(Moscou) La Russie, médiatrice dans le conflit entre l’Azerbaïdjan et l’Arménie, a accusé samedi Bakou d’avoir violé l’accord de cessez-le-feu ayant mis fin à la guerre de 2020 entre ces deux pays en laissant ses troupes franchir la ligne de démarcation.

« Le 25 mars 2023 (samedi), une unité des forces armées azerbaïdjanaises a franchi la ligne de contact dans le district de Choucha, en violation » de l’accord conclu en 2020, a indiqué le ministère russe de la Défense dans un communiqué.

Selon Moscou, les troupes azerbaïdjanaises ont « occupé une hauteur » et « commencé l’installation d’un poste ».

Les soldats de maintien de la paix russes sur place « prennent des mesures visant à empêcher une escalade de la situation de crise et à éviter les provocations mutuelles des parties opposées ».

« La partie azerbaïdjanaise a été informée de la nécessité de respecter les dispositions (de l’accord), de prendre des mesures pour arrêter les travaux d’ingénierie et de retirer les forces armées sur les positions qu’elles occupaient auparavant », a encore ajouté le ministère russe.

Plus tôt samedi, le ministère azerbaïdjanais de la Défense avait annoncé avoir pris le contrôle de certaines routes dans l’enclave du Nagorny-Karabakh.

Ces « mesures de contrôle nécessaires ont été mises en œuvre par les unités de l’armée azerbaïdjanaise afin d’empêcher l’utilisation des chemins de terre au nord de Latchine » pour les livraisons d’armes en provenance d’Arménie, a justifié le ministère.

Erevan accuse des militants azerbaïdjanais de bloquer depuis mi-décembre une route vitale — le corridor de Latchine — qui relie l’Arménie aux territoires contrôlés par des séparatistes arméniens au Nagorny Karabakh.

L’Arménie met en garde depuis plusieurs semaines sur une « crise humanitaire » du fait de ce blocus, qui a provoqué des pénuries de médicaments et de nourriture et des coupures d’électricité. Bakou a rejeté ces accusations.

Erevan a accusé les soldats de la paix russes de ne pas agir pour mettre fin à ce blocus et annoncé son intention de recourir à l’ONU pour prévenir un « génocide » des Arméniens de l’enclave du Nagorny Karabakh.

L’Arménie et l’Azerbaïdjan, deux ex-républiques soviétiques du Caucase, se sont affrontés lors d’une courte guerre en 2020 pour le contrôle de l’enclave du Nagorny-Karabakh.

Ce conflit avait donné lieu à une déroute militaire arménienne et à un accord de cessez-le-feu parrainé par la Russie, qui a déployé des soldats de la paix sur place.

Échauffourées meurtrières

Des échauffourées meurtrières au Nagorny-Karabakh ou à la frontière entre les deux pays continuent toutefois d’éclater périodiquement.

Le 23 mars, Erevan a affirmé qu’un soldat arménien avait été « mortellement blessé lorsque les troupes azerbaïdjanaises ont ouvert le feu à Eraskh » la veille, dans la partie sud-est de la frontière.

La semaine précédente, l’Azerbaïdjan avait accusé l’Arménie d’avoir ouvert le feu sur ses positions à la frontière et au Nagorny-Karabakh.

Le premier ministre arménien Nikol Pachinian avait dans le même temps averti qu’il existait un « très fort risque d’escalade » dans cette enclave en majorité peuplée d’Arméniens.  

Région montagneuse ayant fait sécession de l’Azerbaïdjan à l’effondrement de l’Union soviétique, le Nagorny-Karabakh continue d’empoisonner les relations entre Erevan et Bakou.

Le premier conflit, au début des années 1990 au moment du démantèlement de l’URSS, qui a fait 30 000 morts, s’est soldé par une victoire arménienne avec le soutien de Moscou.

Mais l’Azerbaïdjan a pris sa revanche à l’automne 2020 à l’occasion d’une deuxième guerre, qui a fait 6500 morts et lui a permis de reprendre de nombreux territoires.  

L’Arménie se montre de plus en plus critique du rôle de la Russie, son allié traditionnel, un test pour l’influence régionale de Moscou, embourbé dans son invasion de l’Ukraine.