(New York) Au procès pour trafic sexuel de Ghislaine Maxwell à New York, une nouvelle victime a raconté mardi sa vie cabossée et souligné le rôle actif que jouait l’ancienne partenaire du financier américain Jeffrey Epstein.

Au septième jour du procès de la fille du magnat britannique Robert Maxwell, devant le tribunal fédéral de Manhattan, une troisième femme, « Carolyn », témoignant sous pseudonyme, a expliqué être allée « plus de 100 (fois) » dans la résidence d’Epstein à Palm Beach, en Floride, entre 14 et 18 ans, pour ce qui commençait toujours par un massage.

Mais « à chaque fois, il se passait quelque chose de sexuel », a-t-elle témoigné, la voix chevrotante, derrière un box vitré anti-COVID-19.

Ghislaine Maxwell, figure de la jet-set de 59 ans – Britannique, Américaine et Française – est jugée depuis le 29 novembre pour avoir fourni à son ancien compagnon et collaborateur qui s’est suicidé en prison à l’été 2019, le richissime Jeffrey Epstein, des jeunes filles mineures afin qu’il les exploite sexuellement.

Les faits incriminés remontent à 1994-2004. Détenue depuis son arrestation à l’été 2020, elle a plaidé non coupable de tous les chefs d’accusation, pour lesquels elle encourt la prison à vie.

« Un ami riche »

Contrairement à deux témoins précédentes déjà citées par l’accusation, « Carolyn » n’a pas désigné Ghislaine Maxwell comme celle l’ayant emmenée pour la première fois chez Jeffrey Epstein.

Elle a parlé d’une autre femme, qui n’est pas partie à ce procès, Virginia Giuffre. Cette Américaine a déposé plainte en 2021 à New York contre le prince britannique Andrew, l’accusant d’être l’un des proches de Maxwell et d’Epstein qui ont abusé d’elle quand elle était mineure, il y a plus de 20 ans.

« Virginia m’a demandé si je voulais me faire de l’argent […] J’allais rencontrer un ami riche » et lui faire des massages, a raconté « Carolyn », vêtue d’un pull ample à rayures.

Devant les jurés, elle a évoqué une enfance difficile à West Palm Beach, son départ de l’école en 5e et une « mère alcoolique et toxicomane ».

Une fois chez Epstein, dans sa luxueuse résidence, « nous étions accueillies par Mme Maxwell, une femme plus âgée (que nous) avec des cheveux noirs ». « Nous montions jusqu’à la salle de bain » où se trouvait une table de massage, selon « Carolyn ». La première fois, se souvient-elle, le massage avait duré 45 minutes, puis Epstein avait eu une relation sexuelle avec Virginia Giuffre, en présence de « Carolyn ».  

« J’étais payée 300 dollars », à chaque visite à Palm Beach, a-t-elle affirmé. « Ghislaine Maxwell appelait et fixait un rendez-vous, ça se passait comme ça la première année », s’est-elle souvenue.  

« Trop vieille » à 18 ans

De 14 à 18 ans – « après, j’étais trop vieille » – les visites se déroulent une, deux, trois fois par semaine.

« Mais pourquoi avoir continué ? » demande le procureur. « J’achetais de la drogue […] de la marijuana et de la cocaïne », avoue « Carolyn » qui assure que le couple ne pouvait ignorer son âge, puisqu’ils en avaient parlé.

Un jour, Ghislaine Maxwell, l’a vue nue : « elle m’a dit que j’avais un très beau corps pour M. Epstein », après lui avoir touché la poitrine. L’accusée, vêtue de noir, ne s’est pas exprimée depuis le début du procès.

Ce troisième témoignage s’ajoute à ceux de « Jane », 14 ans à l’époque, et de « Kate », une Britannique de 17 ans dans les années 1990, qui ont mis au jour le rôle actif de Ghislaine Maxwell auprès de Jeffrey Epstein.

Et comme elles, « Carolyn » a été soumise à un long contre-interrogatoire de la part de la défense, qui a insisté sur ses dépendances passées aux drogues et aux médicaments.

L’un des avocats de Ghislaine Maxwell, Jeffrey Pagliuca, a tenté de pointer toutes les contradictions possibles entre les témoignages de « Carolyn » devant le FBI en 2007, lors d’une première enquête contre Epstein, puis dans ses plaintes et enfin dans la procédure plus récente qui lui a permis de toucher plus d’un million de dollars du « fonds Epstein », un mécanisme officiel de réparation puisé dans la fortune du multimillionnaire après sa mort.  

Il a aussi relevé que dans ses premières auditions, le nom de Ghislaine Maxwell n’était jamais cité.

Ghislaine Maxwell, qui évoluait dans des milieux privilégiés entre Oxford, Londres, Paris et New York, avait rencontré Jeffrey Epstein au début des années 1990 et avait été tour à tour sa compagne, son amie et sa collaboratrice.