(Kyiv) L’armée ukrainienne a réussi à établir des positions sur la rive sous contrôle russe du fleuve Dniepr, dans le sud du pays, a admis mercredi pour la première fois un responsable de l’administration installée par Moscou dans la zone occupée.

Si l’armée ukrainienne parvenait à percer les lignes russes dans ce secteur, il s’agirait d’un succès important, alors que sa vaste contre-offensive ailleurs dans le pays depuis juin n’a pas eu les résultats escomptés.  

« Environ une compagnie et demie, répartie en petits groupes, se trouve sur un tronçon allant du pont ferroviaire jusque (au village de) Krynky », a dit sur Telegram Vladimir Saldo, le dirigeant de la partie occupée de la région ukrainienne de Kherson.

Il est le premier responsable russe à admettre que les forces ukrainiennes ont réussi à traverser le Dniepr dans cette zone et à y ancrer des positions. Le Kremlin avait lui refusé de s’exprimer sur le sujet cette semaine, et l’armée russe n’en dit mot dans ses rapports quotidiens.

Une compagnie, selon le glossaire militaire de l’agence de presse russe Tass, peut être constituée de plusieurs dizaines ou centaines de soldats.  

M. Saldo a cherché cependant à minimiser l’importance de cette avancée, affirmant que des renforts russes avaient été déployés et que les forces ukrainiennes étaient pilonnées par l’artillerie russe.

« Maintenant, des forces supplémentaires (russes) ont été déployées. L’adversaire est bloqué à Krynky, dans un enfer de feu : des bombes, des roquettes, des munitions de systèmes thermobariques, de l’artillerie, des drones lui tombent dessus », a-t-il indiqué sur Telegram.

Le responsable a affirmé aussi que les Ukrainiens subissaient des pertes importantes, n’avaient « aucune chance » de réussir et s’étaient heurtés au « courage du soldat russe ».

Selon des blogueurs spécialisés russes et ukrainiens et des experts ayant analysé des renseignements accessibles en ligne, l’armée ukrainienne a réussi à ancrer plusieurs positions depuis fin octobre sur la rive gauche du Dniepr, dans la région méridionale de Kherson que le vaste fleuve traverse du nord au sud.

Selon eux, ces forces ont traversé le fleuve peu à peu à l’aide d’embarcations.

Pour pouvoir espérer pénétrer en profondeur le territoire occupé, l’armée ukrainienne devra réussir à transférer des équipements lourds dans cette zone sablonneuse et marécageuse.  

« Prendre pied »

Si l’Ukraine parvenait à consolider ses positions, elle pourrait espérer une percée dans cette zone du sud de l’Ukraine où le Dniepr fait office de ligne de front depuis que l’armée russe a dû se retirer de la ville de Kherson, sur la rive droite, en novembre 2022.

Kyiv entretient le secret sur ses opérations, mais le chef de l’administration présidentielle, Andriï Iermak, a affirmé mardi que les forces ukrainiennes avaient « pris pied sur la rive gauche du Dniepr ».

Les forces ukrainiennes ont lancé en juin une vaste contre-offensive dans le sud et l’est pour reconquérir les territoires occupés. Mais le chef de l’armée ukrainienne, Valery Zaloujny, a admis début novembre que les deux armées étaient pour l’heure « dans une impasse », avec un front figé.

Il est pourtant essentiel de gagner du terrain pour Kyiv, qui veut éviter l’effet de lassitude chez ses alliés occidentaux vis-à-vis d’un conflit qui dure depuis près de deux ans, au moment où les yeux de la communauté internationale sont tournés vers Israël et la bande de Gaza.

L’Ukraine est extrêmement dépendante des armes et munitions qu’Américains et Européens lui livrent, et le sujet d’une réduction du soutien économique et militaire est évoqué dans certains pays.

Le Kremlin affirme de son côté avoir réorienté l’économie sur la production d’armes et munitions et recruté quelque 400 000 soldats supplémentaires depuis le début de l’année.

Les forces russes sont aussi à l’offensive dans plusieurs zones du front, leurs principaux efforts visant, malgré d’importantes pertes, à encercler et conquérir Avdiïvka, ville industrielle de l’Est.

Vendredi, le ministre de l’Intérieur ukrainen, Igor Klimenko, a annoncé que deux secouristes avaient été tués par une frappe russe dans la région de Zaporijjia (sud-est). Trois autres sauveteurs et quatre civils ont été blessés, a-t-il précisé.

Dans l’est, à Selidové, deux personnes ont été tuées pendant la nuit dans un bombardement russe qui a également fait trois blessés, selon le ministère de l’Intérieur.

Le Kremlin « regrette » les projets de la Finlande de fermer sa frontière avec la Russie

Le Kremlin a dit mercredi « regretter profondément » que la Finlande envisage de fermer sa frontière avec la Russie, face au nombre élevé de passages de migrants irréguliers et dans un contexte de tensions croissantes.

Les relations entre les deux voisins se sont considérablement détériorées depuis février 2022 et l’offensive russe en Ukraine, une attaque qui a conduit la Finlande, inquiète pour sa propre sécurité, à rejoindre l’OTAN, alliance que Moscou considère comme une menace.  

« Nous regrettons profondément que les autorités finlandaises aient choisi le chemin d’une distanciation délibérée du bon caractère des relations qu’on avait avant », a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Il était interrogé sur le fait que la Finlande ait annoncé mardi envisager de restreindre le trafic frontalier voire de fermer ses points de passage avec la Russie, après une hausse du nombre de passages de migrants irréguliers.

Le premier ministre finlandais Petteri Orpo a accusé la Russie de laisser délibérément les migrants franchir la frontière alors même qu’ils n’ont pas de documents valides, suggérant qu’il s’agissait d’une tentative pour déstabiliser son pays.

La Finlande partage une frontière de 1340 kilomètres avec la Russie.

Après le début de l’offensive russe en Ukraine en février 2022, la Finlande a assisté à une hausse des arrivées à sa frontière avec la Russie de personnes sans visa, essentiellement des Russes et Ukrainiens.