Si les murs pouvaient parler, ils raconteraient les milliers de bouteilles vides empilées dans le hangar, les 26 chats de la voisine qui laissaient leurs traces puantes dans la cave, les seringues et les vieux matelas, oubliés par les itinérants et les squatters de ce «8» désaffecté.

Si les murs pouvaient parler, ils raconteraient les milliers de bouteilles vides empilées dans le hangar, les 26 chats de la voisine qui laissaient leurs traces puantes dans la cave, les seringues et les vieux matelas, oubliés par les itinérants et les squatters de ce «8» désaffecté.

L'une des deux chambres d'en haut, avec un lit de métal adossé à une étagère de bois. La belle luminosité et les murs de pierre donnent beaucoup de cachet à la pièce.

Les quartiers changent. On va toujours «téter» un café chez Temporel, prendre une bière comme on fait un pèlerinage à l'Ostradamus et faire ses courses à l'épicerie de la rue Couillard. Mais la plupart des troquets et des restaurants ont fermé dans le quartier latin, en même temps que l'Université Laval déménageait sur son campus, à Sainte-Foy.

Un jeune couple d'amoureux s'est installé dans cette étroite rue du Vieux-Québec, bordée par Garneau, au sud, et par Couillard, au nord. Une vraie carte postale! Depuis que les poteaux et les fils ont disparu, plusieurs scènes de film ont été tournées là, dont Mémoires affectives. Il y a des gros arbres dans la cour. Et c'est tranquille, parce que la rue est trop petite pour les carnavaleux et les festivaliers.

Un petit meuble met en valeur l'escalier.

«C'est notre nid d'amour», ont confié l'homme et la femme, à tour de rôle. Sur un tableau noir, dans le bureau, une phrase écrite à la craie témoigne de leur philosophie: «Notre maison est petite, mais il y a de la place pour l'amour et les amis!»

Leur appartement est sur deux niveaux. La cuisine et le salon sont en bas, les deux chambres, en haut. Mais dans ce petit univers douillet, il y a de la place pour des murs de pierre, des poutres de bois bien conservées, des fenêtres enfoncées dans des parois épaisses et un foyer non fonctionnel dans lequel des bougies font un semblant de feu.

Un foyer non fonctionnel dans lequel des bougies réchauffent l'âtre.

Un canapé et une causeuse rouges se découpent sur les murs de pierre. Sur la table de cuisine, un poinsettia emplumé espère vivre jusqu'à la Saint-Valentin. Deux petites plantes prennent le soleil sur le rebord d'une fenêtre aux volets ouverts. Les CD sont dans un support de métal vertical. La chaîne stéréo a trouvé sa place dans une alcôve qui ressemble à un vieux four à pain. Deux portes doublent s'ouvrent sur la cour, ceinte d'un haut mur de pierre.

«L'été, on entend parfois les clients de l'auberge de jeunesse ou de l'Ostradamus, mais la plupart du temps, c'est très tranquille», commente le jeune homme. Comme sa conjointe, élevée en Gaspésie, il a développé son goût pour la ville, qu'il n'entend pas quitter, même lorsque les enfants viendront.

Fenêtre sur rue

«Les pièces exiguës posaient tout un défi», relate-t-elle. Le couple a réussi à loger tous ses meubles, mais il a dû acheter une étagère pour la télé, afin de la glisser dans l'espace réduit sous les marches ascendantes. Et pour pallier l'absence de garde-robe à l'entrée, il a fixé une tringle au-dessus de l'escalier menant à la cave.

Les deux locataires ont décoré leur cocon centenaire avec des meubles contemporains. À l'étage, un pupitre de métal et de verre semble flotter dans le bureau. Une poutre mal placée ratatine l'espace occupé par un divan-lit petit format et une penderie aux belles portes de bois. Une étroite lisière de pierre a été préservée. Comme c'est coquet!

Un bureau bien éclairé.

La chambre est tout aussi charmante. Le lit de métal, tout dodu, a été adossé à une étagère de bois, qu'il coupe en deux sans offense au bon goût. La pierre et la lumière font le reste du travail.

Aucun fantôme éméché ne plane dans cet appartement. Les âmes des couples illicites se sont évanouies dans le dédale des rues. Les oiseaux de nuit ont migré vers la Grande Allée, remplacés par deux tourtereaux, irréductibles amoureux de la ville et de ses repaires.