Nicola Sturgeon a pris vendredi à Perth la tête du parti nationaliste écossais (SNP), combatif et paradoxalement revigoré deux mois après l'échec d'un référendum sur l'indépendance qui reste plus que jamais l'objectif ultime.

«Je crois aujourd'hui plus que jamais que l'Écosse doit être indépendante», a martelé vendredi matin au congrès du parti Nicola Sturgeon.

Quelques heures plus tard, Alex Salmond, accueilli comme une «rock star» pour son ultime discours en tant que chef du parti, s'est montré plus catégorique : «l'Écosse sera une nation indépendante».

Faisant allusion aux trois principaux partis britanniques - conservateurs, travaillistes et libéraux démocrates - qui ont fait bloc contre l'indépendance pendant la campagne référendaire, il a ajouté, goguenard : «ils pensaient que tout était fini... et bien ça ne l'est pas», sous un tonnerre d'applaudissements.

Celui qui a tenu les rênes du parti séparatiste pendant près de 15 ans (1997-2000 puis 2004-2014) et a été premier ministre d'Écosse pendant plus de sept ans a pris un dernier bain de foule parmi ses partisans, visiblement ému.

À Nicola Sturgeon, à qui il passe le relai après une décennie de collaboration, il a lancé : «ta future contribution - je n'ai aucun doute là-dessus - sera de marquer l'Histoire».

«C'est un bon moment pour notre parti, un bon moment pour notre pays. Je suis prête à diriger ce parti et ce pays pour aller de l'avant», a déclaré Nicola Sturgeon en ouverture de la conférence annuelle du SNP.

Alex Salmond avait annoncé sa démission en septembre après que 1,6 million (45 %) d'Écossais eurent voté en faveur de l'indépendance et 1,95 million (55 %) contre.

Nicola Sturgeon devient la première femme à diriger le SNP, dont le nombre d'adhérents est passé de 25 000 au moment du vote à 85 000 aujourd'hui. Elle deviendra la semaine prochaine la première à occuper les fonctions de première ministre écossaise, après l'investiture du parlement régional où le SNP détient la majorité absolue.

Changement de direction, pas d'objectif 

À défaut d'indépendance immédiate, la priorité est pour l'heure de faire pression sur Londres pour que soient tenues les promesses d'un transfert accru de pouvoirs à Édimbourg, émises en fin de campagne référendaire par les tenants du non en vue d'enrayer la poussée du oui.

«Si le gang de Westminster revient sur ses engagements pris pendant la campagne, il va découvrir que l'enfer n'est rien à côté de la fureur de cette nation méprisée», a menacé Alex Salmond, faisant écho au nouveau numéro 2 du parti, Stewart Hosie, député SNP à Westminster.

Pour John Curtice, professeur de sciences politiques à l'Université de Strathclyde et expert de la politique écossaise, le SNP sort «sans aucun doute renforcé» du référendum.

«Il faut vraiment comprendre la différence fondamentale entre un référendum et une élection», a-t-il expliqué à l'AFP.

«Avec 45 % des votes, le SNP a perdu le référendum. Mais avec 45 % des voix à l'élection au parlement (régional) écossais, il a obtenu la majorité absolue. S'il atteint 45 % des voix lors des élections au parlement de Westminster de mai prochain, il privera le parti travailliste» de la plupart des 41 sièges de députés qu'il a en Écosse, a-t-il estimé.

Le SNP espère être en mesure de jouer les faiseurs de rois si l'hypothèse privilégiée des instituts de sondage se vérifie aux prochaines législatives : faute de claire majorité, il pourrait faire alliance avec les travaillistes.

Il entend cependant marchander son soutien. Vendredi Alex Salmond a estimé que le parti travailliste était «en banqueroute intellectuelle». «Le Labour n'a pas fait confiance à l'Écosse et maintenant l'Écosse ne lui fait pas confiance», a-t-il dit.

Dans les rues de Perth, balayées par la pluie et le vent, les débats politiques ont pour un temps cédé la place aux préoccupations sportives. Nombre d'amateurs de soccer convergeaient en kilt vers la gare pour rejoindre Glasgow afin d'assister au match de qualification Écosse-Irlande pour l'Euro 2016.