à votre bureau, à la maison?

R: C'est très variable mais en moyenne, je dirais une journée ou deux par semaine. À la maison, outre le bureau, il m'arrive aussi de m'installer avec les enfants à la table de la salle à dîner, et alors chacun fait ses devoirs. Quand j'ai de gros documents à lire, que j'ai cuisiné et passé la soirée avec mes enfants, je prends un bain et je m'installe dans le lit.

Q: Quel genre de travail faites-vous dans cet espace?

R: Si je dois réfléchir quelques heures à des concepts, je monte dans le loft. Je m'installe sur le fauteuil avec un ou deux documents et une tablette à écrire, les pieds sur la table à café. Ce lieu est inspirant aussi, en petit groupe, pour réfléchir hors du contexte habituel. Nous avons eu des réunions de planification stratégique, à sept ou huit dans cette belle pièce, avec quelques tables gigognes et un petit tableau. Pour le lunch, on a fait livrer des produits Première Moisson! Le matin, avant les grosses journées de travail, il m'arrive de passer quelques minutes ici, les yeux fermés, à bien respirer.

Q: Avez-vous l'impression que c'est un refuge par rapport à votre travail ou, à l'inverse, une invasion du boulot à la maison?

R: Quand on est entrepreneur, travailler à la maison est un grand bonheur. Mon loft correspond à un besoin autant que les installations de Dorion et les 20 succursales. C'est un lieu de recueillement, d'inspiration, de détente, de grande béatitude et de grand calme.

Q: Votre espace bureau est-il à votre image?

R: Oui, c'est un endroit que j'ai voulu doux, le plus épuré possible en conservant un côté chaleureux. Tous les outils de travail sont cachés: l'imprimante, le fax et la filière sont dans le placard, et même le téléphone filaire, branché est caché dans le premier tiroir du bureau! J'ai choisi le bois pour sa luminosité. J'aime le mélange des styles, l'allure contemporaine plus un petit détail, une petite finesse. Mon bureau est un havre mais ce n'est tout de même pas une zone militaire: les enfants viennent y feuilleter les albums photos.

Q: Avez-vous mis beaucoup de soin à aménager votre bureau?

R: Tous les petits détails ont été soigneusement réfléchis, car je suis comme ça dans la vie! Chaque espace est précieux et a sa vocation. La bibliothèque est divisée en section: une vingtaine de gros albums photos, des livres de recettes, une section santé-nutrition, une autre famille et éducation des enfants, une partie psychologie et spiritualité, une division littérature. J'adore les cristaux, les formes rondes, les sphères, les oeufs. Il y en a un peu partout dans cette pièce. Ces objets sont près de moi, je vis avec eux.

-Carole Thibaudeau

KIM THÚY, AUTEURE

Une table, une chaise et le bonheur d'écrire

2 La veille de l'entrevue, l'auteure Kim Thúy est arrivée de Suède où elle faisait la promotion de son premier roman. Son mari aussi voyage beaucoup: à peine est-elle revenue, qu'il s'envole pour New York. Kim, également avocate et restauratrice, reprend donc les rênes du foyer. Elle vit le meilleur des deux mondes: écrire à la maison en ayant ainsi plus de facilité à s'occuper de ses deux garçons, à faire la cuisine. Quand les enfants reviennent de l'école, elle les laisse s'installer au bureau. «Ma souris est collante!», avoue-t-elle en riant.

Q: Passez-vous beaucoup de temps derrière votre bureau, à la maison ?

R: J'y passe 15 heures par jour! Dès que les enfants partent à l'école. Nous avons acheté la maison, il y a 10 ans. Elle avait été très bien rénovée par l'ancien propriétaire. Je ne savais pas que j'écrirais ici, dans le solarium. C'est une extension de la cuisine. Il y a tellement de lumière ici, que parfois je prends un parapluie pour voir l'écran. En étendant les bras, je touche le bureau et la cuisinière à la fois. Ici, ça sent le ragoût et les côtes levées.

Q: Quel genre de travail faites-vous dans cet espace?

R: Tout le monde en profite. Avant, on mangeait sur cette table. Maintenant j'y écris, je prends des notes pour mon prochain livre. En dessous, j'ai logé un petit chariot coloré pour mettre mes papiers, mes chèques, mes reçus. J'ai rendu service à mon comptable! C'est une ancienne table achetée en Thaïlande. Elle n'est pas particulièrement belle, mais je l'aime beaucoup. Une partie de la frise au milieu est tombée. Aussi, le dessus est un tableau en soi. Elle est usée, égratignée, avec des bosses. Ça lui donne beaucoup de caractère.

Q: Avez-vous l'impression que c'est un refuge ?

R: C'est mon refuge. C'est le paradis. Je suis très chanceuse. Je me sens choyée de m'asseoir à ma table. Le paradis, c'est de pouvoir écrire, jouer avec les mots. La nature m'entoure. Il y a de grands arbres et le parc derrière. Mais je ne vois pas grand-chose autour quand j'écris. Je travaille dans le silence. Mais il y a les oiseaux, des carouges, des cardinaux. C'est une bénédiction de les voir, mais une distraction aussi.

Q: Avez-vous passé beaucoup de temps à aménager votre bureau ?

R: Le lieu physique est peu important pour moi. Je n'ai pas une facilité à m'installer quelque part, à vivre dans le confort. C'est mon mari qui s'occupe de la déco ailleurs dans la maison. C'est lui qui a insisté pour que je prenne cette table plus grande et plus confortable comme bureau. Avant, j'écrivais sur une table trop petite, trop haute, très inconfortable. J'ai fini par terminer l'édition de Ru debout parce que j'avais trop mal au dos!

-Marie France Léger

Photo: Ivanoh Demers, La Presse

Kim Thuy écrit dans le solarium et protège son écran avec un parapluie!

PAUL BERNIER, ARCHITECTE

Concevoir dans une maison d'exception

3 Le soir, de retour de son agence, l'architecte Paul Bernier aime bien fignoler ses dessins dans la quiétude de son bureau. Véritable cocon façonné de bois blond, cet espace de 16 m2 - qu'il partage avec sa conjointe Joëlle Thibault - est logé dans un étage partiel ajouté sur le toit.

Située dans l'arrondissement du Plateau-Mont-Royal, à Montréal, la résidence du couple est connue des amateurs d'architecture, car elle a figuré dans plusieurs publications, dont l'édition de ce mois-ci du magazine américain Dwell et La Presse. Cela lui a également valu le prix Marcel-Parizeau 2009, de l'Ordre des architectes du Québec.

Malgré les honneurs, l'homme de 46 ans demeure d'une grande simplicité. Depuis 20 ans, il s'est forgé une réputation enviable dans le milieu résidentiel en multipliant les projets de maisons individuelles.

Q: Passez-vous beaucoup de temps derrière votre bureau, à la maison?

R: Une à deux heures, presque tous les soirs, après avoir couché les enfants (Victor, 4 ans, et Édouard, 7 ans). À l'occasion, je poursuis mon travail le lendemain matin et j'assiste parfois au lever du soleil, puisque ma table est installée contre des fenêtres orientées au nord-est. Pour ce qui est des fins de semaines, j'essaie de ne pas travailler... mais pendant la sieste du plus jeune ou pendant que les deux s'amusent dans leur salle de jeu, j'en profite pour m'installer à mon bureau.

Q: Quel genre de travail faites-vous dans cet espace?

R: J'aime dessiner à l'ordinateur ou au crayon, explorer de nouvelles idées, terminer des plans ou parfaire le design de mobilier. Alors que mon agence est à aire ouverte, mon bureau est calme et silencieux le matin, quand les enfants sont partis. Ce qui favorise la concentration et me permet de rédiger des textes. De temps à autre, Joëlle s'installe à sa table. Le bureau est assez spacieux pour deux.

Q: Avez-vous l'impression que c'est un refuge par rapport à votre travail ou, à l'inverse, une invasion du boulot à la maison?

R: Heureusement, j'ai un bureau à l'extérieur, à 20 minutes de marche. Autrement, j'aurais effectivement l'impression d'être envahi... De toute façon, je dois m'y rendre, car mes livres techniques, mes échantillons et mes catalogues de produits s'y trouvent. Un jour, j'aimerais toutefois que mon agence soit encore plus près de chez moi.

Q: Votre espace-bureau est-il à votre image?

R: Bien sûr. D'abord, j'aime créer une unité de matériaux et, ici, le merisier huilé est omniprésent! Dans mon bureau, les tables, le sol, la bibliothèque: tout est en merisier massif. Ensuite, j'apporte un soin particulier aux détails et à l'utilisation de l'espace. L'entrée de lumière est aussi capitale. Enfin, le dépouillement de l'aménagement est très apaisant et deux fauteuils, dont la Chaise longue de Le Corbusier, permettent de lire et de se relaxer.

Q: Avez-vous mis beaucoup de soin à aménager votre bureau?

R: Oui, car il est logé dans un étage partiel ajouté sur le toit. En raison du règlement d'urbanisme, cet agrandissement ne devait pas être vu de la rue. J'avais une limitation quant à la hauteur du plafond. Je l'ai donc conçu en V, car c'était la seule façon d'aller chercher une hauteur maximale de fenêtres. D'où sa forme aux allures d'une coque de bateau vue par en dessous. Grâce à un bandeau de fenêtres (en pin) qui jouxte le plafond, j'aperçois le ciel plutôt que les bâtiments voisins.

-Lucie Lavigne

Photo: Hugo-Sébastien Aubert, collaboration spéciale

Paul Bernier dans son bureau, véritable cocon façonné de bois blond.

BERTRAND LEBOEUF, CONSTRUCTEUR

Être efficace, sans distraction

4 Bertrand Leboeuf est engagé jusqu'au cou dans la planification et la construction de l'un des plus prestigieux immeubles en copropriété à Montréal: Altitude Montréal. La luxueuse tour d'habitation de 33 étages, à laquelle s'ajoute un immeuble contigu de 24 étages, prend forme au coeur du centre-ville, de biais avec la Place Ville-Marie, le long de la rue University. Les heures sont longues pour le président du Groupe Daca, qui apprécie d'autant la quiétude de sa maison, située à Laval, en bordure de la rivière des Mille-Îles. L'entrepreneur de 52 ans a acheté le terrain plusieurs années avant de faire construire sa demeure, en 1996. Il y habite avec sa conjointe, Odile Chevassus, et leurs trois enfants.

Hyper occupé la semaine, il ne peut se détacher complètement du travail les fins de semaine. Aussi a-t-il aménagé un bureau dans une pièce, située dans un coin tranquille de son domicile.

Q: Passez-vous beaucoup de temps derrière votre bureau, à la maison?

R: J'y travaille surtout les fins de semaine, car la semaine, je suis au bureau tôt et je pars tard. Le samedi matin, avant que la famille se lève, je m'installe vers 7h et je termine vers 9h ou 10h. Cela n'empiète donc pas trop sur les activités de la journée. Je le fais aussi le dimanche matin, lorsque c'est nécessaire. Ces temps-ci, je n'ai pas le choix, car nous sommes dans une période très occupée. Mais c'est agréable, parce que je ne me fais pas déranger. Je peux accomplir en une ou deux heures ce qui m'en prendrait quatre ou cinq au bureau.

Q: Quel genre de travail faites-vous dans cet espace?

R: Je fais ce que je n'ai pas réussi à faire pendant la semaine. C'est surtout un travail de planification et d'administration. Je vérifie les coûts, la performance de notre marketing, l'échéancier de la construction, etc.

Q: Avez-vous l'impression que c'est un refuge par rapport à votre travail ou, à l'inverse, une invasion du boulot à la maison?

R: C'est une invasion du bureau à la maison. Mais en même temps, comme je suis seul et que c'est paisible, je peux me concentrer plus facilement.

Q: Votre espace-bureau est-il à votre image?

R: Oui. J'aime les espaces aérés et l'allure moderne. La pièce est spacieuse, avec un plafond de 11 pieds de hauteur, et de beaux meubles à l'allure épurée. Je dois préciser, par contre, que ma conjointe, qui est journaliste, travaille aussi dans le bureau. Elle y a mis des touches personnelles... et c'est elle qui a choisi les meubles.

Q: Avez-vous mis beaucoup de soin à aménager votre bureau?

R: Oui. Le mobilier de bureau, en cerisier, a été fait sur mesure par un ébéniste. Il est moderne, avec des lignes nettes, et il est très pratique. Il y a beaucoup de compartiments pour ranger des dossiers. Nous avons mis une vitre sur le dessus de la table de travail pour la protéger. Il y a aussi deux fauteuils de cuir pour recevoir, à l'occasion, des clients. Mes enfants viennent souvent s'y asseoir pour jaser!

-Danielle Bonneau

Photo: Olivier Pontbriand, La Presse

Bertrand Leboeuf travaille dans le calme de son bureau, dans sa maison de Laval.